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Idée fixe, Astérix, sémantique

L’avis (facultatif) d’Edouard Philippe n’a pas été suivi, celui de la Licra et du Crif (impératif? ) oui. Antoine Gallimard a annoncé qu’il renonçait finalement à rééditer les trois pamphlets antisémites de Louis-Ferdinand Céline, considéré par beaucoup comme  le ou l’un des plus  plus grands écrivains français du XXème siècle. D’une censure l’autre, en 2011, le nom de Céline avait été retiré  du « Recueil des célébrations nationales » où il apparaissait, présence jugée incompatible avec les « valeurs fondamentales de la nation et de la République », avait  justifié Frédéric  Mitterrand, alors ministre de la Culture. La question après tout peut avoir sa pertinence: dans le climat actuel cette réédition par les éditions Gallimard était-elle en effet opportune, même accompagnée d’un appareil critique comme ce fut le cas au Québec? Outre l’intérêt littéraire et/ou historique que  les spécialistes de l’oeuvre de Céline prêtent à  Bagatelles pour un massacre, L’école des cadavres et Les beaux draps, les défenseurs de la publication arguaient du fait qu’ils étaient déjà intégralement consultables ou à la vente,  sans filtre, sur internet. Le journaliste politique Olivier Mazerolle déplorait hier sur RTL, dans l’émission On refait le monde, que l’annonce de la réédition des pamphlets puis finalement  de son  report sine die,  allait conforter dramatiquement  la paranoïa des antisémitecomplotistes. Sur cette même antenne, sa collègue Elisabeth Lévy, faisait part de ses sentiments partagés. L’un des arguments les plus audibles en faveur de la non publication  par Gallimard  a été formulé (une fois n’est pas coutume)  par  Arno Klarsfeld qui a rappelé que l’écrivain  lui même  s’était opposé à cette réédition… mais une fois publié un livre appartient-il encore à son auteur?  Commentant  Bagatelles, André Gide écrivait: « il va  de soi que c’est une plaisanterie. Et si ce n’était pas une plaisanterie, alors il serait lui, Céline, complètement maboul. De même lorsqu’il fait entrer parmi les juifs  de son massacre, pêle-mêle, Cézanne, Picasso, Maupassant, Racine, Stendhal et Zola. Qu’est-ce qu’il vous faut de plus? Comment marquer mieux que l’on rigole ? »

Mais l’époque n’était pas franchement à la rigolade, et le talentueux journaliste, écrivain et homme politique Léon Daudet,  pressentait la tempête à venir quand il  écrivait dans L’Action française en 1938:  « qu’on ne s’y trompe pas , ce livre  est un acte et qui aura peut-être, un jour, de redoutables conséquences. Bagatelles pour un massacre, c’est un livre carnassier , et qui paraît, sous un ciel  d’orage, à la lueur des éclairs. » Reste qu’il parait difficile de croire qu’en 2018 les émules plus ou mois illettrés des  Fofana et consorts  se seraient précipités dans les librairies pour acheter les pamphlets de Céline afin de  se conforter  dans leur haine des juifs;  ils n’ont pas vraiment besoin de ce type de lecture pour cela.

Les militantes extrémistes du vieux dogme soixante-huitard  féministe,   les harpies  de la lutte contre les inégalités de genre,  déplorent ces derniers jours une autre publication. Celle de la tribune cosignée par  une centaine de personnalités féminines, dont l’essayiste Peggy Sastre ,  la comédienne Catherine Deneuve,  la critique d’art et écrivaine  Catherine Millet,  l’ex actrice X et désormais chroniqueuse Brigitte Lahaie. Elles  sont sorties du bois pour dénoncer dans Le Monde les chiennes de  garde et autres  hystériques du combat contre la domination  et la prédation masculine. Un blasphème insupportable pour une  gauche  féministe qui existe encore médiatiquement mais  de plus en plus marginalisée  - là aussi le principe de réalité triomphe toujours - ,  quelques mois après l’affaire Wenstein et la douteuse  initiative balance ton porc.

Pourtant, si  la tribune qui a fait bondir les complices de Caroline de Haas et de Marlène Schiappa  prônait  « une liberté d’importuner (les femmes), indispensable à la liberté sexuelle », rappelait que si   «le viol est un crime », « la drague insistante ou maladroite n’est pas (pour autant)  un délit, ni la galanterie une agression machiste », elle prenait aussi bien soin de rassurer sur la pureté progressiste des intentions des signataires. Certes, en accusant les féministes autoproclamées de favoriser ce  qu’elles prétendent combattre : « Cette fièvre à envoyer les porcs  à l’abattoir, loin d’aider les femmes à s’autonomiser, sert en réalité les intérêts des ennemis de la liberté sexuelle, des extrémistes religieux, des pires réactionnaires. »

Julien Sanchez, lui,  n’entend pas balancer le porc des assiettes de nos chères têtes blondes fréquentant les cantines scolaires de la ville de Beaucaire (Gard) dont il est maire. Dans un entretien accordé à Valeurs actuelles qui a fait un certain bruit et dont il s’est de nouveau expliqué lors de ses récents passages médiatiques, Julien a redit son refus d’assister « au grand-remplacement du porc à la cantine. » « Parce que je me suis bien rendu-compte que d’année en année, de moins en moins de porc était servi. C’est une viande qui est souvent produite en France et il est également normal que nous choisissions de soutenir l’agriculture française. Ce n’est pas mon rôle d’y renoncer pour des raisons religieuses. J’insiste sur cette raison parce qu’elle me semble suffisante et fondamentale. Mais il y en a d’autres, comme l’apartheid que cela engendrait de fait. Je me suis aperçu que depuis la mise en place de ces repas de substitution par l’ancienne municipalité (en 2008), les enfants musulmans mangeaient sur des tables à part. Sans doute par souci d’organisation, ces enfants étaient séparés des autres et c’est inacceptable là encore, dans une école publique (…). A Beaucaire, ces repas de substitution concernaient 150 enfants sur 600, donc beaucoup de familles, c’est vrai. Mais je suis allé en commission des menus rencontrer les parents et tous ceux qui étaient de bonne foi – y compris les parents musulmans – étaient tout à fait satisfaits de cette décision (…).  En France, en Gaule, on mange du sanglier depuis toujours, comme illustré dans Astérix ! »

Si la renommée d’Astérix n’est plus à faire, celle du Front National est au moins équivalente chez nos compatriotes,  grande popularité de la marque FN qui pèse bien sûr dans le questionnement actuel sur un éventuel changement de nom du FN.  Marine fait entendre des arguments très audibles, très défendables quand elle affirme, ce fut encore le cas dimanche dernier lors d’une conférence de presse à Alençon, dans le cadre de la  huitième étape de sa tournée de Refondation,  qu’il y aurait des avantages tangibles à un changement de nom.

« Si un nom contient une charge qui puisse susciter des craintes, ou (a) une charge émotionnelle qui soit trop forte, a-t-elle dit, et il semblerait que ce soit quand même le cas du Front National, alors il ne faut pas hésiter à se donner les moyens de la victoire.»  « Si nous voulons que ce mouvement soit entendu, envisagé comme parti de gouvernement, susceptible de nouer des alliances, alors il faut que ceux qui éventuellement seraient tentés par cette alliance se disent il y a un nouveau mouvement qui tient compte de cette capacité.  Il faut que le FN termine sa mue de parti d’opposition, de contestation en  parti de gouvernement. Nous ne pouvons pas réfléchir en terme de nostalgie. »

« Un parti politique est un outil qui doit servir à arriver au pouvoir. Ce n’est pas une fin en soi ». Et « nous devons non seulement continuer à pointer du doigt les incohérences, les défaillances, les carences de la politique qui est mise en oeuvre aujourd’hui mais nous devons être aussi capables de présenter aux Français les projets qui sont les nôtres ». Toutes choses qu’ont réussi, a souligné la présidente du FN pour s’en féliciter,   les  mouvements de droite nationale actuellement au pouvoir en Pologne, en Hongrie, tandis qu’en Autriche, nos amis  du Parti de la Liberté d’Autriche ( FPÖ) – parti  qui  n’a pas changé de nom depuis sa création en 1955 – faisaient leur entrée à des postes clés dans un gouvernement de coalition.

Marine a souhaité que cette question soit librement débattue, et les réflexions de fond amènent parfois à des révisions. C’est le cas notamment du député Gilbert Collard qui a confié sur LCP mercredi qu’il avait évolué.  « J’étais pour et j’ai changé d’avis. » « J’ai été le premier à dire qu’il fallait changer de nom. Mais maintenant, j’en arrive à me dire que ça ne servirait strictement à rien de changer de nom.  Je pensais que changer de nom favoriserait le processus de dédiabolisation. Et puis je me rends compte que de toute manière, quel que soit notre nom, même si on s’appelait la Baie des anges, on nous stigmatiserait, on nous diaboliserait parce que c’est un instrument dont les partis dits de pouvoir ont besoin pour s’entendre,  pour justifier leur reniement  leur revirement. »

Son collègue sur les bancs de l’Assemblée nationale, Bruno Bilde,  estime pour sa part que la période actuelle ne serait pas la plus propice  pour un chargement de nom du FN. Ajoutons avec Bruno Gollnisch que c’est le programme même défendu par les nationaux, d’opposition frontale à l’idéologie mondialiste, à l’effacement de nos libertés, de notre souveraineté, de notre identité, qui font de nous des  infréquentables aux yeux des  politiciens  lâches et  pusillanimes,  des  figures  du Système et autres  précepteurs d’opinions…

Dans La  Croix, le militant de gauche et  spécialiste es FN  Jean-Yves Camus ne  dit pas foncièrement  autre chose:  « La direction du Front National (?) a l’impression que le nom du parti reste un handicap majeur qui l’empêche de faire une percée électorale. Elle estime aussi que cela lui ouvrira des alliances avec le reste de la droite. Mais il paraît peu probable que cela rende le FN plus éligible à une alliance avec Laurent Wauquiez puisque ses positions sur l’islam, la laïcité, la sécurité ne devraient pas évoluer (…). Dans ce cas, pourquoi en effet changer de nom ? Il ne suffit pas de prendre un nouvel emballage si le fond du discours reste le même. » Et si le fond de notre  discours changeait, si nous renions nos idéaux et nos valeurs,  quelle serait notre raison d’être ?

https://gollnisch.com/2018/01/12/idee-fixe-asterix-semantique/

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