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Le mythe de l’égalité

Un dix-septième texte de notre rubrique « Souvenez-vous de nos doctrines » est à retrouver aujourd’hui de Frédéric Le Play une nouvelle fois…

La fausse notion de l’égalité porte plus directement les classes inférieures à l’antagonisme social. Elle suscite des ambitions qui ne peuvent être satisfaites que pour les individualités pourvues de facultés exceptionnelles. Quant à la masse qui sent son impuissance, elle est fatalement conduite à résoudre le faux problème de l’égalité par l’abaissement forcé et, par suite, par le découragement des supériorités sociales.

Sous le gouvernement des majorités, exagéré au-delà des bornes tracées par l’expérience et la raison, la doctrine de l’égalité absolue amènerait bientôt à une décadence que les peuples de l’Antiquité n’ont pu subir sous le régime de l’esclavage. Elle tendrait, en effet, à constituer une race où les hommes éminents, soumis aux caprices de masses imprévoyantes et dégradées, n’auraient aucun intérêt à s’imposer les efforts du travail, du talent et de la vertu.

C’est seulement de nos jours que le mot démocratie est devenu usuel en Europe. Il exprime habituellement un nouvel ordre de choses qui, en attribuant aux classes inférieures l’exercice de la souveraineté, développerait la prospérité des nations. Ce néologisme n’est justifié ni par l’expérience, ni par la raison, et, en troublant les esprits, il donne lieu déjà à de graves difficultés. Le mot démocratie a des sens fort divers dans l’esprit de ceux qui l’emploient.

Ce mot plaît tout d’abord à ceux qui voient dans l’égalité un principe absolu, et qui voudraient que ce principe fût sanctionné par un système de gouvernement. Selon leur fausse doctrine, tous les hommes auraient un droit égal à gouverner la société. Les individualités les moins recommandables devraient, en vertu de leur supériorité numérique, dominer les hommes éminents qui ne forment partout qu’une minorité. Le nivellement des conditions s’opèrerait alors par la répartition et l’emploi de l’impôt. L’incapacité et le vice ne profiteraient plus seulement de l’assistance que leur donne toute société chrétienne, ils jouiraient légalement de tous les avantages sociaux créés par le talent et la vertu. Une telle conception est à la fois chimérique et injuste. La première application qui en serait faite provoquerait de toutes parts l’émigration des hommes d’élite : elle décapiterait en quelque sorte la nation soumise à ce régime, et elle la ferait tomber au dernier degré de l’abaissement. Il importe donc que les Européens cessent d’encourager, par l’emploi d’un mot vague et inutile des erreurs aussi dangereuses.

La France a cruellement souffert des maux engendrés par la corruption des anciennes classes dirigeantes. Elle souffre plus encore de ceux qu’amène, depuis la Terreur, un abominable régime d’égalité forcée. Sous ce régime, en effet, les hommes enrichis par le travail et la vertu n’occupent point, dans la hiérarchie sociale, la place qui leur serait faite chez un peuple libre. Cette place est envahie par une bureaucratie ombrageuse, par les fauteurs de révolutions et par les flatteurs d’une démocratie haineuse.

La tyrannie de l’uniformité est une des formes redoutables de cet esprit d’intolérance qui s’aggrave chez nous sans relâche depuis deux siècles.

Aujourd’hui, la préoccupation principale du nouveau régime, le nivellement des conditions, n’a encore produit qu’un résultat très apparent, l’égalité dans le vice.

L’esprit d’égalité a fait passer sur toutes les classes le niveau du mal.

https://www.actionfrancaise.net/2025/11/22/le-mythe-de-legalite/

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