Chômage record, cote de confiance de l’exécutif au plus bas, enfermement du pouvoir, polémique sur la transparence après l’affaire Cahuzac... A l’approche du premier anniversaire de son élection, François Hollande traverse une forte zone de turbulences, sur fond de défiance de plus en plus grande des Français pour leurs représentants politiques.
Ainsi, on s’aperçoit que si l’opposition n’était pas à ce point inaudible, elle pourrait reprendre à la lettre près, contre Hollande, tous les reproches que la gauche faisait à Sarkozy.
Si l’on a un peu de mémoire, on se souvient que François Hollande et la gauche en général n’avaient pas de mots assez durs pour critiquer Nicolas Sarkozy quand il ne voulait tenir compte des gigantesques manifestations de rue s’opposant à sa réforme des retraites à l’automne 2010, quand, après le moindre incident, il décidait, dans l’affolement, d’imposer de nouvelles lois, quand il s’inclinait servilement devant Angela Merkel, quand il s’avérait incapable de faire face à la montée du chômage et de réindustrialiser le pays, quand il augmentait les impôts sans pouvoir pour autant réduire les déficits, quand il intervenait militairement en Lybie. De son côté, Hollande n’a pas voulu entendre les centaines de milliers de Français qui, dans la rue, manifestaient contre son projet de mariage homosexuel. L’affaire Cahuzac n’est pas encore enterrée qu’il annonce déjà, dans la précipitation, des textes sur la moralisation de la vie politique. Et alors que l’austérité plonge le pays dans la récession, Hollande continue à tenter d’obéir aux injonctions de la chancelière allemande, sur fond de hausse du chômage, d’augmentation des prélèvements obligatoires et des déficits. Il a, lui aussi, voulu jouer les chefs en guerre, envoyant l’armée au Mali, ce que les terroristes islamistes nous font déjà payer à coups d’attentats (on l’a vu à Tripoli), tout comme Sarkozy qui, en faisant exploser la Lybie, aura donné le pouvoir aux fanatiques de la Charia et provoqué un chaos généralisé jusqu’au coeur de l’Afrique.
Hollande nous avait promis "le changement", mais il n’y a pas eu de changement, et le changement, on le sait, ce n’est pas pour maintenant, ni pour demain. Ainsi, à ce titre, nous assistons à un pitoyable ânonnement de l’histoire. Gauche, droite, c’est bonnet blanc, blanc bonnet. Sarkozy nous a très vite agacé par son agitation perpétuelle et contradictoire. Son successeur nous énerve par son apathique placidité. Sarkozy excitait les passions, Hollande nous les renvoie. Sarkozy était brusque, velléitaire et zigzaguait, tandis qu’Hollande prétend rechercher le consensus, recule volontiers (que ce soit sur les 75 %, le vote des étrangers, le non cumul des mandats), et ne sait pas visiblement où il veut aller, ni ce qu’il faudrait faire. Mais lui qui reprochait, à juste titre, à Sarkozy de diviser les Français les a divisés à son tour, avec cette affaire du mariage pour tous, et cela comme ils ne l’avaient pas été depuis bien longtemps. Le quinquennat de François Hollande devait pourtant permettre une réconciliation des Français, après celui particulièrement clivant ou décrit comme tel de Nicolas Sarkozy. Ainsi, c’est bonnet blanc, blanc bonnet... mais en pire. Car, non seulement jamais un chef d’Etat, pas même Sarkozy, n’avait été aussi rejeté par l’opinion publique dans tous les sondages, mais jamais les Français n’avaient été aussi désespérés par la vacuité du pouvoir.
Certes, la crise s’aggrave et l’avenir s’annonce catastrophique. Certes, l’opposition s’est discréditée et se porte mal - avec un ancien président mis en examen et un ancien premier ministre qui a échoué à prendre la tête de l’UMP -, et personne ne peut rêver, pour l’instant, à une alternance qui sauverait le pays. Mais le plus grave aujourd’hui, c’est que ce qui tient lieu de pouvoir s’avère totalement incohérent, avec des ministres dissidents, comme Montebourg et Hamon, et une majorité qui s’affole. Du coup, outre Jean-Luc Mélenchon, l’aile gauche du Parti Socialiste se fait entendre, à l’Assemblée comme au Sénat et réclame une sérieuse réorientation politique. Les voix dissonantes se font entendre dans la majorité, se plaignant de ne pas distinguer le cap fixé. Et après avoir vu, dans la même semaine, les hauts-fourneaux de Florange éteints définitivement, la raffinerie de Pétroplus commencé à être démantelée, l’usine de PSA d’Aulnay-sous-Bois menacée d’être fermée plus tôt encore que prévu, autant de sites devenus symboliques, et avant même d’avoir pris connaissance des chiffres catastrophiques du chômage, Claude Bartolone, président de l’Assemblée Nationale, demande dans Le Monde à Hollande de "tirer les leçons" de ces dix premiers mois "pour envisager un nouveau temps du quinquennat ».
Ainsi les uns, de plus en plus rares, disent que François Hollande n’est au pouvoir que depuis moins d’un an, et qu’il convient de lui laisser encore un peu de temps pour faire ses preuves. Les autres, de plus en plus nombreux, font remarquer qu’il est au pouvoir depuis près de onze mois et qu’il n’a toujours rien fait pour arrêter la dégringolade vertigineuse du pays. Mais en fait, comme l’analyse Thierry Desjardins, pour beaucoup de Français, cela fait des années que la France n’est pas dirigée et que droite et gauche ont démontré qu’elles s’avéraient tout aussi incapables, l’une que l’autre, à sortir le pays de son agonie. C’est naturellement, ce qui explique ce désenchantement...
Henri Rochefort http://www.actionfrancaise.net