De 1920 à 1974, il a fallu attendre plus d’un demi-siècle avant qu’une Tahitienne soit élue Miss France. Elle s’appelait Edna Teipotemarama Tepavaaupoko. Edna pour les Popaa, c’est plus facile à retenir. S’ensuivit une nouvelle jachère jusqu’en 1991 avec Mareva Georges. Après, ce sera le tour de Vaimalama Chaves en 2019 et maintenant celui de Hinaupoko Devèze.
La jalousie fait dire n’importe quoi
Une certaine Énora Malagré aux traits assez quelconques s’est ridiculisée en comparant les Miss France aux comices agricoles récompensant les plus belles vaches laitières. Ce second rôle de la télé frivole sait-elle qu’un physique attirant et une plastique irréprochable ne sont pas incompatibles avec une belle agilité intellectuelle ?
Les réticences d’Énora (ou Ersilia ? Il m’arrive de les confondre !) s’inscrivent dans une époque où le socialisme égalitariste prétend niveler tout le monde par le bas. Et où être meilleur que son voisin devient un délit.
D’aucuns trouvent scandaleux de valoriser des femmes belles et intelligentes. Qui sont partantes pour des carrières para-artistiques qu’elles gèrent habilement. Elles ne sont pas des victimes comme le prétendent des fémino-gauchistes qui seraient mieux inspirées de s’occuper du triste sort des Iraniennes, des Yéménites et des Afghanes.
Seuls des bobos peuvent regretter que les Miss ne soient pas représentatives de la société française décadente devenue un patchwork de peuples et de coutumes étrangères, qui rejettent la culture française et prétendent la supplanter. À la différence des Polynésiens qui réussissent à être à la fois Océaniens et Français. Chrétiens et païens. Patriotes et autonomistes. Et sans doute plus français que certains Gaulois qui, depuis Jules César, ont pactisé avec tous les envahisseurs.
Notre histoire commune entre Popaa et Ma’ohi a commencé par un heureux naufrage. Le 22 avril 1839, la frégate Artémise s’échoua sur le récif de Tiarei. Le renflouement dura six mois. Les Tahitiens venus aider à réparer le navire découvrirent qu’à la différence des Anglais puritains qui convoitaient l’île eux aussi, les Français aimaient faire la fête, chanter, danser, rigoler, se balader en petite tenue et honorer les vahinés plusieurs fois par jour. Ces affinités rapprochèrent les deux peuples et jouèrent dans le choix des alliances futures.
Qui est Hinaupoko ?
Elle n’est pas une inconnue au Fenua. Élue Miss Tahiti 2025 malgré ses origines marquisiennes. Un exploit car il existe une longue rivalité teintée d’animosité entre Té Énua Énata et les îles du vent. Accusées de trop tirer la couverture à elles. À tel point qu’on entendait naguère les indépendantistes marquisiens dire qu’ils revendiquaient un micro-État pour leurs îles. Sinon, plutôt que de dépendre de Papeete, ils préféraient rester français.
Les Marquisiens n’aiment pas qu’on les confonde avec les Ma’ohis. Bien que leurs racines austronésiennes soient communes, la langue vernaculaire, les traditions et les dieux sont plus proches des ceux des Hawaïens avec lesquels ils entretenaient des échanges océaniques dans le passé. Les voyages à l’ancienne de Hokulé’a en témoignent, avec les disques de pierre de Eiao en tous points semblables à ceux des Hawaïens qui pratiquaient un jeu d’adresse utilisant de petits disques façonnés dans de la lave ou du grès de plage, les hulu maïka.
Hinaupoko est une fille qui a du mordant. Sans faire de mauvais esprit. Rapport au dernier cas de cannibalisme rapporté aux Marquises en 2011. Nié par les autorités et le procureur pour ne pas faire fuir les touristes. Si Stefan, un Boche bien gras a été occis, dépecé et cuit au feu de bois, ce n’était pas pour le manger. Qu’alliez-vous imaginer encore ? C’était cérémoniel. Le choc des cultures.
Des critères évolutifs
Pour Michèle Barnier, la fille du regretté professeur Choron et présidente du jury, qui se définit elle même comme ronde et plus très jeune : « Ce qui l’emporte à mes yeux, c’est tout ce qui ne s’apprend pas dans un miroir : une attitude, une façon de se tenir, la sincérité d’un regard. » L’importance de l’aura (on dit le mana au Fenua), ce petit supplément d’âme sur lequel il est impossible de tricher.
C’est ce qu’on appelle aussi une présence qui fait que certains sujets, hommes ou femmes, lorsqu’ils arrivent quelque part, captent l’attention sans avoir besoin de se manifester par des artifices et des simagrées. Exister par une gestuelle sobre, un regard posé et la sérénité des gens sûrs d’eux, suffit pour s’imposer naturellement. Simplicité et assurance sans arrogance, ce n’est pas donné à tout le monde.
La nouvelle miss France a passé plus de quinze ans en métropole avant de revenir s’installer au Fenua. Un retour aux sources qu’elle revendique fièrement. Passionnée par la culture océanienne et la transmission de ses traditions, elle souhaite incarner la modernité sans jamais tourner le dos à son héritage marquisien. Je la comprends d’autant mieux que je cultive mes racines Raromataï depuis que je ne suis plus tenu de courir le monde pour mes activités professionnelles.
Âgée de 23 ans, Hinaupoko a suivi des études de droit et de psychologie avant de travailler dans l’administration et le tourisme. Elle a également tenu des petits rôles dans plusieurs clips musicaux. Un pied dans la culture pop, un autre dans la fierté polynésienne. La jeune femme est bien décidée à conjuguer ses racines et ses rêves sur le devant de la scène. « Je veux montrer aux filles qu’on peut rester fidèle à ce que l’on est tout en visant plus grand » résume sa philosophie de la vie.
Les frustré(e)s et les complexé(e)s doivent en baver des ronds de chapeaux
De façon très prosaïque au féminin chez des viragos au QI de moustique qui ne savent pas se mettre en valeur et jalousent celles qui ont été gâtées par une nature terriblement injuste.
Et de façon tout aussi triviale au masculin chez les délaissés qui n’auront jamais l’occasion d’intéresser des filles canon. Elles n’ont que l’embarras du choix, alors pourquoi ne pas prendre chez les mâles ce qui se fait de mieux ? J’entends encore l’interview à la radio du petit ami d’une Miss des îles. À la question « comment as-tu fait pour lui plaire ? » il répondit très honnêtement : « le plus compliqué n’a pas été de lui plaire, mais de la garder ».
Je m’en suis inspiré pour répondre à ma fille Hawaïenne qui voulait connaître mon avis sur son dernier soupirant. « Je ne me suis jamais mêlé de tes affaires de cœur, mais puisque tu me le demandes, pose-toi la question : Est-ce qu’il me mérite ? Si la réponse est oui, soyez heureux ensemble ! Mais cette réponse n’est jamais définitive. Et si un jour tu hésites, il sera temps de changer de mec ! »
Les Américains sont eux aussi amateurs de jolies fleurs des îles
Au concours de Miss America, créé en 1921 comme une copie de Miss France, et qui a évolué pareillement en intégrant la culture, les talents artistiques, le style de vie et la pertinence dans une conversation à bâtons rompus, seules deux Hawaïennes ont été couronnées en 1992 et 2001. Par contre, Miss USA créé en 1952 a fait nettement mieux avec cinq reines de beauté insulaires en 1962, 1972, 1978, 1996 et 2023.
Il est à noter que Donald Trump qui sait s’entourer de femmes de valeur a nommé patronne du DNI qui coiffe tous les services secrets US l’Austronésienne Tulsi Gabbard. Originaire des Samoa, miss Honolulu puis députée du cinquantième État, héritière des reines guerrières du Pacifique, elle a servi en Irak en qualité de lieutenant colonel. Les sénateurs Démocrates pourtant adeptes de la diversité n’ont pas accordé une seule voix à Tulsi pour entériner sa nomination. Victoire par 52/48.
Et pour finir, un spectacle charmant inspiré des traditions immémoriales qui ont convaincu les colonisateurs de se laisser conquérir et de ne plus repartir.
https://www.youtube.com/watch?v=0qwbVwePDWA
Christian Navis
