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Poutine, l'anti-politiquement correct

Malgré ses défauts, la Russie fait front aujourd'hui contre un Occident qui voudrait lui voir adopter le libéralisme à tout crin qui lui tient lieu désormais de philosophie, sinon de colonne vertébrale. Car Moscou n'entend pas se sacrifier dans une espèce de grand tout mondialisé où son identité, l'Europe en donne aujourd'hui l'exemple, serait condamnée à disparaître.

Le 5 décembre 2013, recevant sur Europe 1 l'ambassadeur de Russie en France, Alexandre Orlov, le journaliste Jean-Pierre Elkabbach lui demandait avec sa finesse coutumière : « Quel est finalement l'ennemi actuel de la Russie ? » Question à laquelle le diplomate répondit : « La Russie n'a pas d'ennemis. Mais je crois, si vous voulez, que les adversaires que nous avons tous en commun, ce sont des gens qui défient nos valeurs judéo-chrétiennes, qui veulent imposer leur idéologie par la force. Ce sont les adversaires de la Russie mais aussi de l'Europe tout entière. » Et comme le journaliste lui demandait s'il voulait parler « de tous ceux qui représentent les intégrismes djihadistes, salafistes ? », Alexandre Orlov précisa : « Oui, et tous les intégrismes, de tout ordre, aussi bien musulmans que d'autres. »

Peut-être à cet instant pensait-il aux « Pussy Riots », par exemple, ces militantes appartenant à un groupe de punk-rock féministe russe qui furent condamnées en août 2012 à deux ans d'emprisonnement pour vandalisme et incitation à la haine religieuse, après s'être livrées à une « prière punk » dans une église orthodoxe ?

Nouvelle résistance

Ou bien aux « Femen » qui, en France, ont pu vandaliser impunément, en février 2013, les nouvelles cloches de Notre-Dame de Paris exposées dans la cathédrale, ou qui, le 20 décembre, ont organisé un « avortement de Jésus » dans l'église de la Madeleine ? A cette dernière occasion, le cardinal-archevêque de Paris, Mgr Vingt-Trois, avait regretté le manque de réactions au plus haut niveau de l'Etat, en particulier de la part du ministre de l'Intérieur et des cultes, Manuel Valls...

Aujourd'hui, par un incroyable renversement de situation si l'on songe à ce qu'il en était voilà seulement un quart de siècle, c'est la Russie qui devient le pôle de résistance des valeurs traditionnelles, face à un « Occident » qui les a sacrifiées sur l'autel du politiquement correct.

Bien sûr, tout est loin d'être parfait en Russie. Ainsi, l'avortement y est plus couramment pratiqué qu'en France. Mais les autorités russes tentent de le combattre: alors que F avortement était depuis l'Union soviétique complètement « libéralisé », une loi votée en novembre 2013 interdit ainsi toute publicité en sa faveur, instaure un délai entre la visite chez le médecin et l'acte de mort, d'autres mesures sont proposées, concernant la suppression de sa gratuité dans les cliniques publiques, ou durcissant les conditions dans lesquelles la pilule du lendemain peut être prescrite aux mineures et aux femmes mariées (accord des parents pour les premières et du mari pour les secondes).

Un patriotisme à « contre-sens de l'histoire »

Vladimir Poutine ne mène pas lui-même la vie d'un saint de vitrail, mais il est ferme sur les principes. En septembre 2013, à Novgorod, lors de la 10e réunion du Club Valdaï, qui réunit des hommes politiques russes et étrangers, il critiquait l'excessive « correction politique » de l'Occident, en lui reprochant de rejeter « les principes moraux et toute identité traditionnelle, au 'elle soit nationale, culturelle, religieuse ou même sexuelle... On mène des politiques mettant sur un pied d'égalité les familles nombreuses et les familles homoparentales, la foi en Dieu et la foi en Satan... »

Les réserves du président russe sur le pseudo « mariage » homosexuel et sur l'adoption des enfants par les prétendues « familles homoparentales » sont connues et lui ont valu, par exemple lors des jeux de Sotchi, l'hostilité des médias français. En juin 2013, la Russie a prohibé l'adoption d'enfants russes par les couples de même sexe, russes ou étrangers ; et le 13 février dernier, un décret signé par le premier ministre Medvedev a également interdit l'adoption aux célibataires originaires des pays ayant autorisé les unions entre personnes de même sexe. La Russie se présente ainsi comme l'adversaire résolue des tendances qui prévalent aux Nations-Unies ou au sein de l'Union européenne, et qui tendent, au nom de l'Egalité, à la dissolution de la famille traditionnelle.

L'autre reproche adressé à Vladimir Poutine est son patriotisme, qui le conduit aujourd'hui à répondre à l'appel de la population de Crimée, très majoritairement russe et demandant à réintégrer le giron de mère Russie.

A l'heure où l'élite occidentale rêve de vider les nations de leur substance au bénéfice d'un utopique gouvernement mondial (le nouveau « sens de l'histoire »), et où l'Union européenne, qui apparaît comme la première étape de ce projet, tente de s'étendre au moment même où les peuples qui y sont entrés de longue date, français, britannique, hollandais, lui signifient leur dés-amour, voilà qui ne fait pas bon effet.

Si Poutine est si unanimement critiqué parles adeptes du politiquement correct, c'est parceque la Russie est devenue au temporel, commele Vatican au spirituel, le principal pôle de résistance au monde qu'ils espèrent.

Hervé Bizien monde & vie 9 avril 2014 

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