Il y avait la Droite populaire, il y a maintenant la Gauche populaire… Paradoxalement, bien qu’aux antipodes du spectre politique, ces deux structures, l’une interne à l’UMP, l’autre au PS, ont une même fonction : tenter de faire barrage au ralliement total des couches sociales les plus défavorisées au Front national.
Cela étant écrit, si le but de ces courants à prétention faussement populaire est exécrable, les analyses qu’ils portent sur leur propre famille sont souvent justifiées. De ce point de vue, force est d’admettre que celles de la Gauche populaire, dont l’encadrement est composé d’universitaires agissant dans le secteur des sciences politiques et de la sociologie, sont d’un niveau conceptuel sans commune mesure avec celles des amis de Lionnel Luca et Thierry Mariani.
Que dénonce la Gauche populaire ? Ce que l’on peut nommer la « ligne Terra Nova » (du nom du réservoir d’idée d’Olivier Ferrand récemment décédé) soit l’abandon des classes populaires comme cible électorale principale et leur remplacement par une nouvelle clientèle issue de l’addition de plusieurs cibles électorales minoritaire : la partie supérieure de la classe moyenne, les immigrés, les musulmans, les surdiplômés, les LGBT (à savoir : lesbiennes, gays, bisexuels et transexuels...), les bobos, etc. En d’autres termes, c’est la transformation de la gauche sociale en gauche sociétale.
Ce faisant, le Parti socialiste commet aux yeux de la Gauche populaire un certain nombre d’erreurs : « la préférence immigrée », c’est à dire le fait de se préoccuper du sort des immigrés plutôt que de défendre le prolétariat « petit blanc » ; le choix d’être le parti des assistés et de délaisser les couches populaires et moyennes qui travaillent, paient des impôts et ne bénéficient pas, ou très peu, de la redistribution ; l’absence de réponse convaincante apportée aux électeurs que la mondialisation, l’immigration et les transformations du mode de vie inquiètent ; la conviction qu’une partie des « couches populaires » est irrémédiablement devenue lepeniste doublée d’une « prolophobie », d’un mépris de leurs goûts culturels et d’une tendance à ne voir le peuple que comme des Grolandais .
En luttant contre ces erreurs, la Gauche populaire entend « ramener la gauche au peuple », « remettre la gauche d’aplomb, une gauche populaire devant adopter une ligne politique claire : le commun plutôt que les identités, le social avant le sociétal, l’émancipation collective plus que l’extension infinie des droits individuels ». In fine, il s’agit bien évidemment de ramener dans le giron de la gauche un électorat populaire passé au Front national ou ayant choisi l’abstention.
Mais, en définitive, la Gauche populaire pourrait bien n’être qu’un réservoir d’idée totalement inutile, voire contre-productif, et ses propositions relever de ce fait du vœux pieu. En effet, la « ligne Terra nova » est opérante et fertile en nombre de suffrages, de surcroît elle est en phase avec la composition sociologique de l’appareil socialiste. Alors, pour quelle raison le PS devrait-il renoncer à caresser dans le sens du poil un électorat qui lui est acquis (minorités sociétales, immigrés ayant le droit de vote, fonctionnaires moyens et supérieurs, bobos, etc.) pour retourner au peuple ? Il n’y en a aucune… Cela explique les attaques très vives que subit depuis sa création la Gauche populaire dénoncée comme étant d’inspiration « rose-brune », ayant un «surmoi lepéniste» et « reprenant à son compte les idées de la droite la plus extrême »… À moyen ou court terme, il ne serait donc pas outre mesure surprenant que ses animateurs se taisent, se rallient aux positions dominantes ou soient mis à la porte du Parti socialiste.
Documents annexes
Quand un journaliste du Nouvel Obs est lucide sur l’immigration
Journaliste au Nouvel Observateur et référence des animateurs de la Gauche populaire, Hervé Algalarrondo est incontestablement … de gauche !
Cela donne une saveur toute particulière à ses analyses sur l’immigration publiées il y a un an aux Éditions Plon sous le titre fort réaliste : La Gauche et la préférence immigrée.
Ainsi il n’hésite pas à y écrire en toutes lettres : « L’immigration à gogo, c’est un credo de bobos ».
Et comment ne pas partager les détails de son analyse ? Comment ne pas être d’accord avec lui quand il écrit qu’« admettre toujours plus d’étrangers, sans réel contrôle, est irresponsable » ? Car, explique-t-il : si « les nouveaux arrivants trouvent un travail, parfois très pénible, (...) c’est souvent au détriment de postulants hexagonaux sans formation particulière » . Ainsi, nous dit-il : « réclamer la régularisation de tous les sans-papiers est un mot d’ordre anti-ouvriers ». Et de souligner que les meilleurs partisans de l’ouverture des frontières sont ceux qui ont les postes les plus à l’abri de la concurrence des immigrés car il « exercent souvent des métiers – fonctionnaires, médecins, avocats – qui sont loin d’être complètement ouverts. Ils sont protégés de la concurrence étrangère » et vivent dans des quartiers où le prix de l’immobilier les ferme à toute population immigrée.
Si l’on ajoute à cela qu’Algalarrondo insiste sur le fait que le meilleur supporter de l’ouverture des frontières est le MEDEF ravi d’avoir à disposition une main d’œuvre moins chère et non syndiquée, et qu’il souligne qu’il est risible de voir la gauche partager les même vues que le grand patronat, on ne peut qu’en tirer une conclusion : comment l’auteur de La Gauche et la préférence immigrée, à moins qu’il ne soit éminemment masochiste, fait-il pour continuer de militer … à gauche ?.
Les bobos de gauche tirent profit de l’immigration
Dans son livre Fractures françaises, paru il y a peu aux éditions François Bourin, le géographe Christophe Guilluy, un des inspirateurs de la Gauche populaire fait une analyse percutante de la raison pour laquelle les bobos sont favorables à l’immigration : tout simplement parce qu’ils y trouve un intérêt financier immédiat !
En effet, la main-d’œuvre immigrée, surtout quand elle est illégale et de ce fait extrêmement mal rémunérée, répond fort bien aux besoins de certains secteurs économiques.
On a l’habitude de relever, avec raison, que l’immigration présente un intérêt évident pour le patronat (dumping social, pression à la baisse des salaires, affaissement de la protection sociale), mais ce n’est pas tout. Tout l’intérêt de l’analyse de Christophe Guilluy est de souligner un autre aspect, totalement méconnu, de cette immigration : elle permet d’offrir un train de vie « bourgeois » aux nouvelles couches supérieures sans en payer véritablement le prix. C’est ainsi que la nounou et la femme de ménage immigrées ne ponctionnent que marginalement le budget des cadres. De la même manière, c’est bien grâce à l’exploitation en cuisine des immigrés que le bobo peut continuer à fréquenter assidûment les restaurants pour une note assez modique. Etc.