Les rebelles syriens de l’opposition « modérée » sont en train de perdre la guerre et ils le savent. D’où leur peu d’appétence pour les discussions de Genève, patronnées par les Nations Unies et censées déboucher sur une solution politique à un conflit, qui, le 15 mars prochain, entrera dans sa sixième année. Sauf coup de théâtre stratégique, le rapport de force militaire et le contexte international leur sont désormais défavorables. La coalition occidentale, États-Unis en tête, concentre son effort contre Daech en Irak, laissant le champ libre - au-delà des condamnations politiques - à la Russie du côté syrien.
Le régime de Damas l’a également bien compris. Pour le représenter à ces pourparlers, il n’a dépêché à Genève qu’un simple diplomate professionnel, Bachar Djafari, son représentant permanent aux Nations Unies. Et celui-ci en est à plaisanter sur la situation créée par les incertitudes et le malaise de l’opposition : « Nous attendons Godot et Godot n’est pas encore arrivé ». Godot, c’est le HCN, le Haut comité pour les négociations, mis en place par l’Arabie saoudite et soutenu par la Turquie et la France. Le « coordinateur général » de l’opposition est Riad Hijab, brièvement Premier ministre de Bachar al-Assad en 2012. Il ne devrait participer directement aux discussions, le « négociateur en chef » désigné étant le salafiste Mohammed Allouche, qui, pour l’heure, préfère rester discret.
Que pèse cette opposition dite modérée ? Il n’est pas aisé de le savoir avec précision, tant sa définition elle-même pose problème. Si tout le monde s’accorde à en exclure le front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda, la nature de groupe comme Ahrar ash-Sham ou Jaïsh al-Islam, très présents sur le terrain, pose problème du fait de leur idéologie salafiste ou extrémiste. « Il existe en Syrie une constellation de combattants très divers de l’ordre de 100 000 personnes, dont la France estime que 80 000 d’entre eux appartiennent soit à des groupes terroristes désignés comme tels par les Nations Unies, soit à des groupes salafistes extrémistes », indiquait récemment le général Didier Castres de l’état-major des armées, lors d’une audition au Sénat. Faites le calcul : 100 000 - 80 000 = 20 000 opposants qui ne sont donc ni « terroristes », si « salafistes extrémistes ».
Alors que ces groupes avaient militairement le vent en poupe jusqu’à l’été, l’intervention russe a changé la donne, à partir de septembre. Le Kremlin avait un objectif immédiat : empêcher la chute du régime. Cinq mois plus tard, il l’a atteint et plus personne n’estime aujourd’hui que Bachar tombera prochainement. Pour ce faire, l’armée russe a immédiatement concentré son action contre les forces qui menaçaient le plus directement le régime, c’est-à-dire celles de l’opposition non-Daech. [....]
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