Hier soir Vladimir Poutine rencontrait sur les bords de la mer Noire à Sotchi (Caucase russe), le président de la République Arabe syrienne, Bachar el-Assad, avant que ne débute le sommet Russie-Iran-Turquie. M. Poutine a félicité son homologue syrien pour les succès remportés dans la lutte contre un terrorisme islamiste proche dans ce pays d’une défaite « inévitable et définitive », appelant à la mise en place rapide d’un «processus politique » pour stabiliser rapidement la Syrie et la région. Félicitations que les Allemands ne sont pas prêts de décerner à Angela Merkel qui, après les élections législatives du 24 septembre dernier, assez catastrophiques pour elle et son parti, se voit aujourd’hui dans l’impossibilité de former un gouvernement de coalition majoritaire que ce soit avec la gauche, les libéraux ou les conservateurs. La chancelière paye là aussi au prix fort sa délirante politique migratoire qui lui aliène durablement une large frange du peuple allemand. Quant à la solution consistant à convoquer de nouvelles élections pour dénouer la crise, elle fait craindre à son entourage un vote encore plus massif pour le parti anti immigration AfD.
Comme souvent en politique la roche tarpéienne est proche du capitole. Le quotidien suisse Le Tempsévoque déjà «la fin sans éclat de l’ère Merkel. A force d’habitude, l’Europe a fini par croire que la Mutti était indispensable. Il va lui falloir rapidement se trouver un leader de rechange. » Même jugement dans les médias français qui l’encensait pour son humanisme cosmopolite il y a encore quelques mois, époque à laquelle rapporte La Libre Belgique, « la chancelière Angela Merkel était perçue comme la femme la plus puissante du monde. Aujourd’hui, elle serait prête à jeter l’éponge et appeler à de nouvelles élections en Allemagne, un meilleur chemin qu’un gouvernement minoritaire, a-t-elle estimé lundi après-midi, en pleine crise politique. »
Une crise politique qui secoue aussi le parti Les Républicains, déchiré en son sein par des orientations idéologiques antinomiques que la victoire d’Emmanuel Macron, et les ralliements massifs de la droite à son panache supranational, ont révélé au grand jour. Il est difficile désormais de cacher aux Français les forces centrifuges qui menacent de faire imploser ce parti sans véritable colonne vertébrale. Laurent Wauquiez, candidat sans concurrents sérieux à la tête de LR, a décidé de lui redonner une identité autour de valeurs droitières qui font hurler plus ou moins fort la grande majorité des apparatchiks euro-libéraux de son camp. Mais M. Wauquiez estime que ce positionnement tactique (le mot sincère ne vient pas spontanément à l’esprit le concernant…) est la seule voie qui permettra de sauver les meubles, d’agréger le noyau dur de l’électorat de droite, tout en espérant plumer la volaille frontiste comme avait réussi à la faire le temps d’une élection Nicolas Sarkozy en 2007.
A l’heure ou Laurent Wauquiez plagie grandement les discours frontistes sur les sujets centraux que sont l’immigration, l’Europe, la délinquance, les insécurités, la paupérisation de la France périphérique, le multiculturalisme, etc., Marine Le Pen l’a pris au mot. Invitée dimanche du Grand Jury-RTL- Le Figaro-LCI, la présidente du FN a ainsi déclaré: « quand j’entends le discours de M. Wauquiez aujourd’hui je me dis : après tout, s’il est sincère, compte tenu des propos qu’il tient, il devrait aller jusqu’à proposer une alliance politique. M. Wauquiez ne peut pas dire sincèrement la même chose que nous, et parfois avec des mots plus crus que les nôtres, et en même temps expliquer que nous devrions être au ban de la vie politique française – il faut être cohérent, il faut être logique. »
Laurent Wauquiez est-il prêt à «sortir de l’ambiguïté » ? A sa façon c’est ce qu’il a fait hier à Paris lors d’une réunion publique: « je le dis une bonne fois pour toutes, tant que je m’occuperai de notre famille Les Républicains, il n’y aura jamais d’alliance avec Marine le Pen. » Comment expliquer cette position invariante vis-à-vis de l’opposition nationale depuis les calamiteuses années Chirac ? Lâcheté? Conviction personnelle? Engagements secrets? Crainte de précipiter la disparition d’ un parti qui serait alors déserté par la très grande majorité de ses hauts responsables qui n’ont pas les mêmes convictions que leur base électorale?
Le Figaro relate que le macronien-juppéiste Maël de Calan, lui aussi candidat à la présidence de LR pour obtenir quelques passages dans les médias, a prévenu M. Wauquiez: «Il y a une tentative de déstabilisation des Républicains par le Front National, dont il ne faut pas être les dupes. Marine Le Pen peut garder son alliance. Sa culture populiste qui consiste à dire à chacun ce qu’il a envie d’entendre n’est pas celle d’une culture d’un parti de gouvernement, comme le sont Les Républicains (sic). Ses idées: sortie de l’Europe, sortie de l’euro, antilibérales, xénophobes, identitaires, ne sont pas les nôtres. » Même son de cloche du maire de Meaux, l’inénarrable Jean-François Copé(monsieur 0,3% lors des primaires de LR) qui a averti M. Wauquiez dans Libération: « Je ne tolère aucune dérive vers le Front National (…). Je ne veux pas que mon parti sombre dans un anti-européisme grotesque et devienne une sorte de Tea Party rabougri. » Tea party rabougri qui a puissamment contribué à la mobilisation des esprits, au réarmement intellectuel et moral de la droite populiste-populaire aux Etats-Unis, soit dit au passage, et au final à l’élection de Donald Trump, mais c’est un autre sujet …
Bien sûr, le directeur de campagne de Laurent Wauquiez, Geoffroy Didier, a lui aussi rejeté toute idée de rapprochement avec le FN : « Marine Le Pen a perdu toute crédibilité. Elle en est à son baroud d’honneur, ou plutôt de déshonneur ». Une saillie qui ne manque pas de sel quand on se souvient d’un parcours particulièrement tortueux, riche en revirements de M. Didier (il fut membre du club de sarkozystes de gauche, La Diagonale, favorable au mariage homosexuel et au droit de vote des immigrés), qui sur ce point n’a rien à envier à la girouette Wauquiez, son nouveau mentor.
Le dilemme est, on le sait, on ne peut plus simple et a été énoncé par Bruno Gollnisch, mais il est loin d’être le seul à le dire, depuis fort longtemps. C’est l’alliance, au moins à la base, dans les urnes, de la France conservatrice qui a plutôt voté Fillon et de la France des catégories populaires qui a plutôt voté Marine ou s’est réfugiée massivement dans l’abstention. Deux France pareillement matraquées, mais à des niveaux différents, par l’idéologie hors-sol libérale-libertaire et mondialiste. Deux France qui, structurées, alliées autour de valeurs communes (identité, tradition, souveraineté, libertés…) pourraient porter demain au pouvoir une véritable alternative nationale et patriotique.
Il serait criminel de ne pas faire en sorte que ces deux France-là se parlent, de ne pas tenter de les rapprocher, à commencer au niveau local, de ne pas envoyer de signaux aux électeurs qui partagent avec ceux du FN de très nombreuses aspirations. Marine est à la hauteur des responsabilités qui sont les siennes, parfaitement dans son rôle en interpellant sur ce sujet M. Wauquiez ; celui-ci et ses amis ont dévoilé une nouvelle fois le leur en y répondant comme il l’ont fait…
https://gollnisch.com/2017/11/21/wauquiez-chirac-allie-de-revers-macronisme/