Les mânes des patriotes tombés le 6 février 1934, il y a tout juste quatre-vingts ans, auraient-ils inspiré à François Hollande la sage décision de reculer sur le projet de loi familiophobe que Dominique Bertinotti, ministre déléguée à la famille, devrait présenter en conseil des ministres au mois d’avril prochain ?
Il faut y voir plutôt un recul tactique, dû à la mobilisation du pays réel qui ne faiblit pas : 500 000 Français, à Paris et à Lyon, ont battu le pavé, dimanche 2 février, à l’appel de la Manif pour tous. Un immense succès, qui a prouvé que, loin de s’essouffler, la France profonde continuait de se mobiliser pour la défense de la famille. Pour certains, dont nombre de militants d’Action française, c’était même le troisième dimanche de suite à défiler contre la politique délétère du gouvernement, dans une mobilisation croissante qui révèle l’intensité de l’inquiétude des Français et leur détermination à s’opposer aux tentatives réitérées du pouvoir de transformer la société française en un champ de ruines. Jamais la Marche pour la vie, depuis sa création en 2005, n’avait réuni autant de monde ; quant au Jour de Colère, en dépit des provocations policières destinées à le pourrir auprès de l’opinion publique, il a cristallisé des mécontentements dont le caractère hétérogène traduit le ras-le-bol profond de toutes les couches de la population.
Dira-t-on que le gouvernement a joué de malchance ou qu’il a plutôt récolté les fruits pourris de son arrogance, de ses mensonges et de son manque de scrupules ? Valls avait cru pouvoir faire diversion des mauvais chiffres du chômage et de la délinquance par l’affaire Dieudonné ? Hélas pour lui, la mise au pas du Conseil d’Etat est mal passée auprès de la majorité des Français qui y a vu à juste titre une menace pour les libertés publiques. Et si des provocateurs en civil étaient encore de sortie, le 26 janvier, pour créer des « incidents » et « justifier », au moment de la dispersion, des interpellations d’ « insupportables » activistes d’ « extrême droite », en revanche, il n’y eut aucun débordement à la fin de la Manif du 2 février, preuve que lorsque les barbouzes restent à la niche, le pays réel défile et se disperse dans le calme. Il est vrai qu’Hollande en personne, en qualifiant, de Londres où il se trouvait la veille, de « légitime » le rassemblement du lendemain, signifiait à son sinistre de l’intérieur, en perte de vitesse dans les sondages, que ses viriles pitreries commençaient à devenir contre-productives auprès de Français de moins en moins dupes du retour de la Bête immonde.
Plus grave encore : Belkacem et Peillon ont cru pouvoir faire enseigner en toute discrétion à nos enfants, au sein même des écoles, la théorie du genre : hélas pour eux, un mouvement de fond des parents, en retirant les enfants des écoles le 24 janvier, révélait aux Français ahuris la réalité qui se cache derrière ces « ABCD de l’égalité » actuellement « expérimentés » dans 275 établissements scolaires. « Rumeur , « mensonge », « manipulation » a osé vociférer notre petit père Combes de l’éducation, surjouant l’indignation ! Et de menacer déjà les parents résistants de « convocations » par les chefs d’établissements, comme s’ils étaient de vulgaires délinquants ! Se prépare-t-il à les faire jeter en prison, comme dans l’Allemagne de Merkel ? Le coup a porté : comme le révèle un récent sondage, le ministre de l’éducation a fini de perdre, auprès de parents rendus légitimement méfiants, et qui veulent d’une école qui instruise et non qui endoctrine leurs enfants, le peu de crédit qu’il lui restait après sa sortie sur le cannabis à l’automne 2012 et sa calamiteuse réforme des rythmes scolaires. Peillon et sa complice Belkacem sont apparus pour ce qu’ils sont, des menteurs : partout, sur la Toile et dans la presse écrite, les preuves se sont multipliées de leur militantisme actif en faveur de la théorie du genre et l’aveu, le samedi 1er février, de Laura Slimani, présidente des Jeunes socialistes, au rassemblement des secrétaires de section, a fini de les confondre : « Oui, le genre, ça existe ! Et oui, nous allons l’enseigner dans les écoles, et c’est tant mieux ! »
François Hollande a manifestement compris qu’il était allé trop loin, que les Français n’acceptent plus ce cynisme qui consiste à les diviser tout en affirmant le contraire. Que cette attitude à la fois autiste et méprisa nte finirait par lui coûter cher aux élections municipales et, surtout, européennes, même auprès d’une partie de son électorat, qui n’a pas dû voir d’un meilleur œil que le reste des Français cette autre attaque contre la famille qu’est la suppression, à la demande du MEDEF et avec l’approbation de la droite, des cotisations familiales des entreprises d’ici à 2017. Belle unanimité du pays légal pour mettre fin à une mesure héritée du catholicisme social du XIXe siècle et inscrite dans la loi en 1932 !
Il s’agit de rester lucide : la gauche n’a renoncé à rien et les parlementaires socialistes s’impatientent déjà, prêt à présenter des propositions de loi familiophobes. De plus, la légalisation prochaine de l’euthanasie et du suicide assisté n’est pas remise en cause et le projet de loi sur la famille, s’il est programmé pour le second semestre de 2015, c’est-à-dire après les élections départementales et régionales, n’en sera que plus ravageur. Qu’elle pense n’avoir plus rien à perdre ou qu’une amélioration de la situation économique et sociale du pays lui laisse entrevoir une chance de l’emporter en 2017, la gauche aura dix-huit mois devant elle pour inscrire dans les faits un nouveau bouleversement sociétal que les media aux ordres auront eu davantage le temps encore de promouvoir auprès des Français et qu’une droite veule — la gauche le sait — n’osera pas plus remettre en question, si elle retourne au pouvoir, que le mariage homo, l’euthanasie, la recherche sur l’embryon ou la banalisation totale de l’avortement.
Car comme l’a déclaré Ludivine de La Rochère, présidente de La Manif pour tous à Famille Chrétienne le 3 février, « les ténors de la droite ne nous ont pas encore compris », ajoutant : « Il y a quelques personnalités très courageuses, mais elles sont peu nombreuses. [...] la gauche montre où et dans quel sens elle veut aller. La droite, elle, ne sait pas ce qu’elle veut. Quelle est sa ligne ? Quelles sont ses convictions ? Nous ne le savons pas. » Mais cette droite parlementaire qui a abandonné à la gauche le combat des valeurs depuis 1974, pourquoi se priverait-elle de chercher à ratisser le plus large possible du centre gauche à la prétendue « Droite forte » de Guillaume Pelletier, puisque les défenseurs de la famille se divisent eux-mêmes — quid des rapports entre le Printemps français et LMPT, dont les démarches sont évidemment complémentaires ? — et que le Front national, excepté là encore quelques personnalités aux fortes convictions, semble lui aussi trop souvent préoccupé de donner, à son tour, des gages de conformisme à la gauche, comme s’il voulait achever par une totale normalisation une dédiabolisation que, de toute façon, l’établissement n’acceptera jamais ? Comme si la société française, de son économie à son mode de vie, de son industrie à sa civilisation, ne formait pas un tout cohérent englobant toutes les couches de la société ? C’est sur tous les fronts à la fois, sans exclusive aucune, que le combat doit être mené. C’est avec les Français de toutes les classes sociales qu’il convient de reconstruire la France.
Qu’on compte en tout cas sur l’Action française, dont le retour de plus en plus affirmé commence à inquiéter le pays légal et les chiens de garde de l’oligarchie, pour porter la contradiction là où ça fera mal ! Elle le doit aux morts du 6 février 1934, elle le doit à la France.
François Marcilhac - L’AF 2879
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Edito-Sur-les-paves-la-rage