Veto du gouvernement à l’augmentation du plafond des rémunérations variables chez RBS, vives critiques des actionnaires de Barclays : les bonus des mastodontes de la City continuent de faire des vagues au Royaume-Uni.
“Le gouvernement a été très clair. Notre approche de la rémunération doit être équilibrée alors que nous émergeons de la crise financière“. Tapant du poing sur la table, le ministère britannique des Finances a opposé une fin de non-recevoir à la Royal Bank of Scotland (RBS), dont l’État détient 81% du capital depuis son sauvetage à grand frais en 2008.
La banque, qui n’a pas encore sorti la tête de l’eau malgré une cure de redressement drastique et a accusé une nouvelle perte massive de près de 9 milliards de livres (environ 10,9 milliards d’euros) l’an dernier, a indiqué vendredi qu’elle aurait souhaité relever le plafond des bonus de ses banquiers.
La loi européenne sur le plafonnement des bonus stipule que la rémunération variable des banquiers ne peut plus excéder le montant de leur rémunération fixe, mais permet toutefois aux établissements de la porter au maximum au double de la rémunération fixe, à condition que les actionnaires soient d’accord.
Problème pour RBS, UKFI, l’entité publique gérant les participations de l’Etat dans le secteur bancaire, a informé la banque qu’elle voterait contre toute résolution allant dans ce sens lors de l’assemblée générale du 25 juin, l’obligeant donc à enterrer le projet purement et simplement.
La banque a eu beau invoquer que tous ses “principaux concurrents au Royaume-Uni et en Europe” allaient le faire et que ce projet était “compris” par les actionnaires institutionnels présents à son capital. En vain.
“RBS va dans la bonne direction” grâce à la stratégie de son nouveau patron, Ross McEwan, “mais elle n’a pas achevé sa restructuration et reste détenue en majorité par l’Etat. Une augmentation du plafonnement des bonus ne peut donc pas se justifier” et le gouvernement s’assurera que “la rémunération totale et la rémunération moyenne par personne baissera cette année chez RBS”, a insisté un porte-parole du Chancelier de l’Échiquier, George Osborne.
“Il y a quelques années, les bonus étaient hors de tout contrôle, les banques ont eu besoin d’être sauvées et l’économie se contractait“, a-t-il rappelé.
George Osborne est pourtant opposé à la loi sur le plafonnement des bonus que le Royaume-Uni a attaqué devant la justice européenne, car il juge que cette mesure aura pour effet pervers d’augmenter la rémunération fixe des banquiers, mais “tant qu’elle existe, nous nous assurerons qu’elle est appliquée“, a fait valoir son porte-parole.
Le bon élève Lloyds Banking Group, dont l’Etat se désengage alors que son redressement est en très bonne voie, aura lui le droit d’augmenter le plafond de ses bonus, a en revanche fait savoir le gouvernement.
Chez Barclays, la question des bonus a également fait des vagues jeudi lors de l’assemblée générale du groupe, près d’un quart des actionnaires ayant voté contre les rémunérations versées au titre de l’an dernier. Une représentante de la société d’investissement Standard Life a notamment souligné ne pas être “convaincue que le montant des bonus de 2013 était dans l’intérêt des actionnaires“.
Barclays avait suscité une intense polémique en février en annonçant une hausse de près de 10% des bonus à 2,378 milliards de livres (2,8 milliards d’euros), alors que son bénéfice avant impôts a chuté de 32% l’an dernier et que sa division banque d’investissement, ancienne vache à lait du groupe, est tombée dans le rouge au quatrième trimestre. Cette hausse des bonus avait d’autant plus choqué l’opinion que la banque avait annoncé parallèlement la suppression de 10.000 à 12.000 emplois supplémentaires cette année.
Mais la banque assume et justifie ces gratifications exceptionnelles par le besoin de garder ses banquiers les plus talentueux, qui pourraient sinon se faire débaucher dans un “environnement extrêmement compétitif“. Des banquiers qui pourraient toutefois être beaucoup moins nombreux à l’avenir, Barclays s’apprêtant, selon des médias et des analystes, à annoncer dans deux semaines des milliers de suppressions d’emplois dans sa banque d’investissement.
AFP (via Bilan)