MULHOUSE (NOVOpress Breizh) – Lors d’une conférence de presse donnée lundi après-midi à Mulhouse, Marine Le Pen a fait part de son opposition au projet de conseil territorial d’Alsace (CTA), qui sera soumis à un référendum local le 7 avril prochain. Un projet novateur, fondé sur l’identité alsacienne, qui sème l’inquiétude chez les jacobins de droite comme de gauche.
Réunies simultanément le 25 janvier dernier les trois assemblées du Conseil Général du Bas-Rhin, du Conseil Général du Haut-Rhin et de la Région Alsace avaient adopté, par des délibérations concordantes, le projet de création de la Collectivité territoriale d’Alsace.
Le 7 avril prochain, les Alsaciens vont donc être appelés à se prononcer par référendum sur la fusion de leurs deux départements avec le conseil régional. Pour toute création d’une nouvelle collectivité, un référendum est en effet imposé par la loi. Pour être adopté, le projet de fusion devra recueillir, dans chacun des départements existants, une majorité absolue des suffrages exprimés, correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits. Par la suite, la fusion de la région et des départements qui la composent en une unique collectivité territoriale devra faire l’objet de l’adoption d’une loi spécifique par le Parlement, déterminant son organisation et les conditions de son administration dans le respect des grands principes approuvés par les électeurs.
On est en présence d’« un début de détricotage de la France, un éloignement de la nation», a affirmé la présidente du Front national. Pour cette dernière le CTA« revêt une importance fondamentale pour l’avenir de l’Alsace et d’ailleurs pour l’avenir de toute la France. Ce projet est tout sauf technique, administratif ou anodin… Il est éminemment politique et comme tel, il doit être regardé de près. Je suis donc venue porter la parole du ‘non’, que je veux, que je crois populaire ».
Enfonçant le clou, Marine Le Pen estime que ce projet se traduira inévitablement par une hausse de la fiscalité locale et ne fera que renforcer le pouvoir « de quelques seigneurs locaux ». Un avis que ne partage pas Jacques Cordonnier, président du mouvement régionaliste Alsace d’abord : « L’Alsace sait mieux faire, plus vite et moins cher que l’Etat, alors laissons-là faire ».
« Par principe, je considère qu’on ne touche pas à l’administration d’un pays région par région – sinon, c’est le foutoir intégral ! Si jamais ce projet devait passer, ce serait un précédent dangereux. Ce serait (…) une grande victoire pour l’Union européenne et les technocrates de Bruxelles, qui œuvrent sans cesse à la dissolution des nations. Et nous sommes en guerre, nous, contre l’Union européenne », a-t-elle conclu.
Des propos plus mesurés que ceux tenus par Pascal Erre, membre du Bureau politique du Front national et patron du FN dans la Marne. Selon l’hebdomadaire Minute (13/03/2013), ce dernier affirme en effet que le projet du Conseil unique consiste à « aller plus loin dans la destruction de l’Etat nation France, en permettant à l’Alsace de s’ériger en Etat quasi-indépendant ». Faisant allusion au « Rapport congrès d’Alsace » édité par le Conseil régional et les deux assemblées départementales en novembre 2012, M. Erre soutient que « pour les auteurs du rapport, il est clair que l’Alsace n’est pas française », que « la nation rhénane n’existe pas et n’a jamais existé », que d’ailleurs celle-ci « était aussi le rêve des nazis pendant la Seconde Guerre mondiale ». Pas moins.
Pour mémoire, Patrick Binder, président du groupe FN au conseil régional d’Alsace s’était de prime abord montré favorable au projet de CTA, avant de s’abstenir lors du congrès d’Alsace organisé en novembre 2012. Depuis lundi, manifestement, au sein du parti frontiste, la discussion est close.
Il est vrai que dans cette opposition au projet de CTA, M. Le Pen est rejointe, toujours selon Minute, par le député PS de Strasbourg, Armand Jung, qui voit dans le Conseil unique « des réminiscences du passé revenant sur la scène de manière insidieuse » (sic), affirmant haut et fort que l’avenir des Alsaciens « est au sein de la France et de la République ». Une opposition partagée également par le Front de gauche Alsace, pour qui le CTA est carrément révélateur du « démantèlement programmé de la République » ; par quelques élus alsaciens, pour la plupart issus de la droite souverainiste et du Modem, avec pour slogan « J’aime l’Alsace, je dis non » (?!) ; par le syndicat Force ouvrière, hostile au projet parce que « cette recomposition territoriale induirait une perte de 40 % des effectifs d’agents publics en Alsace » ; ou encore par Roland Ries, le maire socialiste de Strasbourg, qui estime que le projet est une «usine à gaz ».
Mais ces opinions jacobines demeurent très minoritaires en Alsace. Selon un sondage CSA, si les Alsaciens avaient voté dimanche dernier, 75% d’entre eux auraient mis un bulletin ‘oui’ dans l’urne. Le projet de Conseil unique est en effet approuvé très majoritairement par les électeurs UMP, socialistes, écologistes et FN. Pour Philippe Richert, président UMP du conseil régional, « ce référendum est historique et les Alsaciens le comprennent. A eux de choisir la voie pour affronter les grands défis du XXIème siècle ». Réponse le 7 avril prochain.