C’était un mercredi soir du mois de janvier. Le métro de la ligne 7 était presque vide. Habitant dans un quartier bien fréquenté, je dis à mon copain qu’il était inutile de me ramener jusqu’à chez moi, il ne pourrait rien m’arriver. Je descendis à ma station, il n’y avait personne à l’horizon. Une fois dans l’escalator, je me retournai et vis un Maghrébin de vingt-cinq ans – à peu près – en bas des marches. Instantanément, je me souvins qu’il était sorti du wagon voyant que je rentrai seule chez moi.
Après m’avoir insultée et m’avoir fait culpabiliser de porter un vêtement en cuir, le jeune homme me toucha et insista pour que je m’occupe de lui, tout cela dans un très mauvais français. Une fois arrivés au rez-de-chaussée, l’agresseur vit un agent de la RATP, se décolla de moi et prit la fuite. Avec des mots apaisants, l’agent me rassura et m’exhorta à faire attention les prochaines fois… Depuis un mois, me dit-il, « on compte dix agressions sexuelles sur cette ligne […] ce sont toujours les mêmes ».
Quelques jours après, je publiai un tweet dénonçant l’ironie des affiches contre le harcèlement sexuel produites par la mairie de Bordeaux. D’après elles, sifflements, mains aux fesses et regards insistants seraient l’affaire d’hommes blancs, trentenaires, CSP+. Mon tweet décrivait le décalage entre l’origine ethnique de mon agresseur et ces affiches qui sont à mille lieues de la réalité. Après plusieurs signalements, Twitter jugea bon de bloquer mon compte et de supprimer mon tweet. La raison était sans équivoque : il ne fallait pas insinuer que mon agresseur était maghrébin. Mon propos allait à l’encontre des règles de Twitter puisque, selon les commandements des sacro-saints GAFA, il stigmatiserait une communauté.
« Ne généralise pas, tous les agresseurs ne sont pas maghrébins », m’a-t-on répondu. Certes, mais qui change de trottoir à la vue d’un homme en trench, mallette à la main et cheveux peignés, hormis, sans doute, Alice Coffin ? Mon propos ne visait pas à disculper les hommes blancs ayant commis des agressions mais à montrer la réalité : des étrangers peuvent, eux aussi, être les auteurs d’agressions sexuelles. Cette vérité fait peut-être mal à entendre pour les progressistes, les féministes, les cosmopolites qui se noient dans leurs certitudes et, avec un sourire malicieux, mettent sur la sellette l’homme blanc. Réfuter la réalité pour mieux servir leur idéologie utopique, tel est leur mantra qui, à bien des égards, dessert les victimes et donne du bon grain aux bourreaux.
Je n’ai rien à ajouter sur notre siècle orwellien où la liberté d’expression se disloque et où les langues peinent à se délier. Je souhaite, par ce papier, faire part d’un paradoxe qui nous est contemporain, à savoir condamner l’agression tout en fermant les yeux sur l’agresseur (sauf si celui-ci est un « Caucasien »). Mon tweet a eu beaucoup de visibilité sur Twitter, et pourtant, je n’ai reçu aucun message de soutien de féministes, si ce n’est des insultes. L’égalité des sexes, oui, défendent-elles, mais l’égalité face à la justice, c’est non : il ne faut pas participer à la nébuleuse raciste.
À l’heure où Camélia Jordana fustige les hommes blancs d’être les responsables de tous les maux du monde, à l’heure où Alice Coffin défend sans vergogne la privation, pour les hommes, de leur oxygène (Le Génie lesbien), à l’heure où Marlène Schiappa, à propos des certificats de virginité, pointe du doigt les évangéliques, aucune féministe ne se lève contre la loi du silence qui, elle, fait de vraies victimes. L’heure est au choix : se battre contre le patriarcat blanc ou ouvrir les yeux sur l’immigration incontrôlée qui amène avec elle des hommes décivilisés et arriérés en matière de droits des femmes. Se décider, sinon la réalité nous rattrapera.
Adélaïde Barba