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Types de civilisation et paramètres géopolitiques

Esquisses historiosophiques
INTRODUCTION
Le boom géopolitique, qui a gagné ces dix dernières années l’espace opérationnel de la pensée politologique russe, rappelle, dans un certain sens, le boom du marxisme au début de ce siècle.
Il est très curieux qu’aujourd'hui en Russie la géopolitique ne soit pas encore une discipline scientifique spécialisée, mais ne constitue qu'un nouveau symbole de croyance qui a donné les réponses à toutes les questions que l’on se posait depuis longtemps, y compris les questions à caractère spirituel que l'on n'avait jamais abordées avec le marxisme. Dans notre article, nous n’avons pas pour objectif de révéler les parallèles ultérieurs entre l’influence du marxisme et de la géopolitique sur la mythologie de la conscience populaire en Russie. Notre objectif est plutôt de dégager la nouvelle inclinaison de la pensée géopolitique russe en particulier (non dans le sens du symbole de croyance) vers la grande objectivité factuelle en ce qui concerne le discours général de la géopolitique et en particulier en tant que science spécialisée.
En géopolitique, il y a une idée standard, la notion/l’idée qu'il existe dans l’histoire deux types fondamentaux de civilisation : la thalasso-civilisation (civilisation maritime) et la civilisation tellurique (la civilisation continentale). Dans le monde règne, pour ainsi dire, une situation générale, mais comme on le sait, l’essentiel de tout processus est toujours dissimulé par des détails, et ce sont ces détails en particulier, qui, à notre avis, s'imposent aux esprits, souvent au détriment de « l’inviolabilité » du paradigme métaphysique fondamental, où tout est blanc ou noir (c'est le cas pour la thèse, fort répandue, qui souligne le contraste fondamental entre thalassocratie et tellurocratie, notamment dans une variante plus concrète: entre l’atlantisme et l’eurasisme. En fait, l’image de l’opposition des civilisations dans le monde est excessivement complexe et paradoxalement très dynamique (en l'occurrence, plutôt agir/fonctionner avec des codes binaires et non deux codes).
Même la logique élémentaire suggère que le type le plus universel de civilisation apparaîtra où l’on aura atteint l’union la plus harmonieuse des « vents » marins et continentaux de l’histoire, et avec cela sans perdre leur contrôle.
Plus concrètement, ce sont les différences —mais en même temps les similitudes— entre les différents types de civilisations qui nous exposent l’histoire des puissances coloniales. En fait, ici nous pouvons observer les formes les plus diverses de colonisation de l'espace habitable, la colonisation maritime comme la colonisation continentale. Nous allons aborder des exemples concrets.
L’ANTIQUITE
Déjà, dès les débuts de l’histoire, on voit des peuples accomplir des expansions maritimes et continentales. Ainsi, la colonisation de la Palestine par l’antique peuple d'Israël est un bon exemple d’expansion continentale et son soulèvement contre le « peuple de la mer » est un des prototypes du conflit historique entre thalassocratie et tellurocratie. En outre, la puissance assyrienne illustre très bien l’impérialisme continental et la puissance phénicienne s’illustre sur la mer. Mais il faut ajouter que pour asseoir n’importe quelle puissance assez consolidée, il est nécessaire de contrôler les réseaux de communications correspondants : les réseaux maritimes, continentaux et autres. Pendant l’Antiquité, c’étaient, avant tout, les voies fluviales qui assuraient le pouvoir sur le continent, et, par après, petit à petit, l’importance des voies terrestres a également augmenté. Le pouvoir de la thalassocratie était déterminé par le contrôle des zones de navigation côtière, à laquelle s’ajouteront plus tard les détroits et les courants marins. Depuis des temps immémoriaux, les rivières relient la mer aux profondeurs du continent, les cultures côtières et continentales.
La Grèce, en tant qu’exemple d’une authentique universalité, est un cas particulier : la civilisation grecque a commencé par être maritime (c’était une civilisation de police côtière et insulaire), et au fil du temps, elle devint la force continentale la plus puissante. Avant tout, nous voulons ici parler de l’expansion coloniale terrestre de l’hellénisme vers l’Est, et ce, jusqu’aux profondeurs continentales de l’Asie centrale. L’Empire romain a lui aussi connu ce type de civilisation universelle : la flotte romaine ne valait pas moins sur la mer Méditerranée que les légionnaires romains ne l’étaient sur les étendues continentales de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique. Par la suite, Byzance applique cette même tradition géopolitique des « deux composantes » (la symphonie de la Mer et de la Terre).
MOYEN-ÂGE
Avec le début du Moyen Âge commençait une nouvelle étape de l’opposition géopolitique des peuples et des civilisations. L’espace de l’Empire romain, en tant que civilisation universelle de l’Antiquité, s’est exposé à une expansion coloniale prolongée autant sur terre que sur mer, ce qui entraîna, dans chaque cas, l’apparition de formes particulières de cultures nouvelles. « Les peuples de la mer » de l’Europe du Moyen Âge sont des conquérants normands-varègues, qui s’étaient emparé de l’Empire suite à des encerclements militaires. Partis en campagne depuis les étendues de l’Europe du Nord (baltique) s’imposèrent sur le « front occidental » atlantique depuis l’Angleterre jusqu’à l’Afrique du Nord et l’Italie du Sud ; alors que les Varègues, sur le « front oriental », affirmèrent leur pouvoir le long de toute la route continentale des Varègues et des Grecs, de la Baltique à la mer Noire, et jusqu’à Constantinople elle-même.
C’est ainsi que l’Europe donna lieu à plusieurs genres de cultures coloniales aux tendances géopolitiques différentes. C’est alors au tour de Venise, héritière originale de Byzance, de devenir, et pour longtemps, le type de thalassocratie le plus authentique. Les célèbres Croisades, continuation de la tradition des invasions normandes, furent l’instrument de la politique de Venise, qui avait pour objectif final un contrôle géopolitique total des bassins de la Méditerranée orientale et de la Mer Noire. Byzance fut la seule, de par sa nature, à être la plus thalassocratique, attitude qui fut cependant déterminée, non pas par un refus de son élite politique pour les principes de l’universalisme antique, mais héritée de circonstances bien concrètes : la perte d’une grande partie du territoire (en tant que facteur « continental ») suite aux expansions arabe et turque.
La colonisation arabe, à son tour, est un exemple à l’opposé de l’hellénisme; elle est la transformation de l’espace civilisationnel du tellurocratique profond (continentalisme d’Arabie) à l’universel. De même, la colonisation arabe s’est propagée autant par voies terrestres (du Maroc à l’Asie centrale) que par voies maritimes (de célèbres navigateurs arabes n’ont pas été que des concurrents sérieux pour les Vénitiens, ils ont aussi contrôlé presque tout le bassin de l’Océan Indien). Et il faut attendre l’invasion mongole, la tellurocratie la plus radicale du Moyen Âge, pour voir la fin de l’universalisme arabe.
Par la suite, la colonisation turque était elle aussi, de par sa nature, tellurocratique, vu sa propre prétention à l’universalisme. Si les Mongols, dont les territoires côtiers conquis ne relevaient pas de l’universalisme civilisationnel, s’étaient de nouveau retirés dans les profondeurs du continent, c’était de la faute des Turcs, issus de ces mêmes profondeurs, qui, historiquement, avaient conservé leur accès à la mer et qui avaient tenté de s’approprier/d’imiter la tradition de l’universalisme géopolitique des Arabes et des Byzantins. Toute fois, l’Empire d’Osman resta davantage une puissance tellurocratique. L’avantage de conserver ce statut géopolitique (et en même temps par contrainte technique pour un développement adéquat de l’universalisme ottoman) a servi de circonstance pour que la Sublime Porte se concentre considérablement sur sa politique extérieure pour s’opposer à la tellurocratie européenne la plus fondamentale du Moyen Âge, le Saint Empire romain germanique (conflit au-delà du bassin danubien).
Le Saint Empire romain germanique fut le résultat d’une expansion coloniale germanique en Europe. Cette expansion avait un caractère double : elle était maritime et terrestre. Nous avons déjà parlé d’une thalassocratie germanique antique (les invasions normandes). À l’origine, les Goths, et ensuite les Francs, constituaient la tellurocratie germanique. Initialement, la nation de Charlemagne était une puissance très continentale, où le pouvoir tellurocratique assurait le contrôle sur les bassins des voies fluviales les plus importantes du Nord-Ouest de l’Europe (y compris les embouchures et les courants moyens du Danube). Malgré la tentative de la Rome latine d’introduire en Allemagne par les terres « le virus » de l’universalisme antique (Charlemagne proclamé Empereur romain), l’Etat de Carolingiens resta fidèle à ses principes tellurocratiques, ce qui, plus tard confirma sa division par Charlemagne lui-même en trois parties qui correspondaient en fait, aux trois « bassins de contrôle » : la France, la Germanie et l’Italie du Nord. Par la suite (Xe siècle), la Germanie et l’Italie du Nord constituaient la partie principale du nouvel Etat européen, qui nominalement, issus des traditions impériales des Romains et des Carolingiens, celles du Saint Empire romain germanique.
La colonisation germanique sur le pourtour de la Baltique possédait principalement un caractère thalassocratique, issu des traditions des troupes de Normands et de Varègues et s’est maintenue lors de la Ligue hanséatique des villes. En ce qui concerne les territoires baltes germanisés, ils n’ont jamais été officiellement repris dans l’Empire germanique médiéval bien qu’ils en dépendaient politiquement. La flotte hanséatique opérait de la même manière sur la Baltique et les mers du Nord que les Vénitiens sur la Méditerranée. L’Europe, située entre les mers du Nord et du Sud, était dirigée par l’élite tellurocratique germanique qui menait une implantation coloniale successive dans les profondeurs du continent vers l’Est, jusqu’aux frontières de la sphère d’influence géopolitique de la Russie.
L’ancienne Russie fut une variante très originale de l’universalisme géopolitique et s’institua surtout une élite thalassocratique (la Russie varègue) qui se retrouva au beau milieu d’un entourage hautement tellurocratique (khanat Khazar et Empire germanique). Suite à l’invasion mongole, la Russie s’est divisée en trois composantes : la Russie occidentale (Kiev), la Russie orientale (Moscou) et la Russie du Nord (Novgorod). La Russie occidentale qui s’est retrouvée enclavée dans les tenailles germano-turco-mongoles, perdit la possibilité d’une expansion coloniale propre et qui s’est transformée en périphérie, en confins, géopolitiques (Ukraine). La Russie orientale, dont l’accès à la mer fut coupé par les Tataro-Mongols, prit les traits typiques d’une puissance tellurocratique (le pouvoir des grands Princes moscovites s’est basé sur le contrôle des sources et des courants moyens d’une série de rivières importantes du massif de la Russie ancienne), et, jusqu’au XVIe siècle, la Russie du Nord conserva ses traits universalistes anciens (thalasso-tellurocratique) rappelant d’une certaine manière l’Empire germanique : un commerce maritime (sur les mers Baltique et Blanche) ajouté à une assimilation systématique des nouveaux espaces continentaux à l’Est, jusqu’à la "ceinture de pierre" (Oural).
L’unification des Russies de Novgorod et de Moscou fut un puissant stimulant pour le développement de l’universalisme géopolitique russe spécifique, historiquement exprimée dans l’idée de la Troisième Rome. Suite à l’accès de l’Etat russe aux mers Baltique et Blanche au Nord-Ouest, et de même aux mers Noire et Caspienne au Sud-Est, fut introduite dans la politique russe l’intuition thalassocratique avec une force particulière, déployée par Pierre le Grand. En même temps, la colonisation russe continua dans les espaces continentaux internes, et de cette manière, la combinaison harmonieuse des vecteurs "thalasso" et "telluro" dans la politique coloniale russe mena à la création d’un empire universel sans précédent de par son échelle, un réseau géopolitique qui est paradoxalement exprimé dans la formule : « Moscou, le port aux cinq mers ».
LES TEMPS MODERNES
Les grandes découvertes géographiques des 15ième et 16ième siècles ont entraîné une expansion coloniale mondiale des nations européennes : le monde entier devient l’objectif de leurs stratégies géopolitiques. Nous observons ici, avant tout, l’établissement de deux puissances coloniales universalistes : l’Espagne et le Portugal. L’universalisme latin, incarné par ces deux puissances, possédait trois composantes historiques : l’universalisme impériale antique de Rome (Eglise romaine), les gènes tellurocratiques de l’aristocratie espagnole (issue des traditions de la colonisation terrestre de la Germanie antique et des Goths occidentaux), et le thalassocratisme méditerranéen (vénitien) apporté par les croisés, les templiers qui s’y étaient réfugiés après le début de la répression de l’Ordre en Europe au 14ième siècle et qui, par la suite, ont activement participé au projet de colonisation de l’Amérique. Christophe Colomb (un Génois d’origine) représenta le thalassocratisme méditerranéen.
Il faut attirer une nouvelle fois l’attention sur le fait que, malgré une flotte mondiale plus puissante en ce temps-là, l’Espagne ne se transforma pas en puissance thalassocratique avec une stratégie géopolitique logique propre au vrai thalassocratisme. La colonisation espagnole de l’Amérique portait surtout le caractère d’une colonisation continentale et elle n’était pas seulement la mise en œuvre des régions côtières clefs. À cet égard, la colonisation portugaise des côtes d’Amérique, d’Afrique et d’Asie fut la plus thalassocratique. Ce sont justement les Portugais qui se sont les premiers heurtés aux intérêts de la nouvelle thalassocratie européenne, c'est-à-dire la Hollande, qui est entrée dans l’arène mondiale de l’époque des Temps Modernes.
La thalassocratie hollandaise, malgré la situation continentale des Néerlandais, est, si l’on peut s’exprimer ainsi, la plus classique. Au 17ième siècle, Amsterdam devint la nouvelle Venise d’Europe. La colonisation hollandaise visait, avant tout, le contrôle des voies marchandes maritimes et des points stratégiques le long des côtes de l’Afrique du Nord jusqu’au Japon y compris ainsi que le long des côtes de l’Amérique du Nord et centrale. Les points stratégiques pour soutenir la politique coloniale hollandaise : Nieuw Amsterdam (qui deviendra plus tard New York), le Cap (l’extrémité sud de l’Afrique, position-clef sur la route maritime de l’Europe à l’Océan Indien), Java (contrôle sur l’archipel indonésien et les détroits de la route maritime de l’Inde à la Chine).
La stratégie coloniale hollandaise fut appliquée ultérieurement avec succès par la Grande-Bretagne et, avant tout, contre la Hollande elle-même dans la lutte pour la primauté mondiale sur les océans. C’est ainsi que la Grande Bretagne s’empare de Nieuw Amsterdam et continue la colonisation entreprise par les Hollandais des côtes orientales de l’Amérique du Nord (Nouvelle Angleterre) ; s’empare d’une série de péninsules clefs dans les Caraïbes et de territoires côtiers de l’Amérique centrale ; s’implante en Afrique du Sud (tire le verrou à Cape Town, etc) ; s’introduit dans l’Océan Indien, assurant le contrôle sur les côtes d’Afrique orientale (prise de Zanzibar, etc) et s’implante en Inde et en Malaisie (routes maritimes entre l’Inde et la Chine) et enfin, en Chine même (Hong Kong).
La colonisation britannique est typiquement thalassocratique quand elle ne se passe pas au plus profond des continents (l’Australie est intensément colonisée sur ses côtes, c’est le caractère thalassocratique, mais dans le cas de l’Inde, on parle non seulement de colonisation civilisationnelle mais aussi politique – voir l'accord entre la Grande Bretagne et le Grand Moghol. À cet égard, l’histoire de l’assimilation de l’Amérique du Nord fut tout aussi exemplaire. Là, la colonisation thalassocratique britannique se limitait, strictement parlant, aux zones côtières de la Nouvelle Angleterre, alors que les étendues intérieures du continent nord-américain avaient d’abord été occupés par les Espagnols (Californie, Texas) et les Français (Louisiane). Dans les territoires plus intérieurs encore, les Etats-Unis se sont constitués plus spécialement, avec pour matériel humain, les descendants des colons germaniques (jusqu’à la création des Etats-Unis, ils constituaient la moitié de la population du pays) et les immigrants d’Europe occidentale à la mentalité « européenne ».
La tradition géopolitique américaine contient, ainsi, des éléments contradictoires qui constituent en même temps les prémisses d’un universalisme propre à l’Amérique. Jusqu’à présent, les Etats-Unis restent dominés par l’élite thalassocratique d’origine anglo-hollandaise dont le fondement politico-spirituel est constitué par l'atlantisme. Cependant, il existe aussi une forte « opposition continentale » contre l’atlantisme, représentée par les « patriotes », les fondamentalistes-nativistes, auxquels on peut également ajouter les Indiens. Certes, pour finir, les Etats-Unis imitèrent la stratégie géopolitique de la Grande Bretagne qui comprenait la dernière structure néo-coloniale propre, sortant du cadre du véritable atlantisme.
Les autres voies de la colonisation. La victoire historique de la flotte britannique sur l’Espagne marqua un renforcement de la position géopolitique de la nouvelle thalassocratie anglo-saxonne, et dans le monde romain (latin), un nouveau projet universaliste vit le jour, l’universalisme français.
La colonisation française est, d’une certaine mesure, le cumul, la réunion, des types de colonisation espagnole (continentale) et portugaise (maritime). D’une part, les Français se sont assidûment battus pour le contrôle des détroits et des péninsules, suivant ainsi une logique purement thalassocratique. Pendant ce temps, leur implantation était plus continentale que celle des Anglais. À part la Louisiane et le Québec en Amérique du Nord, les Français maîtrisèrent un immense espace continental en Afrique. Cependant, la France manquait de forces propres pour mener cette double tâche et asseoir son impérialisme universel auquel Napoléon aspirait jusqu'à la folie.
La colonisation allemande fut encore moins thalassocratique et plus tellurocratique que celle de la France. Jusqu’à la fin du 19ième siècle, l’Allemagne ne se décida pas à mener une politique de colonisation d’outre-mer et Bismarck, plongé dans des incertitudes, ne donna pas son accord pour la création d’un espace colonial germanique. Les pressentiments de Bismarck se révélèrent vrais : en principe, cette politique n’apporta aucun succès à l’Allemagne. Le colonialisme d’outre-mer italien et belge avait aussi un caractère très continental ; il consistait en l’occupation et l’exploitation de régions délimitées en Afrique (Congo, Libye, Erythrée).
Le colonialisme russe était loin d’être d’outre-mer, il était très continental ; et ce n’est qu’après la Deuxième Guerre Mondiale qu’en Russie (URSS), qu’apparurent des points d’appui stratégiques en dehors de l’Eurasie : en Amérique (Cuba, Nicaragua) et en Afrique (Egypte, Somalie, Libye, Ethiopie, Angola, etc). aujourd'hui, tous ces pays sont pratiquement déchirés. Mais, il existe un colonialisme continental encore plus fondamental, c’est celui de type turco-mongol (de Gengis Khan) qui s’est manifesté historiquement au sein des territoires de Gengis Khan et de ses descendants : la Chine Han, la Horde d’or, l’Etat de Timour, l’empire des Grands Mongols.
Le colonialisme chinois (non pas le colonialisme mongolo-han mais plutôt khano-confucéen) est plus penché vers l’universalisme tel que par exemple une colonisation chinoise active des côtes et des péninsules en Asie du Sud-Est et un développement important de la navigation côtière. Pendant ce temps, la colonisation continentale des vastes régions de l’Asie médiévale et centrale maintient la Chine en tant que puissance tellurocratique principalement. Le colonialisme japonais lui aussi avait un caractère double, et même radicalement double. Ce radicalisme était dû à deux vecteurs opposés : un vecteur tellurocratique visant une colonisation des régions intérieures du continent (Mandchourie, Mongolie, Tibet) et un autre thalassocratique, fondé sur une colonisation très thalassocratique de tout le bassin de l’Océan Pacifique.
Après la Deuxième Guerre Mondiale, les conditions générales de la réalité géopolitique se sont essentiellement transformées en rapport avec le progrès important des nouvelles formes visant à s’assurer une communication mondiale. Les voies de communications fluviales et terrestres du monde ont été ébranlées par l’aviation et, plus tard, par l’astronautique. L’introduction du facteur « aérien » dans la géopolitique amena la notion « d’aérocratie ». Les possibilités techniques actuelles permettent déjà, en principe, de ne pas dépendre (au niveau militaire) de l’aviation pour autant que les satellites armés dirigés à partir d’un tableau de commandes pourraient pratiquement assurer une extinction totale de n’importe quel objectif sur n’importe quel point de la planète. Pour mettre hors service la logistique d’un adversaire, il n’est plus nécessaire de transférer les grandes ressources humaines et techniques vers de vastes étendues, il suffit de mettre hors service son système énergétique, d’éliminer « avec précision » les nœuds stratégiques du gouvernement.
À l’heure actuelle, les Etats-Unis se révèlent être la principale force aérienne au monde et forment une alliance étroite avec la Grande Bretagne et l’OTAN. Le porte-avions symbolise au mieux l’union stratégique entre la mer et l’air. Néanmoins, vu les possibilités d’observation constante par satellite, l’avantage de la mobilité des porte-avions (ils sont les moins vulnérables lors d’offensives à l’étranger) face aux aérodromes stationnaires se relativise sensiblement.
Vladimir WIEDEMANN.
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2013/10/29/temp-4f52eb361a5119e25f27fbbf48534024-5208416.html

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