Certains souhaiteraient que le deuxième tour des primaires de la droite soit débattu projet contre projet. Peut-être est-ce un peu tard : les deux projets ont été assez clairement déclinés déjà dans des livres et des interventions médiatiques, des intéressés eux-mêmes. À vrai dire, ni les deux candidats restant en lice ni les postulants évincés du premier tour n'avaient fait connaître jusqu'à cette campagne de manière aussi complète leurs idées et leurs propositions.
Les Français avaient parfaitement compris, dès le 19 novembre, veille du premier tour, que l'un considère comme urgentes des réformes radicales, et l'autre entend ménager les nostalgiques de la douceur de vivre de l'ère chiraquienne. Chacun a pu engranger des voix de provenances diverses, y compris à partir du rejet, bien réel pour une partie de la droite, de l'idée que l'ancien président Sarkozy retourne pour 5 ans à l'Élysée. C'est cette hypothèse qui aurait probablement valu le plus grand nombre de voix à Alain Juppé, et qui se trouvait préemptée par les grands habiles de la gauche.
Un débat télévisé se déroulera le 24 novembre. On retrouvera frontalement le choc des deux candidatures.
Or, si, jusqu'ici la compétition entre les 7 candidats du premier tour s'est déroulée de façon plus ou moins sereine, si selon une évaluation on peut estimer à hauteur de 600 000 votants, sur un total imprévu de 4 millions, l'apport qui a permis à des sympathisants de gauche ou du centre gauche d'intervenir dans le scrutin sans le perturber, il semble bien que les passions aient monté d'un cran depuis le vote du 20 novembre.
D'un côté, pour tous ceux qui soutenaient par calcul le candidat Juppé ou ceux qui avaient rallié son camp dans l'espoir d'un portefeuille ministériel, le sol leur a semblé se dérober sous leurs pieds. L'os qu'ils rongeaient déjà en rêve leur a été arraché.
De l'autre côté une partie de ceux qui croient possible une victoire de Marine Le Pen, sentent bien, eux aussi, que la désignation de François Fillon comme candidat de la droite leur barre la route, les prive de la plupart de leurs arguments et, même, les ramène à leurs divisions internes.
On ne doit donc pas s'étonner de voir le cours de la dernière ligne droite perturbé par ces contrariétés, conduisant à une volonté plus visible, plus organisée, d'intervention dans le débat de la droite.
C'est ainsi par caricature interposée que les post-gauchistes de Libération et les identitaires prennent parti dans la primaire de la droite mais ils ne voteront pas. Ce n'est donc pas, pour ces intervenants externes et hostiles, projet contre projet mais caricature contre caricature, et comme toutes les caricatures c'est parfois drôle, parfois injuste et souvent hors sujet.
À moins d'un afflux colossal et donc mesurable d'électeurs illégitimes, ou à moins d'un changement radical d'attitude de François Fillon, jusqu'ici imperturbable ce qui a fait sa force, on voit donc mal comment le résultat du premier tour pourrait s'inverser.
La seule question importante pour l'avenir est de savoir si la droite succombera une fois de plus aux manipulations psychologiques de la gauche, et à ses étiquetages qui se veulent infamants et qui sont supposés nous intimider.
Laissons sur ce point conclure un Bruno Retailleau. Car c'est à juste titre le président de la belle région des Pays de la Loire qui dénonce "la sémantique de la gauche pour disqualifier a priori toute volonté de réforme. On n'est pas “ultralibéral” sous prétexte qu'on veut ramener le nombre de fonctionnaires à la moyenne européenne, ni“ultraconservateur” quand on estime que le mariage pour tous ne doit pas créer un“droit à l'enfant”, et pas davantage “islamophobe” parce qu'on entend combattre les dérives de l'islam politique."
Il fallait que cela soit dit.
JG Malliarakis http://www.insolent.fr/