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Le reconfinement : brutal, injuste, infantilisant, kafkaïen et amateuriste

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par Laurent Herblay (son site)

Heureusement pour lui que les Français se sont convaincus de la nécessité de ce second confinement. Car sans cela, il y a fort à parier que la gestion effarante du gouvernement aurait pu entrainer une véritable révolte de la population contre ce gouvernement qui démontre une nouvelle fois toutes les lacunes de cette équipe, autoritaire, profondément inégalitaire, et bien peu professionnelle.

Ni la santé, ni l’économie, ni la liberté

Bien sûr, l’augmentation du nombre de morts et des personnes hospitalisées et en réanimation justifie sans doute que des mesures fortes aient été prises pour contenir l’épidémie. Mais le confinement à la Française n’était probablement pas la seule option disponible, comme le simple tour d’horizon des autres pays européens le démontre. Pire, comment ne pas incriminer le gouvernement pour l’échec de sa stratégie de test, le moyen clé de la réussite d’autres pays  ? En effet, si les résultats des tests étaient arrivés immédiatement, alors, il aurait été possible de « tester, tracer, isoler  » et probablement de fortement réduire l’ampleur de cette seconde vague. A posteriori, il semble que ce gouvernement se soit satisfait de la hausse de la capacité de tests sans même s’assurer que les délais de traitement seraient suffisamment courts. Pourtant, le temps n’a pas manqué pour s’en assurer.

Il en va de même pour les capacités d’accueil des hôpitaux. La promesse estivale d’Olivier Véran de passer à 12 000 lits de réanimation n’a pas été tenue, malgré l’augmentation régulière de leur nombre, alors que d’autres pays ont montré qu’il est possible d’anticiper davantage, avec des hôpitaux de campagne… Les tests et l’augmentation du nombre de lits de réanimation sont deux échecs effarants de ce gouvernement étant donné qu’il y a eu du temps pour s’organiser, et que cette seconde vague était attendue, même si son accélération a été plus forte qu’anticipé. Et là encore, le gouvernement avait le temps de prévoir plusieurs scénarios et s’organiser en conséquent. Faute de l’avoir fait, on peut se demander s’il n’a pas réagi en mode panique, imposant un couvre-feu mi octobre, et lui ajoutant un vrai reconfinement deux semaines plus tard. Le pilotage de la crise semble se faire à très courte vue.

Bien sûr, Macron a mis en place des aides adaptées, comme le chômage partiel, et certains ajustements au confinement sont pertinents. En l’absence de dangerosité pour les enfants, et étant donné l’impact de leur confinement sur leur apprentissage et pour les parents qui les gardent, il a choisi de garder les crèches et les écoles ouvertes, ne fermant que les établissements d’éducation supérieure, des foyers majeurs de contamination à la rentrée. Même si ces deux points positifs sont importants, les autres modalités du reconfinement oscillent entre arbitraire révoltantprocédures ubuesques et amateurisme confondant. La semaine dernière, alors que Merkel et Johnson ont laissé cinq jours au pays entre annonce du confinement et mise en place, Macron n’a donné que 24 heures  !

Annoncer mercredi soir aux restaurateurs qu’ils n’ont que le lendemain midi pour écouler leur marchandise en salle est révoltant et extraordinairement irrespectueux. Seule une minorité peut faire de la vente à emporter. Combien de nourriture a-t-elle encore été gâchée du fait de cette annonce intempestive ? Et comme au printemps, le choix des commerces dits essentiels pose question. Pourquoi laisser ouverts des hypermarchés où plus de 10 000 clients peuvent passer en une journée, avec toutes les possibilités de contamination que cela implique, et fermer de petits commerces où ne passent que quelques clients par jour ? L’arbitraire de ce confinement est d’autant plus choquant quand on constate qui va gagner (les grandes enseignes, Amazon ou Deliveroo) et qui va perdre (les petits commerces, et notamment les restaurateurs, déjà très éprouvés par le premier confinement).

Bien sûr, le gouvernement propose un crédit d’impôt pour les bailleurs qui abandonnent au moins un mois de loyer, et de nouvelles discussions ont été lancées entre foncières de centres commerciaux et fédérations d’enseignes, après le sermon de Bruno Le Maire mercredi. Mais plusieurs choses posent problème. D’abord, le mécanisme du ministre n’a rien d’automatique et dépend du bon vouloir des bailleurs. Et pour rappel, les concertations du printemps n’avaient abouti à rien. Ici encore, il est navrant que le gouvernement n’ait pas davantage anticipé, se contentant de réagir à l’apparition des problèmes, alors même qu’il s’agit du deuxième confinement. Le sujet aurait déjà du être traité au début du printemps et en sept mois, Bercy n’a été capable que de produire un mécanisme optionnel. Un peu court pour des petits commerçants et restaurateurs, véritables sacrifiés de ce reconfinement.

Plus globalement, tout ceci pose la question de la méthode du gouvernement. Jean Castex s’était présenté comme un homme de dialogue et de concertation. Pour le coup, sur ce second confinement, qui devait être une hypothèse sur laquelle travailler cet été et à la rentrée, on voit que ce ne sont que des postures. Les mesures tombent d’en haut, en réaction, parfois panique, aux failles des décisions précédentes, trahissant le manque criant de concertation en amont. La tragi-comédie de la fermeture des librairies, suivi de l’annonce de la fermeture des rayons livres des grandes surfaces et de la FNAC, suivie par l’annonce du paiement par l’Etat des frais de livraisons de livres par les libraires révèle une nouvelle fois l’incapacité du gouvernement à anticiper, alors même qu’il s’agit du second confinement !

Autre couac : l’annonce par Gabriel Attal d’un couvre-feu à Paris, tout de suite infirmée par Matignon. Puis, la majorité, faute de mobilisation interne, s’est retrouvée minoritaire à l’Assemblée pour prolonger l’état d’urgence à sa guise, provoquant une colère bien peu démocratique d’Olivier Véran, illustrant la perte de sang froid du gouvernement. Au final, c’est toute la gestion du gouvernement qui est en question, avec ses procédures kafkaïennes, qui s’empilent les unes aux autres, telles ces attestations que le reste de l’Europe ne semble pas nous envier. Ne créent-elles pas un climat de méfiance, pour ne pas dire de défiance, auquel la majorité ne semble vouloir répondre que par la sanction autoritaire, tel ce projet de contrôle plus étroit des cas positifs avec des amendes allant jusqu’à 10 000 euros.

Le hiatus entre les tâtonnements ou les mensonges du gouvernement et la dureté des mesures par rapport aux autres pays reflète l’infantilisation des citoyens. Ne valait-il pas mieux assurer le service public, anticiper et réagir vite, en étant transparent et honnête ? Cela nous aurait permis de compter sur le civisme des citoyens. Et cela aurait probablement évité à notre pays de cumuler mauvais bilan sanitaire, mauvais bilan économique et une remise en cause très forte de nos libertés.

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