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« Contre nous de la tyrannie... »

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Jean-Yves Le Gallou est le président de la Fondation Polémia. Il nous explique ici le danger que court une société quand elle est fondée sur ce pouvoir des minorités qui, à cause de l'injustice qu'il représente en soi, ne peut mener qu'à la tyrannie d'un système postdémocratique.  Propos recueillis par l'abbé G. de Tanoüarn

Suffit-il d'être minoritaire pour constituer ce que l'on appelle aujourd'hui une minorité ?

Vous avez raison, c'est la question dont il faut partir quand on veut traiter de ce sujet difficile et anxiogène du pouvoir des minorités aujourd'hui. Il ne suffit pas d'être un groupe minoritaire pour constituer une minorité. Il y a des mal-pensants (les catholiques de tradition ou les identitaires par exemple) qui ne seront jamais considérés comme constituant des minorités. Pourquoi ? Parce que pour être une minorité reconnue (avec les facilités judiciaires ou médiatiques que cela confère) il faut aller dans le sens de l'idéologie dominante et du politiquement correct, il faut que les minorités s'inscrivent dans le grand mouvement de déconstruction de la société, ce qui ne va pas sans une mise en cause systématique des majorités. Nous sommes dans une société qui a érigé le changement en dogme. Les minorités que l'on pourrait nommer conservatrices, on insistera certes sur leur caractère minoritaire, mais jamais elles n'auront le statut de minorité, même si certaines associations comme l'Agrif chez les catholiques jouent valeureusement le jeu, en tentant de faire passer les catholiques pour une minorité parmi d'autres, qui comme les autres a des droits. Cela ne peut pas fonctionner tant que les cathos continueront à tenir des positions conservatrices sur les sujets sociétaux. Ce n'est pas compatible !

Y a-t-il des minorités dignes de ce nom sans le pouvoir des juges ? Sur quoi s'appuie-t-il ?

La mise en place du pouvoir des minorités a eu une forme judiciaire. La fameuse loi Pleven de juillet 1972 a créé un séisme procédural en donnant des droits à des minorités érigées en associations, au titre de la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie. Avant la loi Pleven, le parquet pouvait engager des actions pour faire respecter telle minorité discriminée. La loi Pleven a donné le droit d'engager des actions judiciaires en faveur des minorités à des associations existant depuis plus de cinq ans et dont les statuts comportent ce genre de finalité. De ce fait, un certain nombre d'associations déjà existantes, ainsi que des associations récemment créées, ont reçu une sorte de statut semi-public, avec des subventions publiques, provenant de tous les niveaux, généraux ou locaux. L'argent public crée le statut public, et le statut public implique une reconnaissance médiatique que l'on peut constater dans telle association homosexualiste ou dans le CCIF, le Collectif contre l'islamophobie en France.

Les juges invoquent souvent l'État de droit : de quoi s'agit-il ?

Il y a la signification traditionnelle de cette expression qui est éminemment positive en ce qu'elle suppose que dans un pays où règne l'État de droit, pour un même délit, on doit juger de manière égale des personnes différentes (plus ou moins puissantes socialement par exemple). Par ailleurs, dans l'État de droit, au sens traditionnel, on doit toujours interpréter de manière restrictive les lois répressives. Mais cette expression a pris aujourd'hui un autre sens. L'État de droit aujourd'hui c'est la reconnaissance d'un pouvoir des juges pour interpréter la loi en fonction de considérations juridiques très générales, au service finalement du politiquement correct. Les décisions sont rendues par le Conseil d'Etat, par les tribunaux administratifs ou par la Cour de cassation ou les cours d'appel des tribunaux de grande instance. Un exemple récent est la relaxe de Cédric Herrou, un militant anarchiste, qui a aidé quelque 150 migrants illégaux à passer la frontière italienne. On a jugé qu'il appliquait un « principe de fraternité » qui n'est pas explicitement dans la loi mais qui est présenté comme participant de l'esprit de la loi. Cédric, d'après les juges, ne peut pas être condamné pour un acte de fraternité. Il est vrai que la fraternité est un principe constitutionnel, mais à son sujet rien n'est précisé dans le droit. La précision va dans le sens de la correctness. En revanche, l'action des identitaires dans les Alpes visant à dissuader les migrants illégaux aurait pu être envisagée comme un acte de défense de la souveraineté nationale. Pas du tout ! Ils ont pris le maximum pour délit de substitution de personnes privées à la puissance étatique. On aurait pu argumenter en insistant sur le caractère unique et symbolique de cet acte, pour stopper l'immigration sauvage, d'autant que quantitativement 70 % des Français trouvent qu'il y a trop d'immigrés en France. Mais ce qui compte, ce n'est pas la majorité numérique des citoyens, c'est l'idéologie libérale libertaire et le politiquement correct. On défendra toujours, dans ce nouvel « État de droit » la minorité étrangère plutôt que les citoyens français, les musulmans plutôt que les catholiques ou même si vous voulez les vegan plutôt que les carnivores. Ce qui est attaqué c'est ce qui a rapport à une lignée, ethnique, religieuse ou culturelle, ou, à travers la sexuation, ce qui est au principe de cette lignée..

Vous évoquez le pouvoir des juges. Mais y aurait-il des minorités sans le pouvoir des médias ?

On constate effectivement une connivence entre les minorités, les juges et les médias, un triangle de pouvoir, animé par l'idéologie de la déconstruction, dont la cible est chaque fois la majorité. C'est le sens du combat que nous menons contre les bobards de presse. L'idéologie a deux bras judiciaire et médiatique.

Quelles sont les minorités aujourd'hui ? Comment peut-on dire que les femmes constituent une minorité ?

Au sens démographique, bien sûr les femmes ne constituent pas une minorité, puisqu'il y a plus de femmes que d'hommes. Mais c'est vrai qu'une minorité féministe a pris la parole et d'une certaine façon le pouvoir parce que cette minorité aujourd'hui parle au nom de toutes les femmes, soi-disant opprimées par un pouvoir patriarcal. On est bien dans l'idéologie de la déconstruction, qui consiste à attaquer tout ce qui faisait structure dans le vieux monde. Dans cette perspective, d'ailleurs, vous noterez que des féministes emblématiques comme Caroline De Haas, défendent le port du voile, avec tout ce que cela signifie d'obligation sociale pour les femmes d'origine musulmane. Dans ce cas précis, il n'y a plus de liberté des femmes. Le but est toujours d'abord de déconstruire la civilisation européenne et chrétienne. Ainsi récemment des femmes identitaires avaient décidé de promouvoir un autre féminisme que le féminisme déconstructeur. Elles ont manifesté en agitant des pancartes qui indiquaient que 52 % des viols à Paris étaient le fait d'étrangers (je ne parle pas ici des immigrés de deuxième génération). Les organisatrices de la manifestation ne leur ont pas donné le droit de manifester avec ce simple chiffre. En tant que féministes elles entendent bien représenter une minorité, devant converger avec les autres minorités, celle des migrants en est une. J'ajoute qu'il s'agit aussi pour les militantes, parce que cette lutte n'est pas désintéressée, d'obtenir des postes à tous les niveaux, quitte, comme en politique, à recourir aux quotas.

Les homosexuels ?

Ils sont évidemment minoritaires dans la société, mais ce n'est pas cela qui compte, c'est plutôt la petite minorité qui parmi eux, a pris la parole et le pouvoir. Il y a me semble-t-il quelque chose de profondément contestable dans la manière dont cette petite minorité parmi eux a déplacé du privé dans le public des tendances et des comportements qui, en soi, tiennent à la vie et à la liberté de chacun. Il y a sans doute aussi des réseaux d'entraide et de pouvoir parmi les homosexuels, un peu comme Frédéric Martel dans Sodoma a montré que c'était le cas au Vatican par exemple.

Les végans ?

Le véganisme ou végétalisme intégral est en train d'appliquer cette stratégie. Ils sont soutenus financièrement par George Soros et des fondations publiques. Ils ont pour eux les subventions, les médias et les juges (indulgents pour ceux qui attaquent les boucheries).

Et l'islamisme ?

C'est exactement le même dispositif : le développement de l'islam politique en France passe par des mosquées et des associations, tout cela financé par de l'argent public. J'entends d'abord l'argent public français les maires, en quête de réélection, subventionnent grassement associations et mosquées ou donnent des baux emphytéotiques qui facilitent l'implantation ici ou là de recteurs proches des Frères musulmans. Mais il y a aussi, de façon plus abondante, l'argent public venant des pays musulmans, qataris, saoudiens, marocains, algériens. En ce moment, leur but, avec l'islamophobie, est de reprendre, autour de la critique impossible d'une religion, toute la thématique de la loi Pleven.

Ce pouvoir des minorités n'est-il pas contraire à la démocratie ?

Nous sommes dans une société postdémocratique, où les minorités ont le pouvoir de contrôler l'offre politique, ce qui s'est passé manifestement lors de la dernière élection présidentielle où l'on a fabriqué très rapidement un crédible porte-parole progressiste des minorités. À commencer par la minorité des très riches.

Quelle est la différence entre les lobbies et les minorités ?

Les lobbies sont à la fois ceux des minorités et ceux des intérêts financiers. Entre eux, existe une sorte de partenariat, les lobbies financiers profitant de la protection des lobbies idéologiques et les finançant en retour.

monde&vie 5 décembre 2019

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