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culture et histoire - Page 1028

  • Nos ancêtres les Gaulois ?

    L’expression « nos ancêtres les Gaulois » décrit-elle une réalité, ou bien est-elle une simple façon de parler, un slogan, à la manière du « Madame Bovary, c’est moi » de Flaubert, ou du « Ich bin ein Berliner » du président Kennedy ?

    Quand on lui demandait à quoi ressemblait un Gaulois, Braudel répondait : « Regardez-moi. » Cette réponse suggère que les invasions ultérieures, jusqu’à nos jours, n’ont pas entraîné de substitution de population depuis que les Celtes sont arrivés des montagnes d’Europe centrale à partir du VIIIe siècle avant notre ère, apportant l’usage du fer. Mais si les Celtes ont subjugué les habitant du pays qui devait devenir la Gaule, ils ne les ont pas remplacés. À quoi ressemblait l’homme de Cro-Magnon ? À cette question, on peut aussi répondre : « Regardez-moi ! » Cette observation souligne l’ambiguïté de cette quête des origines : sommes-nous d’abord les descendants d’une ethnie, ou les héritiers d’une civilisation ?

    Or, de la civilisation celtique, nous n’avons à peu près rien retenu. Le vocabulaire français n’en contient que quelques mots, dont le sens est souvent incertain. On a beau attribuer aux Gaulois le goût du bien boire, du bien manger et de la bonne querelle, il faut avouer que ce sont des usages fort répandus de par le monde. On nous dit qu’ils fabriquaient des tonneaux et se servaient de savon. C’est sympathique, mais un peu léger pour établir une filiation avec les mœurs des Français d’aujourd’hui. Rares sont ceux qui grimpent sur les dolmens, une torche à la main, ou profitent de la pleine lune pour cueillir du gui dans les arbres.

    Il faut ajouter que les Celtes se répandirent largement ailleurs qu’en Gaule : leur langue existe encore en Bretagne, mais aussi en Irlande et au pays de Galles. Ils ont donné leur nom à la Galice en Espagne, à la Galicie en Pologne, à la Galatie en Asie mineure. Et à la Gaule, bien entendu. Celle-ci était celte tout entière, mais n’avait pas, tant s’en faut, le monopole de la celtitude.

    Il faut enfin noter que c’est la version latine du nom de la Gaule qui a survécu, et non sa version celte. C’est logique : nous ne connaissons guère les Gaulois que par les Romains. Et c’est en devenant province romaine que la Gaule s’est séparée du reste du monde celtique. La langue des Gaulois a disparu, y compris, ce qui est le plus frappant, les noms propres, qu’il s’agisse des noms de personne ou des noms de lieu. Leurs descendants portent des prénoms bibliques, germaniques ou gréco-latins – le tout fondu dans le calendrier chrétien. Depuis des siècles, on s’appelle Jean ou Marie, Charles ou Berthe, Hercule ou Apolline. Mais jamais Ambiorix ou Vercingétorix.

    Les Gaulois sont donc bel et bien nos pères. Mais il faut avouer que nous avons été de mauvais fils.

    Les chroniques de Pierre de Laubier sur l’« Abominable histoire de France n° 1 » sont diffusées chaque semaine dans l’émission « Synthèse » sur Radio Libertés.

    http://eurolibertes.com/histoire/nos-ancetres-gaulois/

  • Une universitaire démonte la Légende noire de l'Inquisition en Espagne

    Maria Elvira Roca Barea, issue d’une famille républicaine et franc-maçonne, s’affirme non croyante. Cette universitaire a travaillé depuis de longues années sur toutes les accusations lancées contre l’Eglise catholique, sur son rôle en Espagne, et sur l’Inquisition. Elle vient de publier un livre sous le titre Imperiofobia y leyenda negra, « Empirophobie et légende noire ».

    6a00d83451619c69e201b8d270c1f8970c-250wi.jpgPremière légende : l’idée que la Réforme aurait fait de la religion une affaire privée en même temps que la Contre-Réforme aurait permis à la religion de conserver son rôle social.

    « Il n’y a rien de plus faux que cette affirmation. C’est précisément l’inverse. Quel est le pays d’Europe occidentale qui a aujourd’hui comme chef d’Etat le chef de l’Eglise ? La Grande-Bretagne. Dans quel pays a-t-il été impossible jusqu’à il y a peu d’occuper une charge publique sans appartenir à la religion nationale ? En Grande-Bretagne et dans d’autres pays protestants. Cela veut dire que le protestantisme s’est constitué en Eglises nationales et que de ce fait la dissidence religieuse s’est transformée, non en délit religieux mais en délit contre la nation, contre l’Etat. Il en a été ainsi au Danemark et dans les Etats luthériens du Saint Empire germanique. (…) C’est précisément dans le monde catholique que le délit religieux continue d’être religieux et n’est pas considéré comme portante atteinte à l’Etat ».

    C’est ce qui a notamment justifié le maintien d’une loi contre le « blasphème » au Royaume-Uni jusqu’en 1976. 

    « L’Inquisition a existé, évidemment qu’elle a existé, mais c’était une institution de petite envergure, qui n’a jamais eu les moyens d’influencer de manière décisive la vie des pays catholiques ».

    Elle donne l’exemple du roman Lazarillo de Tormes, condamné par l’Inquisition mais qu’on pouvait acheter partout et qui 20 ans après sa parution, était étudié dans toutes les universités espagnoles.

    « L’Inquisition était une institution très bien organisée, bien mieux réglementée que n’importe quel autre institution de son temps, et où la religion continuait d’être affaire de religion et non de l’Etat. On s’occupait des délits qui sont au encore aujourd’hui des délits, tels les délits contre l’honnêteté : le proxénétisme, la pédérastie, la traite des Blanches, le faux-monnayage, la falsification de documents… elle avait un champ d’action très large. Le fait de se constituer de manière très organisée, réglementée et stable sur le plan judiciaire pour traiter des dissidences religieuses, a évité les massacres que celles-ci ont provoqués du côté protestant. Nous connaissons toutes et chacune des sentences de mort qui y furent prononcées. Elles sont très bien documentées dans une étude du Pr Contreras et du Danois Henningsen. L’Inquisition a jugé 44.000 causes au total depuis 1562 jusqu’à 1700, avec au final 1.340 morts environ. Et voilà toute l’histoire. Calvin a envoyé au bûcher 500 personnes en vingt ans seulement, pour hérésie. Quand on s’intéresse aux faits barbares qui se sont produits côté protestant, il n’y a pas de comparaison, entre autres choses parce que le calcul des morts qu’a pu provoquer l’intolérance protestante ne peut se faire que de manière approximative, puisque dans la plupart des cas, il n’y eut ni jugement, ni avocat, ni droit de la défense : ce fut par le procédé barbare du lynchage, rien de plus. Cela ne s’est jamais produit dans les zones catholiques, jamais ».

    « Ce qu’il faut voir, c’est comment été gérée cette intolérance religieuse dans les différents endroits. Elle fut beaucoup plus civilisée est beaucoup plus compréhensive dans la partie catholique, et donc en Espagne. En Angleterre, ainsi que dans les principautés luthériennes protestantes au nord de l’Europe, les persécutions à l’encontre de la population furent atroces. Il y eut aussi tout le phénomène de la chasse aux sorcières, absolument démentiel, qui a provoqué des milliers de morts. Cela ne s’est pas produit dans le monde catholique et cela ne s’est pas produit en Espagne parce qu’il y avait d’Inquisition qui a évité cette barbarie ».

    « Il nous est resté cette idée que Martin Luther n’avait pas d’autre choix que de rompre avec l’Eglise parce que l’Eglise était intolérante. Non, c’étaient eux, les intolérants. Les princes protestants ont imposé des conversions forcées. S’ils ne te tuaient pas, ils te confisquaient tes biens. Si tu ne partais pas, tu devais te convertir. Les catholiques ne toléraient-ils pas les protestants ? Sans doute, mais les protestants toléraient encore moins les catholiques ».

    par Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2017/03/une-universitaire-d%C3%A9monte-la-l%C3%A9gende-noire-de-linquisition-en-espagne.html

  • Le numéro 45 de Synthèse nationale est sorti

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  • Sortie du nouveau numéro d'Eléments

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    Au sommaire du N°165 d'Eléments

    Entretien exclusif avec l'auteur de La France périphérique
    Christophe Guilluy : « La diabolisation du FN est un révélateur de classe sociale »

    Dossier : Le parti des médias en accusation
    • La chute de l’empire médiatique
    • Entretien avec Ingrid Riocreux : le journalisme décodé
    • Toute la vérité sur la « post-vérité »
    • Le nouvel Index : du Decodex à Desintox
    • Travail, famille, paillettes
    • Rencontre avec Robert Ménard
    • Entretien avec Claude Chollet
    • Nos chers, très chers médias

    Et aussi...
    • Les catholiques face à la question identitaire, par Alain de Benoist
    • Présence de Dominique de Roux : les souvenirs de Jacqueline de Roux
    • Les Mémoires de Michel Marmin
    • La tentation populiste
    • Antigone, la tragédie des tragédies
    • David Bowie, le caméléon de la pop
    • Houellebecq, le Père Ubu à l’hypermarché
    • Walter Benjamin, révolutionnaire conservateur, etc.

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  • La destruction des livres sous la Révolution française.

    Je prépare actuellement une nouvelle série de cours sur la Révolution française pour mes classes de Seconde mais sous des angles différents de ceux qui sont généralement abordés par l’Éducation nationale : sous l'angle social, sous l'angle environnemental, sous l'angle « sociétal » et familial, sous l'angle patrimonial, entre autres. Ainsi, je m'intéresse en ce moment au sort des livres et des bibliothèques, thème assez méconnu et pourtant très révélateur, non seulement des excès, mais de la nature même de la Révolution. 

    Dans son ouvrage « Livres en feu », Lucien X. Polastron signale que « le déclenchement de l'hécatombe de livres remonte au 2 novembre 1789, lorsque toutes les possessions ecclésiastiques et religieuses passent « sous la main de la Nation », laquelle a un vrai besoin de se renflouer sans les moyens structurels d'organiser la spoliation. Pour les terrains, les immeubles et les ciboires incrustés de rubis, l'affaire est simple et la capital quantifiable. Mais les bibliothèques ? (…) Qu'est-ce donc ? Pour la nation un poids mort indéchiffrable, pour les fonctionnaires une directive empoisonnée, mais avant tout le symbole de la tyrannie aux yeux des agités. » Il est tout de même étonnant que les intellectuels qui se targuent continuellement de prôner la liberté d'expression la plus large ne s'émeuvent pas de cette « biblioclastie » qui a ravagé notre pays et livré aux flammes et aux artificiers fabricants de balles des millions d'incunables, de manuscrits anciens et enluminurés, de livres reliés et des collections de correspondances diplomatiques ou philosophiques...

    Les pertes furent immenses et une partie de l'héritage livresque et intellectuel du Moyen âge et de la Renaissance, mais aussi du temps des Lumières en France, fut irrémédiablement perdu alors. Malgré les appels de l'abbé Grégoire à préserver ce capital, le pillage, la dispersion et la destruction continuèrent, « la Révolution hésite entre vengeance et « régénération ». A un Boissy d'Anglas, qui dit dans Quelques idées sur les arts : les Français, « il ne s'agit donc pas de leur enseigner à se passer [se priver], mais à jouir », répond un Urbain Domergue, puriste d'Aubagne propulsé chef de la Bibliographie : « Portons le scalpel dans nos vastes dépôts de livres et coupons tous les membres gangrenés du corps bibliographique. » Cet ardent visionnaire ne propose pas de brûler les ouvrages mais de les envoyer se faire acheter par les ennemis du pays pour causer chez eux « le vertige et le délire ». » Cela explique que certains ouvrages publiés en France avant la Révolution se retrouvent aujourd'hui en Russie ou en Angleterre, et qu'une partie importante de ce patrimoine sauvé des flammes et de la bêtise républicaine continue sa vie loin de la métropole et de ses lecteurs...

    Nombre de livres finiront en charpie pour... faire la guerre : « Non, la République de ces quelques années n'avait nul besoin de savants. En revanche, il lui fallait des livres, de plus en plus : la guerre contre l'Europe consomme des quantités industrielles de gargousses et la pénurie de papier est chronique. On tire donc du dépôt des Cordeliers 15 000 in-folio en l'an VI et VII, car les grands formats sont préférés des artificiers. » Il est difficile après cela d'évoquer la Révolution comme une période culturellement heureuse et libre : si la destruction n'empêche pas la production, nombre d’œuvres nées de ces années-là n'en finissent pas moins aussi au feu car ne convenant pas aux maîtres du jour, et leurs auteurs sous l'acier de la guillotine...

    Et aujourd'hui ? En fait, nos sociétés sont-elles moins destructrices ? Il est permis d'en douter quelque peu au regard des « désherbages » souvent anarchiques des bibliothèques et des CDI français, sans négliger ceux qui ont des motivations plus explicites, au nom d'un « politiquement correct » de mauvais aloi quand il s'agit de littérature et d'idées : j'avais, il y a une vingtaine d'années, dénoncé (comme d'autres) l'épuration d'une bibliothèque de lycée accomplie par une documentaliste visiblement politisée qui avait mis au rebut quelques dizaines de livres qui n'avaient pas eu l'heur de lui plaire, y compris un ouvrage de Soljenitsyne... Mais, sans doute, n'était-ce là que la partie émergée de l'iceberg, et il est difficile de trouver un écrit de Jacques Bainville ou de Reynald Secher dans les universités et établissements scolaires, sauf rares exceptions : cette terrible sélection « éducative », qui écarte tant d'auteurs considérés comme « mal-pensants », est aussi un moyen de cantonner la réflexion à un cadre qui, s'il convient à l’Éducation nationale, n'est guère satisfaisant pour l'intelligence et le libre débat intellectuel et historique.

    Faut-il, pour autant, désespérer ? En fait, malgré la tendance actuelle à la dématérialisation et l'apparent désintérêt des jeunes générations pour le livre papier, ce dernier ne disparaît pas et, il faut le souhaiter, ne disparaîtra pas parce qu'il reste et restera, pour nombre de nos contemporains et de ceux à venir, ce nécessaire écrin de feuilles qu'il est possible de tourner pour découvrir de nouvelles sensations, de nouveaux champs de réflexion, et d'imaginer, à l'autre bout du monde, parfois dans une autre langue, lu par d'autres lecteurs. C'est aussi un petit carré de résistance, que l'on se passe parfois sous le manteau, et dont quelques pages permettent l'évasion intellectuelle qui favorise l'action, y compris politique. Bien sûr, les livres peuvent aussi receler des fruits empoisonnés, et provoquer des désastres : mais leur absence serait bien plus grave encore, car elle signifierait la fin d'une transmission des savoirs et des polémiques à travers les âges et les générations, et l'asséchement des esprits et des âmes...

    Jean-Philippe Chauvin

    http://nouvelle-chouannerie.com/

  • De quelle Égalité la République parle-t-elle ?

    Nous savons désormais que la Liberté est une conquête de tous les instants pour se libérer de l'Oppression et de toutes les contraintes consubstantielles à l'ordre social et moral né de l'Ancien Régime et du capitalisme. Qui dit oppression dit oppresseurs, ce pourquoi l'appétit de Liberté ne peut s'exprimer qu'à travers une lutte contre l'iniquité humaine supposée incarner le Mal, entité hybride semi-métaphysique, semi-éthologique. Iniquité non naturelle car l'homme est réputé originellement bon. Le matérialisme athée ayant chassé Dieu, ses constructions et ses mirages intellectuels ne peuvent néanmoins s'empêcher de recréer des catégories métempiriques, tel ce Mal qu’incarneraient les bénéficiaires d’un système social proprement barbare engendrant l'injustice par prédisposition ontologique. Vouloir à toute force le reconstruire, n'est-ce pas au demeurant croire en la possibilité démiurgique de changer la nature de l'homme ? Oui répondront les Révolutionnaires qui ne reculent pas devant la radicalité des moyens (la fin justifiant tous les excès), à condition de faire table rase de l'inique passé en éliminant tous les individus non réformables, préalable à la création ex nihilo de l'Homme nouveau... ce que firent sans barguigner les Conventionnels1, tout comme le fera le régime léniniste au moyen de l'exil forcé, de la déportation dans les bagnes sibériens, de la mort à grande échelle pour les récalcitrants et les non réformables.

    Il fallait éliminer les classes sociales, en réalité les classes d'âge, pouvant faire obstacle à la grande transformation, à commencer par la suppression de la propriété privée, source dé tous les maux de l'humanité comme l'a formellement identifiée l'illuminé Rousseau2, calviniste, catholique apostat et grand esprit dévoyé. Cela, un siècle avant Marx, cet autre archiprêtre de la caste sacerdotale prophétisant le paradis terrestre après l'éradication des classes sociales possédantes et de l'expression de toute foi transcendante. Si donc, à gauche, la liberté se conquiert contre l'Autre, à droite, elle se gagne sur soi-même, par le dépassement et la pleine assumation de ses choix. En ce sens la liberté ne saurait être que celle de l'individu ne se déchargeant pas par principe de ses erreurs sur autrui ou ne s'exonérant pas hors de propos de ses fautes en accusant le caractère pernicieux, inégalitaire et injuste d'une société inégalitaire a priori hostile aux faibles, aux pauvres et aux mal-nés, système qu'il faudrait renverser par la force ou changer de fond en comble par la ruse la corrosion réformistes.

    L'Égalité, après la Liberté, est le second concept superstructurant (au sens que donnait Karl Marx au mot superstructure) de la dogmatique bétonnée régissant la pensée de gauche. Partant d'une notion nimbée de bonnes intentions, l'on arrivera très vite, à bride abattue, au bout d'une route débouchant sur les champs désolés de la géhenne terrestre et des Grands cimetières sous la Lune3 Un grand maître es littératures, le Finnois Mika Waltari, a fort bien décrit cette dérive dans son œuvre romanesque Sinouhé l'Égyptien (1945) relatant le règne chaotique de l'hérésiarque Akhénaton (1355/1338). Celui-ci ayant voulu instaurer - avec la dévotion d'Aton, « père et mère de toute création »4, la domination du Bien, ce beau projet se traduisit par l'égalité des créatures dans la misère... sous le soleil de Satan. L'entreprise se soldera en effet par la ruine du royaume, les épidémies et la guerre. L'empire du Bien imposé à coups de décrets est à coup sûr celui de la désolation car « qui veut faire l'ange, fait la bête » [Biaise Pascal, Pensées, œuvre posthume 1670].

    L'Égalité, second concept superstructural

    De l'exigence d'Égalité découle actuellement la quasi-totalité de nos grandes orientations politiques sans que quiconque comprenne de quoi il retourne exactement. Un vœu pieux ne saurait en effet constituer la charpente d'une philosophie politique, s'agissant surtout, admettons-le, d'un mot fétiche, d'une invocation magique dont le contenu est davantage émotionnel que rationnel. De l'égalité de droit devant la loi ? Oui da ! Le principe d'égalité ouvre naturellement le droit à un traitement équivalent pour tous devant les cours de justice, ou encore s'exprime à travers le suffrage universel. À la rigueur l'on peut s'efforcer de créer les conditions d'un accès égal à la culture et au savoir, ce qui ne veut pas dire que la culture et la connaissance soient à l'arrivée uniformément partagées entre tous. Au contraire même parce que ce sont des domaines où s'expriment les disparités les plus extrêmes entre les individus en fonction de leurs aptitudes ou de l'absence d'icelles.

    Maintenant, que veut dire l'égalité des citoyens devant l'impôt ? Hormis une déclaration purement verbale, nous nous trouvons confrontés à une quadrature du cercle, car comment concilier égalité et justice ? Et dans ce cas précis où se situerait précisément la justice ? Idem pour l'emploi, domaine où l'égalité ne peut être qu'une vue de l'esprit. Ou bien l'équivalence homme/femme, laquelle supposerait au préalable l'égalité entre les individus, ceci indépendamment de leur sexe. De sorte que l'on peut s'interroger sur l'irrationalisme presque morbide qui baigne et imprègne nos sociétés en mal d'une égalité aussi chimérique qu'introuvable, mais que s'acharnent à vouloir établir des classes dirigeantes démagogiques et intellectuellement dévergondées. D'où l'urgente nécessité de procéder à une révision conceptuelle draconienne et à un grand récurage épistémologique.

    Un irréductible inégalitarisme inhérent à la nature des choses

    En matière de procédure judiciaire, l'égalité, ou ce qui s'en approche le plus, semble être une équité élémentaire. À savoir être puni à l'identique pour une même faute ou justement dédommagé pour tel ou tel préjudice, tout comme être rétribué pareillement pour une tâche analogue dans l'unité, de temps et de lieu géographique. En dehors de ces domaines qu'en est-il ? La nature dote très inégalement les individus. Elle est à cet égard atrocement inégalitaire, chacun devant faire avec ce qui lui est attribué par une impitoyable loterie génétique... ou pire, eu égard à ce que le sort lui réserve. Certains font immensément avec très peu d'atouts, d'autres généreusement nantis n'en font rien. Mais ces vérités élémentaires, aveuglantes, échappent aux théologies égalitaristes. Billevesées qui ne sont au fond que des moyens de sidération pour régenter les peuples en les asservissant aux mirages d'un monde idéal, sans haut ni bas, ni beau ni laid, ni forts ni faibles, ni pauvres ni riches.

    Égalité, morne plaine ! Vitupérer son voisin ou ses semblables parce qu'il semble plus heureux ou parce que l'on n'est soi-même de peu de prestance, ni séduisant, ni clairvoyant, ni subtil, n'a pas de sens. Mais l'envie et la jalousie étant des passions incrustées au cœur de l'homme, l'égalité apparaît sous son vrai jour celui d'une religion de la convoitise et du ressentiment (bien entendu, nous ne parlons pas des injustices criantes que tout pouvoir digne de ce nom a le devoir de corriger autant que faire se peut). Les hommes se porteraient mieux s'ils renonçaient à regarder dans l'assiette du voisin, à convoiter sa maison, sa compagne et ses biens. Au reste, l'on peut toujours tenter d'améliorer individuellement, par de bonnes et judicieuses actions, les qualités héritées de nos ancêtres sachant qu'à notre tour nous sommes responsables et serons comptables de l'héritage phylogénétique que nos léguerons à nos descendants. Nous ne leurs transmettrons en effet pas seulement un patrimoine physique mais également moral et spirituel inscrit dans nos gènes.

    À horizon visible, l'on ne parviendra pas, quels que soient les bonds effectués par les sorciers du transhumanisme ou les progrès des sciences cognitives et ceux de la didactique, à faire un génie d'un minus habens. S'il suffisait d'un bon terreau sociologique et de bons précepteurs pour faire des Mozart à la pelle, cela se saurait. Curieusement, personne ne s'interroge officiellement et sérieusement sur l'actuel effondrement d'un système d'enseignement qui s'épuise à vouloir, nier les différentiels culturels et ethniques et plus encore le rôle des prédispositions ataviques. Dans l'actuel système éducatif mieux vaut être un sous-doué qu'un enfant précoce.

    Nous savons bien que la négation du réel est à la base de toutes les utopies... meurtrières par essence. À commencer par l'illusion consistant à croire possible la transmission sans heurt de savoirs d'autant plus complexes qu'ils sont étrangers à la culture originelle de populations ne possédant pas le bagage héréditaire adéquat5 La clef n'est pas adaptée à la serrure. La réussite de quelques-uns n'infirme d'ailleurs pas ce constat et, pour être tout à fait pessimiste, encore faudrait-il examiner les limites de ces réussites et leur portée dans le temps. Ne confondons jamais l'exception et la règle. Ceux qui tentent de contourner les lois inflexibles de l'hérédité et veulent ignorer les restrictions imposées aux capacités d'acquisition par les prédispositions innées, cela en misant sur la plasticité du cerveau humain, se condamnent à l'échec. Non, l'humain ne se réduit pas à une construction culturelle, un jeu de l’ego dont il suffirait de déplacer les éléments pour en changer la nature réelle. À terme, les animaux d'élevage et les plantes forcés, quelles que soient les performances atteintes, sont généralement voués à la dégénérescence, voire à la stérilité.

    Négationnisme

    Le progressiste ignore ou veut ignorer les lois de la physique. Il se déclare convaincu que la plasticité adaptative des hominidés est sans limites. Sans doute pour certaines aptitudes basiques, toutefois ces comportements primaires (la virtuosité du livreur de pizzas !) ne sont pas ceux, aussi utiles soient-ils, sur lesquels s'édifient les étages supérieurs de la civilisation. En ce qui concerne la pensée spéculative, nous sommes loin de la coupe aux lèvres. Or, la superstition du progrès ne devrait pas rendre aveugle au point d'ignorer la forte capacité des hommes à "involuer", à régresser collectivement dans la barbarie (les guerres civiles en témoignent), voire à s'abâtardir en l'espace de quelques générations et sans retour possible. Pensons aux « petits Blancs » des flancs du volcan de la Soufrière sur l'île de la Réunion. Certains "progrès" (telle, par exemple, la diffusion dans les programmes d'enseignement public des préadolescents d'une sexualité prématurée) apparaissent comme autant de facteurs déstructurants de la personnalité et de la construction affective. Pseudo-avancées qu'il faudrait dénoncer plus comme des facteurs de décadence et de barbarie morales d'amélioration du genre humain.

    À vouloir faire entrer tout le monde dans le même moule, à nous voir tous égaux, l'on en arrive très vite à enfoncer des chevilles rondes dans des trous carrés à coups de marteau juridique.. Et puisqu'égalité il y a, par définition pour les sectaires impénitents, les irréductibles différences entre les sociétés ou les individus ne sauraient venir, non de la nécessaire nature des choses, mais exclusivement de causes extérieures contingentes et révocables.. Autant d'excuses à l'impuissance que l'on ira puiser dans le vivier des causes environnementales, géographiques ou sociales et, in fine, dans la vilenie des classes dominantes. Si certains peuples ou ethnies sont à la remorque de la modernité, une seule cause le colonialisme, les croisades, l'homme blanc, le capitalisme occidental, le racisme, et cœtera. Parce qu'il ne viendrait à l'idée de personne qu'il puisse exister réellement une hiérarchie (naturelle) entre les hommes et de très notables différences entre les sociétés.

    L'homme de droite serait en conséquence celui qui nierait le rôle surdéterminant de l'environnement dans la création et le maintien d'inégalités entre les individus et les communautés humaines, cela afin de justifier des avantages et privilèges produits par des règles injustes. Maintenant nous ne débattrons pas plus avant du juste et de l'injuste. Le sort qui nous est réservé n'est certes pas toujours équitable et le mérite rarement récompensé à sa juste valeur. Faut-il pour autant aller piller le verger du voisin parce que l'ensoleillement y est meilleur et que ce damné propriétaire jouit d'une rente favorable de situation ?

    Étrange raisonnement qui pour mettre fin à l'injustice - c'est-à-dire à la météorologie infiniment complexe des relations, des interactions et des hasards, ce que l'on nomme ordinairement sort ou fortune juge impératif d'accorder à tous dès le berceau et par décret le droit au bonheur (ou approchant), dans le Meilleur des mondes possibles. Un droit automatique, sans effort personnel, sans lutte, sans effort et sans contrepartie. Quel sera alors le moteur de l'histoire ? Arriverons-nous à cette société hédonique des Éloïs androgynes que décrit HG Wells dans La Machine à explorer le temps (1895) ? Avec en arrière-plan des Morlocks anthropophages venant chercher leur ration quotidienne de chair humaine dans le garde-manger que constituent les béats transgenres, descendants dégénérés de nos actuels "bobos" et pour lesquels l'histoire s'est arrêtée une fois pour toutes ? (A suivre...)

    Léon CAMUS. Rivarol du 16 mars 2017

    1) Saint-Just, l'ami intime de Robespierre, l'un des plus forcenés Procuste de la Convention, lançait depuis la tribune, le 26 février 1794 : « Ce qui constitue une République, c'est la destruction totale de ce qui lui est opposé... Le sang est le lait de la liberté naissante [car] la liberté n'a pour lit que des matelas de cadavres »... joignant l'acte à la parole.

    2) Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, 1755. Ouvrage dans lequel la propriété privée est donnée pour être la source de toutes les inégalités. Voltaire, dans une lettre datée du 30 août 1755, commente ainsi l'opus : « J'ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain [...] On n'a jamais employé tant d'esprit à vouloir nous rendre bêtes, il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. »

    3) Georges Bernanos, 1938. Auquel fait écho L'Hommage à la Catalogne (1938) de George Orwell « La tragédie espagnole, préfiguration de la tragédie universelle, fait éclater à l'évidence la misérable condition de l'homme de bonne volonté dans la société moderne qui l'élimine peu à peu, ainsi qu'un sous-produit inutilisable ». Remplacez Syrie par Espagne et vous serez au fait de la précipitation torrentielle des événements en cours.

    4) Sigmund Freud in « Moïse et le monothéisme » (1939) crut voir l'origine du judaïsme dans le culte d'Aton. Il n'est pas tout à fait abusif de résumer le culte d'Aton par la formule de Pétrone Sol lucet omnibus, soit « le Soleil luit pour tous ».

    5) À la fin du XIXe siècle, la question de la transmission culturelle se pose avec acuité à ceux qui entendent transmettre les « lumières de la civilisation » aux peuplades de notre nouvel empire colonial. Certains pensent que l'éducabilité est une chimère, ce que tendrait à montrer aujourd'hui le laboratoire de nos banlieues. Léopold de Saussure [Psychologie de la colonisation française dans ses rapports avec les sociétés indigènes, Paris, 1899] à la suite de Gustave Le Bon, pose que les caractères mentaux sont héréditaires et invariants. Le Bon postule en effet que la distance séparant la civilisation des « races inférieures » « est trop immense » pour que soit transplanté un système culturel étranger « aux mœurs, croyances, constitutions mentales et institutions des Européens. » Cf. Congrès colonial international de Paris, 1889. Éditeur Augustin Challamel 1890 p. 67]. Car l'abîme héréditaire entre ces deux "classes" de peuples serait a priori infranchissable [Ibid. p.70]... « Abusé par ses dogmes, réfractaire à l'idée de la race, le Français est persuadé que les espèces humaines ne diffèrent entre elles que par l'éducation. Les profondes divergences mentales qui séparent les races lui apparaissent comme superficielles il croit pouvoir en venir à bout facilement et il s'acharne à une lutte stérile contre les lois de l'hérédité » [Ibid. p.10].