26/05/2013 – 10H50 NANTES (NOVOpress Breizh) – Il faut savoir ménager la chèvre et le chou. C’est ce qu’a su faire Claude Chéreau, président de la commission du dialogue, machin inventé par Jean-Marc Ayrault (30/11/2012) « dans un souci d’apaisement » (sic) ; c’était au lendemain de vigoureux affrontements à Notre-dame-des-Landes. On ne pouvait attendre d’avantage d’un homme habitué à fréquenter les cabinets (François Mitterrand et Lionel Jospin).
D’abord un pas en avant : « Je n’ai aucun doute sur la pertinence du projet. J’ai des doutes sur la pertinence de certains arguments. Mais je suis convaincu de la nécessité de construire un nouvel aéroport à Nantes, tout de suite ou dans cinq ans », affirme M. Chéreau (Presse-Océan, 05/04/13). Puis un autre pas en arrière avec quatorze « conclusions et recommandations » – dont l’application ne peut que retarder sérieusement le démarrage de l’opération – dans le rapport remis au Premier ministre (mardi 9 avril 2013).
L’affaire rebondit mardi 14 mai à Brest. Jacques Auxiette (PS), président du conseil régional des Pays-de-la-Loire, et Pierrick Massiot (PS), président du conseil régional de Bretagne, flanqués de leurs vice-présidents, sont réunis afin d’aligner leurs positions sur plusieurs questions. « Mais le plus gros dossier à l’ordre du jour était, bien sûr, celui des transports. Jacques Auxiette attend pour le 14 juillet un nouvel arrêté préfectoral avec le calendrier des travaux « qui devraient débuter à l’automne » [à Notre-Dame-des-Landes]. Les dessertes du futur aéroport sont le grand enjeu des deux régions : car, tram-train et liaisons rail améliorées entre Nantes et Rennes, Brest et Quimper dans le prolongement de la future LGV [Paris-Rennes]. « LGV et aéroport, ces deux investissements sont historiquement significatifs pour nos deux régions », martèle Jacques Auxiette. » (Ouest-France, 15/05/13).
Pour ce dernier, les travaux à Notre-Dame-des-Landes pourraient donc démarrer à l’automne. « C’est son souhait, il pense que les recommandations émises par les différentes commissions peuvent être prises en compte dans un délai assez court », explique-t-on au syndicat mixte aéroportuaire.
« Le calendrier laisse les opposants dubitatifs. Le mois prochain, ils ont prévu de faire le point en préfecture sur les recommandations émises par la commission du dialogue, les experts scientifiques et les experts agricoles. » (Ouest-France, 16/05/2013). Vu l’importance et le nombre des relevés à effectuer, des objections auxquelles les maîtres d’ouvrage doivent obligatoirement répondre, l’affaire ne semble pas aussi simple que le souhaiterait M. Auxiette. Un exemple : les scientifiques ont refusé de valider le volet environnemental.
Sur le terrain politique, le dossier semble prendre l’eau au plus haut niveau ; il indisposerait l’Elysée qu’on se serait pas étonné : « Hollande a fortement suggéré à son Premier ministre de prendre du recul face au projet du futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes. Les conclusions de la commission du dialogue sur ledit aéroport permettent de gagner du temps et de désamorcer en partie la grogne des opposants. [Le rapport] recommande une série d’aménagements et d’études complémentaires. Lesquelles devraient retarder d’un an au moins le début des travaux. Voire de deux ans, en cas de recours. Pas sûr qu’Ayrault soit encore à Matignon à cette échéance. » (Le Canard enchaîné, 15/05/13).
En cas de départ de Jean-Marc Ayrault de Matignon, la donne s’en trouverait évidemment modifiée. Le vent ayant tourné, la religion du préfet ne pourra que coller à celle du nouveau gouvernement ; il n’est pas certain que les grands travaux « inutiles » soient toujours à la mode – tellement les contraintes financières sont fortes, à la fois pour l’Etat et pour les collectivités territoriales, en ces années de vaches maigres. Quant à Jacques Auxiette, une fois perdu le soutien du Premier ministre, ses certitudes et ses affirmations péremptoires perdraient de leur consistance. « La voix de son maître » n’aurait plus de « maître ». Mais les loisirs nécessaires pour écrire un second livre. Après « Aéroport du Grand Ouest : pourquoi j’y crois », il pourrait nous livrer : « Aéroport du Grand Ouest : pourquoi j’y ai cru ».
Et puis Jean-Marc Ayrault ne sera plus maire de Nantes, ce qui changera le rapport de force local. Ni maire ni Premier ministre, l’ex «boss » n’aura plus les moyens d’imposer sa volonté avec autant de facilité. Mais il faudra quand même compter avec les milieux d’affaires (promoteurs immobiliers, entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics, banquiers etc.), toujours à la recherche de grain à moudre et possédant les moyens de se faire comprendre.