Le 23 avril prochain, l'Eglise orthodoxe prononcera la canonisation de nouveaux martyrs : les victimes du tristement célèbre génocide arménien par les Turcs, un million et demi d’hommes, de femmes et d’enfants morts à cause de leur appartenance ethnique et religieuse.
[...] "On ne le rappellera jamais trop : Le peuple arménien a été victime, au siècle dernier, d’un des plus monstrueux génocides ethnico religieux de l’histoire de l’humanité. « En 1915 et durant les années qui ont suivi, fait mémoire le patriarche dans sa lettre aux accents poignants, un million et demi de nos fils et nos filles ont subi la mort, la famine, la maladie ; ils ont été déportés et contraints à marcher jusqu’à la mort. Des siècles de créativité et d’objectifs atteints ont été détruits en un instant. Des milliers d’Eglises et de monastères et ont été profanés et détruits, les institutions nationales et les écoles rasées et démolies. Nos trésors spirituels et culturels ont été éradiqués et effacés ».
À ce tableau dramatique, qui a hélas des relents d’actualité, on peut ajouter les fosses communes remplies de victimes sans nom, les trains de déplacés incendiés, les seuls survivants de ce gigantesque massacre étant ceux qui réussirent à rejoindre l’Arménie actuelle, alors sous domination russe, la Syrie ou le Liban, ou encore d’autres pays comme la France. [...]Pour autant, il ne s’agit pas de tourner la page, au mépris du devoir de vérité et de justice, insiste le patriarche, qui n’hésite pas à dénoncer « la négation criminelle de la Turquie ». Pour mémoire, celle-ci, et c’est une pierre d’achoppement pour son éventuelle entrée dans l’union européenne, n’a jamais voulu reconnaÎtre le génocide, reconnu – et condamné - par ailleurs officiellement par une vingtaine de pays (que le patriarche salue dans sa lettre, souhaitant qu’ils soient rejoints par d’autres). L’an dernier, le premier ministre Erdogan a bien présenté ses condoléances aux descendants des victimes. Un geste qui a été salué par le pape lui-même lors de son récent voyage en Turquie, et dont il a parlé comme d’une « main tendue ». Mais pour la majorité des arméniens d’aujourd’hui, ce geste est bien mince, au regard du calvaire enduré. « Le sang de nos martyrs innocents et les souffrances de notre peuple crient pour avoir justice », s’exclame le patriarche, qui, 100 ans après la tragédie,dénonce les « sanctuaires détruits, la violation de nos droits nationaux, la falsification et la distorsion de notre histoire ».Davantage de reconnaissance de la part de la Turquie pourrait aider au pardon. Mais en tout état de cause, en Turquie comme ailleurs, le pardon n’est pas l'oubli."
Marie Bethanie http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html