culture et histoire - Page 1386
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Libertés N°30 - A nos frères d'Alliance
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Qu’est ce que la Révolution Conservatrice ?
Les décès au début des années 2000 du germaniste français Louis Dupeux et de l’historien suisse Armin Mohler[1] nous donne l’occasion de revenir sur la « Révolution Conservatrice » allemande dont ils s’étaient faits les spécialistes et qui reste mal connue. Pourtant, Louis Dupeux anima à ce sujet durant une vingtaine d’années, au sein de l’université de Strasbourg, le Groupe d’étude de la « Révolution Conservatrice » allemande dont les travaux furent publiés dans la Revue d’Allemagne. Le précurseur de ces études fut Edmond Vermeil qui, en 1938, publia les Doctrinaires de la révolution allemande 1918-1938[2]. En France, la « Révolution Conservatrice » fut surtout étudiée, à partir de la fin des années 1960 par les milieux nationalistes-révolutionnaires[3] et puis dans les années 1980 par la Nouvelle Droite et, en particulier, par Alain de Benoist[4].
En effet, les membres de celle-ci ont publié un grand nombre de monographies, articles, études, etc. sur ce sujet. La Nouvelle Droite découvre (ou redécouvre) à cette époque la « Révolution Conservatrice », qui deviendra l’une de ses références importantes. Cette filiation est d’ailleurs ouvertement revendiquée à travers le recours à Ernst Jünger, Oswald Spengler, Carl Schmitt.
Les origines de la Révolution Conservatrice
La « Révolution Conservatrice » est un courant de pensée, avant tout culturel, qui s’est développé en Allemagne après 1918 en opposition à la République de Weimar et qui se caractérisait par un refus de la démocratie et du parlementarisme. Leur Weltanschauung, leur « vision du monde », révolutionnaire-conservatrice se réclamait de l’idéalisme, du spiritualisme voire du vitalisme, et se proposait de reconstituer une société sur la base de communautés naturelles structurées et hiérarchisées, menées par une nouvelle aristocratie du mérite et de l’action.
Les auteurs de ce courant de pensée ont médité sur les grandes questions qui agitaient leur temps : la technique, l’État, la ville, l’identité, la guerre, la crise religieuse, le marxisme et le libéralisme, la justice sociale, la question nationale et l’édification européenne, etc. Mouvement intellectuel, la Révolution Conservatrice renvoyait l’image d’une « droite » n’étant ni libérale, ni nazie et très modérément chrétienne. En effet, la Révolution Conservatrice fut aussi une expérience existentielle d’une grande richesse avec ses mouvements de jeunesse, ses organisations paysannes, ses “sociétés d’hommes” et ses cercles religieux.
Les racines de la Révolution Conservatrice plongent dans le romantisme, en réaction contre le processus de « modernisation » déclenché par les Lumières et la révolution industrielle. Le romantisme politique qui en découle se caractérisait, sommairement, à la fin du XIXe siècle, par le refus du rationalisme, de l’industrialisation, de l’urbanisation, du libéralisme ainsi que des valeurs conservatrices traditionnelles, dont le christianisme, au profit d’une vision mythifiée d’une société organique.
Leur Weltanschauung se fondait sur une vision pessimiste et cyclique de l’Histoire, influencé par la philosophie de Nietzsche. Elle se caractérisait aussi par un pessimisme culturel (le Kulturpessimismus). Le plus connu des précurseurs de ce pessimisme culturel fut Paul de Lagarde (Paul Anton Bötticher 1827-1891) qui contribua à « créer l’idéalisme de l’anti-modernité »[5]. Pour Lagarde, la modernité était le facteur de la décadence de l’Allemagne. Les idéaux de Paul de Lagarde furent vulgarisés par la revue Hammer publiée depuis 1902 par le vieux théoricien raciste Theodor Fritsch (1852-1933)[6], grand admirateur du premier[7]. -
L'ombre des taliban
A lire:Ahmed RASHID : L'ombre des taliban, Editions Autrement, Paris, 2001, 19,95 Euro, ISBN 2-7467-0173-1.Ahmed Rashid est un journaliste pakistanais, correspondant de la BBC et de CNN. Il n'empêche que son ouvrage nous révèle des aspects intéressants du phénomène taliban. D'abord, Rashid croque une histoire de ce mouvement dans l'Afghanistan en proie à des dissensions civiles graves, consécutives de l'évacuation du pays par les troupes soviétiques.
Cette histoire commence en 1994 et se termine à la suite de l'intervention américaine en octobre 2001. Pour Rashid, le mouvement taliban est un défi à l'islam, car il interdit absolument toute forme de compromissions avec des idéologies musulmanes moins rigides ou, a fortiori, avec l'Occident. Mais ce mouvement a été "dopé" à l'héroïne, sans le trafic de cette substance, jamais il n'aurait tenu le coup. Rashid nous explique d'un point de vue pakistanais quels sont les nouveaux éléments dans le "Grand Jeu", montre que l'affaire des oléoducs trans-afghans a été déterminante dans l'évolution des rapports entre les Etats-Unis et les Talibans.
Dans un chapitre 15, Ahmed Rashid analyse un conflit au sein de l'Islam, entre Chiites et Sunnites, soit entre deux puissances antagonistes, l'Iran et l'Arabie Saoudite, cette dernière, plus fondamentaliste et plus rigoriste, étant un allié privilégié des Etats-Unis. L'intérêt de cet ouvrage est de montrer que drogues et pétrole sont les enjeux majeurs du conflit en cours, que les unes et l'autre vont servir à asseoir la puissance financière des Etats-Unis (comme les guerres de l'opium contre la Chine avaient permis de remplir les caisses de certaines banques londoniennes au 19ième siècle) et leur donner la maîtrise du commerce des hydrocarbures, au détriment des puissances énergétiquement faibles et pauvres, en dépit de leurs immenses potentialités industrielles et commerciales: l'Europe et le Japon. -
La piste du corporatisme.
Dans le cadre d'un prochain entretien sur le corporatisme organisé par le Cercle Henri Lagrange(du nom de ce jeune militant royaliste d'Action Française, devenu « le prince du Quartier Latin » avant d'aller mourir sur le front en 1915), je me suis plongé dans les archives de la presse royaliste « sociale » et dans la documentation, au-delà du petit monde monarchiste, sur ce qu'ont été les corporations et les idées corporatistes dans l'histoire, en France comme chez certains pays voisins : c'est à la fois passionnant et très instructif, même s'il reste encore beaucoup à étudier et à dire sur ces sujets-là, en fait peu connus du grand public mais aussi des militants monarchistes eux-mêmes.
Pourquoi ce manque d'intérêt sur le corporatisme, alors même qu'il peut apparaître, mieux qu'une « troisième voie », comme une juste voie sociale, conciliant production de richesses et protection des producteurs, en particulier des ouvriers et des paysans mais aussi des chefs d'entreprise, harmonisant le souci environnemental avec la qualité du travail et de ses fruits matériels, et évitant les pièges d'un libéralisme sans frein et ceux d'un étatisme stérilisateur ? Bien sûr, il y a l'histoire propre de la France et le sentiment que les corporations appartiennent trop à l'Ancien Régime pour pouvoir fournir une réponse aux problèmes économiques et sociaux contemporains. Mais il y a aussi, comme le fait remarquer l'économiste Alain Cotta, cette fâcheuse récupération du terme par les régimes totalitaires en Italie comme en Allemagne : pourtant, ces corporatismes d’État n'ont rien à voir avec la nature même des corporations telles qu'elles existaient en France avant 1791 et du corporatisme tel que le prônait et le définissait La Tour du Pin, véritable théoricien du monarchisme social et corporatiste au XIXème siècle, monarchisme qu'il défendit jusqu'à sa mort en 1924 sans toujours être compris de ses lecteurs comme de ses contempteurs... Pourtant, il eut quelques héritiers : il se dit parfois que le général de Gaulle lui-même y trouva quelque inspiration, désireux de ne rien céder ni au capitalisme débridé (qu'il méprisait) ni au socialisme étatique, et que son idée de la Participation n'aurait pas déplu à La Tour du Pin, associant les salariés aux bénéfices de la production des biens et des richesses.
Le Groupe d'Action Royaliste, héritier de La Tour du Pin et d'Albert de Mun.
Il faut rappeler que, aujourd'hui, le terme de corporatisme est utilisé comme un repoussoir sur le plan social comme les termes de nationalisme, protectionnisme, et, dans une certaine mesure, de socialisme auquel la Gauche de gouvernement préfère la formule de social-démocratie, voire de social-libéralisme pour les plus « progressistes ». L'actuel ministre de l'économie, M. Macron, n'a pas hésité à pourfendre, en octobre dernier, « les trois maladies de la France » qui seraient, selon lui, « la défiance, la complexité et le corporatisme » : ce à quoi le dirigeant du syndicat Force Ouvrière, Jean-Claude Mailly, a répondu, après une évocation critique du fascisme italien (d'ailleurs fort réductrice, y compris sur le plan historique), que « Quand le gouvernement veut déréglementer on cite toujours le mot de corporatisme, comme on cite le populisme, ça fait partie de la com », ce qui n'est pas faux ! Le corporatisme est souvent employé comme un « élément de langage » par les libéraux pour dénoncer les résistances, dont toutes ne sont pas illégitimes, de certaines professions ou catégories socio-professionnelles, qu'il s'agisse des notaires, des chauffeurs de taxis ou des fonctionnaires. M. Macron, nouveau Le Chapelier, veut en finir avec tout ce qui constitue un obstacle au libre marché et à la « liberté du travail », celle qui, selon le mot célèbre, se définit en une formule simple : « le renard libre dans le poulailler libre »... Maurras, quant à lui, parlait de « liberté de mourir de faim », rappelant que la liberté du travail était d'abord et avant tout celle du détenteur de capitaux avant que d'être « imposée » aux travailleurs qui n'avaient guère les moyens de la refuser, n'ayant alors aucune (ou si peu...) de protection sociale réelle depuis le décret d'Allarde de mars et la loi Le Chapelier de juin 1791.
Au moment où les Français se sentent désarmés, pour nombre d'entre eux, face à une « économie sauvage » et une mondialisation peu favorables aux droits des travailleurs et des producteurs de base, repenser le nécessaire équilibre entre les libertés économiques et les droits légitimes du monde du travail s'avère indispensable. En passer par un « corporatisme associatif » tel que le souhaitait La Tour du Pin (mais aussi Schumpeter au sortir de la guerre) ne serait sans doute ni scandaleux ni inutile, n'en déplaise à MM. Macron, Attali et autres « libéralistes » sans scrupules...
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Vae Victis "Sébastien" (hommage aux jeunes français éliminés)
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Jeudi 16 avril, conférence Dextra Versailles : Le trotskisme dégénéré.
Jeudi 16 avril, Dextra Versailles aura l'honneur de recevoir monsieur Patrick Gofman, qui nous parlera du trotskisme et de ses dérives modernes et passés. Nous vous attendons nombreux et motivés pour cette conférence passionnante à 20h au Franco Belge à Versailles. -
Toute l'histoire du Canal du Panama.
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BistroLibertes s02e06 avec Richard MILLET
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Histoire : Quand Paris brûlait…
Par Camille Pascal.Quand l’histoire officielle, tenue en lisière par l’idéologie, veut faire oublier que la Commune fut aussi un crime contre le patrimoine parisien.
La Commune de Paris née dans un sursaut patriotique fut achevée à coups de crosse par l’armée régulière quelque part dans les allées ensanglantées du Père-Lachaise. Tout cela a été dit et maintes fois répété depuis que le Front populaire a fait du mur des Fédérés un lieu de culte.
Ce que l’on sait moins, car cette vérité a été longtemps occultée dans une Histoire officielle soigneusement tenue en lisière par l’idéologie, c’est que la Commune fut aussi un crime contre Paris. Voilà ce qu’un livre courageux et parfaitement documenté vient de révéler dans un silence médiatique coupable. Nos petites élites intellectuelles confites dans leur dévotion du progressisme n’aiment pas que l’on retourne contre lui cette arme de la repentance qu’elles ont si souvent braquée contre la France.
Dans le Brasier, publié chez Actes Sud, Nicolas Chaudun, dont le talent et l’érudition ont rendu ses lettres de noblesse littéraire au récit historique depuis la publication de l’Été en enfer, chronique de l’effondrement du second Empire, raconte ces journées terribles au cours desquelles les plus grands monuments de Paris brûlèrent comme des torches sur ordre du pouvoir insurrectionnel.
En quelques heures, l’hôtel de Salm et le palais d’Orsay furent anéantis, mais ce n’était là qu’un premier feu de joie. Le palais des Tuileries, chef-d’oeuvre de Philibert Delorme, théâtre privilégié des scènes les plus poignantes de notre roman national, fut l’objet d’un zèle fou de la part des incendiaires. Du passé il fallait faire table rase. Comment expliquer autrement les flots de pétrole déversés dans les grands escaliers d’honneur, les rideaux du salon des Maréchaux empesés d’huile et de poix, les tonneaux de poudre placés dans les caves pour fragiliser l’édifice ? [...]
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via http://www.fdesouche.com/582433-histoire-quand-paris-brulait
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La spéculation, ce vice du capitalisme
Il n'avait pas été heureux parce qu'il avait tout le temps désiré plus que ce qu'il avait, parce qu'il n'avait jamais joui de rien, savouré rien, comme le laboureur qui jette un regard sur son domaine au soleil couchant, comme l'écrivain qui relit sa page et numérote la page suivante. Le gain, le gain, toujours le gain, sans l'équilibre approximatif du commerçant, qui connaît ses limites et qui sait où il va. Mais la spéculation, c'est la saute de vent imprévisible, le hasard, la chute perpendiculaire, la lutte sans merci et sans trêve. C'est la jungle avec ses fauves en veston, des êtres sans entrailles et tout en griffes préhensives, en crocs déchiqueteurs. Les fortunes s'édifiaient vertigineusement, s'écroulaient de même.
LÉON DAUDET, Ariane, 1936
Composés rapidement, en marge de l'activité débordante de leur auteur, les romans de Léon Daudet sont inégaux, mais on y glane toujours quelques remarques, quelques croquis, quelques leçons de sagesse. C'est ainsi que, relisant naguère Ariane (1936), je m'arrêtai sur les réflexions du financier Gervais au bord de la faillite, et l'actualité économique de ces derniers mois me revint à l'esprit. Le personnage central d'Ariane est un écrivain qui a fait médecine et n'exerce pas. On reconnaît l'auteur lui-même. L'évocation de la Touraine, et certaines notes sur le Japon font de ce roman un des meilleurs de Léon Daudet.
Le téléphone qu'on tire de sa poche pour interroger en quelques secondes un correspondant à Hong Kong, la cote de la Bourse d'une place internationale qui apparaît sur l'ordinateur "en temps réel", l'avion qu'on emprunte comme le métro, semblaient avoir relégué au musée les règles économiques classiques. Mais il y a un an, le krach des prêts hypothécaires à risques (subprime pour ceux qui préfèrent l'anglais, celui de Wall Street, bien sûr, pas la langue de Shakespeare) raviva le souvenir de la crise de 1929. Sans remonter au système Law (la spéculation s'appelait alors l'agiotage), il est bon de se rappeler de temps à autre les grands scandales financiers parce qu'en économie comme en politique, l'histoire enseigne la sagesse, vertu ignorée des époques ignorantes.
En composant son roman, Léon Daudet pensait à Albert Oustric, spécialiste en spéculation boursière. Il avait fondé une banque en 1919, puis multiplié les sociétés. En novembre 1929, il faisait une faillite retentissante qui éclaboussait la classe politique. À propos de l'affaire Stavisky (1933-1934), Daudet dénonça en Camille Chautemps, président du Conseil, le chef d'une bande de voleurs et d'assassins.
Stavisky et Madoff
Quelle différence entre l'affaire Stavisky et l'affaire Madoff ? Aucune d'un point de vue technique, sinon la dimension internationale de la fraude. Et voici que revient à la mode John Maynard Keynes (1883-1946), théoricien de l'encadrement du capitalisme par l'État, de la nécessité de réguler les marchés et de la primauté de l'école de la demande sur celle de l'offre. À propos de cet économiste, on se souviendra à l'Action française des thèses contraires à nos intérêts qu'il soutint dans ses Conséquences économiques de la paix (1919). Les exagérations d'un libéralisme sans frein ne nous feront pas oublier les tares du capitalisme d'État. N'est-ce pas d'ailleurs l'Administration démocrate qui obligea pour des raisons idéologiques les banques américaines à consentir des prêts immobiliers à des personnes insolvables ?
L'histoire restera notre guide, l'histoire méditée, dans la ligne de Jacques Bainville. Le concile de Latran de 1139 condamna l'usage de l'arbalète et des balistes, mais non celui de l'arc, de l'épée et de la masse d'armes. Nous voyons déjà sourire le primaire qui pense que les hommes étaient idiots avant l'invention de l'ordinateur. Mais quels arguments le concile mit-il en avant ? Que les carreaux d'arbalète et les boulets envoyés par les balistes portaient si loin que les soldats ne pouvaient maîtriser les conséquences de leurs actes. La prudence conseille de ne pas agir quand on ne dispose d'aucun moyen de maîtriser les conséquences. Comme les hommes politiques, les économistes auraient intérêt à méditer l'histoire.
GÉRARD BAUDIN L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 15 janvier au 4 février 2009