On aimerait que ces notes, rassemblées sur un titre sinon provocateur, du moins "osé", "Non l'Allemagne n'était pas coupable" (1)⇓ nous amènent à nous interroger sur les causes des guerres.
Rarement, en effet, les commémorations des horribles conflits du XXe siècle auront occupé les écrans comme en cet an de grâce 2014. Entre le centenaire du déclenchement de la première guerre mondiale en 1914 et le soixante dixième anniversaire du débarquement de Normandie de 1944 que d'occasions de revisiter l'Histoire. Et cela ne va sans doute pas s'arrêter après le retour des héroïques anciens combattants anglo-américains et la séparation des grands de ce monde, rassemblées en cette circonstance sur le sol de France.
Remarquablement reconstituées, rassemblées et colorisées, les émouvantes images du Jour J, et celles des combats qui suivirent la geste inouïe des premières lignes, devraient suffire en elles-mêmes à exorciser certaines légendes.
Si en 1944 le territoire français a été libéré, nous ne le devons ni aux gaullistes ni aux communistes.
Terrible pour la France, le choix des plages, des bocages et des villes de Normandie comme théâtre d'opération avait, certes, été pressé par Staline. A partir de la conférence de Téhéran de 1943, l'ancien allié de Hitler (2)⇓ se préoccupait de conquérir l'Europe centrale et orientale et de régler particulièrement son sort à la Pologne coupable en 1920 d'avoir victorieusement repoussé l'agression du Komintern.
Grâce à ces télescopages d'anniversaires nous disposons d'une occasion unique de rapprocher les deux guerres civiles européennes. Leur bilan global peut être envisagé comme celui d'une des plus grandes catastrophes de l'Histoire de notre continent, à comparer avec la chute de l'Empire en occident ou l'apparition de l'islamisme dans le monde méditerranéen.
Le lien entre les deux a conduit certains historiens à n'y voir qu'un seul et unique drame. En cela, Thucydide père de la pensée Historique nous y invite et donne l'exemple puisqu'il invente le concept de "Guerre du Péloponnèse" pour englober les deux conflits conduisant à la catastrophe finale de la suprématie athénienne à la fin du siècle de Périclès. Plus près de nous l'atroce guerre civile allemande de 30 ans au XVIIe siècle ou les guerres follement déclenchées par la révolution jacobine en 1792, où certains Français admirent encore leur sanglante aventure de pillage, peuvent être regardées sous le même prisme. Puisque nous nous situons dans une orgie d'évocations de la folie des hommes et de la nécessité de l'entente européenne on pourra bientôt saluer aussi le 300e anniversaire du traité d'Utrecht ou le 200e du congrès de Vienne.
Le lien essentiel entre la guerre de 1914 et celle de 1939 est utilement souligné par Philippe Simonnot, après Alfred Fabre-Luce auquel il se réfère : il s'agit de l'article 251 du traité de Versailles de 1919. Cette mise en cause de l'Allemagne comme [unique] responsable de la guerre, et [unique] coupable de ses atrocités doit être envisagée sous une triple dimension, à la fois politique, diplomatique et financière.
Telle se révèle en effet la logique du drame sanglant infligé à l'Europe, telle se construit la pensée des notes rassemblées dans ce petit volume, telle enfin se situe la cause de l'immense désordre financier imposé au monde à partir de la conférence de Gènes de 1922. C'est à cette époque que l'on a renoncé au rétablissement de l'étalon-or suspendu par la situation de guerre. Les conséquences durent encore, elles ont même été aggravées par le coup d'État monétaire de Nixon en 1971.
Désormais le principe du recours à la fausse monnaie a contaminé les transactions internationales. Elles ne reposent plus que sur le croisement artificiel de créances et de contraintes ; la moitié au moins d'entre elles pourront être jugées effaçables. Elles risquent fort, par conséquent, de se voir anéanties un jour ou l'autre au gré des rapports de forces, provoquant l'effondrement du château de cartes.
Sur la cause des guerres on ne peut pas se contenter de réponses aussi puériles que celles de Wilson et Clemenceau, fauteur de guerres lui-même. Philippe Simonnot ne prétend pas épuiser en 60 pages l'immense question des raisons ou plutôt des folies qui ont conduit à la première guerre mondiale.
Il n'écartera évidemment pas les causes "économiques", ou plus précisément "mercantilistes" : celles qui prennent en compte la lente montée des tarifs protectionnistes et, parallèlement, l'ascension industrielle de l'Allemagne unifiée au cours du XIXe siècle, par le Zollverein d'abord, par la proclamation de l'Empire des Hohenzollern ensuite.
Si l'on se reporte au livre de Gustave Le Bon, écrit en 1915 (1)⇓, on découvre que, pacifiquement, cette énorme puissance économique montante prenait, dans le début du XXe siècle, résolument la première place dans l'espace continental par le simple jeu de son commerce. Les cauchemars protectionnistes ne pouvaient donc pas en supporter la perspective. Il fallait abattre ce concurrent déloyal.
Toute ressemblance devrait être considérée comme fortuite, cela va sans dire.
JG Malliarakis
Apostilles
- texte bilingue édité par les Editions Europolis. ⇑
- j'insiste ici sur ce concept "d'alliance", différente d'un simple "pacte" de non-agression, que je développe dans mon livre "L'Alliance Staline Hitler" (1939-1941). ⇑
- "Psychologie de la Guerre" rééditée aux Editions du Trident.⇑
http://www.insolent.fr/2014/06/autour-dun-petit-livre-de-philippe-simonnot.html