Extrait d’une tribune de Jean-Loup Bonnamy dans le dernier numéro de la Nef (intégrale ici). La partie que nous reproduisons reflète assez bien la situation :
« 73ème.
Telle est notre exécrable position dans le classement des pays au regard de leur gestion de la crise du Covid-19 publié par l’institut australien Lowy. Triste contre-performance pour la sixième puissance mondiale. Et le journal allemand Die Zeit qualifiait la France confinée « d’Absurdistan ». L’erreur de la France a été d’axer toute sa stratégie sur une approche punitive et restrictive (confinement, couvre-feu, fermeture des bars et restaurants…) destinée à faire baisser la circulation du virus.
Or, cette logique pose deux graves problèmes. D’une part, le remède pourrait être pire que le mal. Les conséquences économiques, sociales, psychologiques risquent de causer plus de dégâts que le Covid-19. Ainsi on justifie les restrictions par la nécessité de sauver l’hôpital. Mais les effets économiques du confinement menacent notre système hospitalier. En effet, c’est l’activité économique qui, grâce à des impôts et à des cotisations, finance notre système hospitalier. Si on contracte l’activité, il y aura moins de rentrées fiscales et sociales et donc moins d’hôpitaux, moins de lits, moins de respirateurs avec des soignants moins nombreux et moins bien payés !
D’autre part, rien ne prouve l’efficacité sanitaire du confinement. Taïwan n’a pas confiné et n’a eu que sept morts. L’Argentine et le Pérou ont opté pour des confinements très longs et très durs, mais affichent un nombre de morts record. La Suède, sans confinement ni couvre-feu, n’a pas plus de morts par habitant que la France : les deux pays ont connu le même recul de l’épidémie à l’été 2020 puis le même rebond. Le 29 janvier, le Président Macron décidait de ne pas reconfiner. Trois semaines plus tard, les cas de Covid étaient toujours en baisse.
Le virus est un phénomène naturel, il évolue en partie indépendamment des efforts humains. Sa circulation est influencée par des facteurs sur lesquels l’action humaine n’a pas de prise (climat, degré d’immunité de la population…), voire par des facteurs qui échappent à notre compréhension. La stratégie du tout-restrictif n’est donc peut-être pas optimale.
En plus de cela, le conformisme et les obsessions réglementaires de l’administration nous ont rendus incapables de réagir avec rapidité, pragmatisme et efficacité à la crise. Ainsi, durant le premier confinement, nous avons entendu dire à longueur de journée que nous manquions de place dans les hôpitaux. C’était hélas tout à fait vrai. Pourtant, les cliniques privées proposaient des chambres pour accueillir des patients. Mais, fin mars, au bout de quinze jours de confinement, l’offre n’était toujours pas saisie par le ministère de la Santé, dont la technostructure méprise les cliniques privées. Sur les réseaux sociaux, certains infirmiers en cliniques privées déclaraient même être au chômage partiel tandis que leurs établissements étaient déserts. Le contribuable a payé des TGV pour évacuer des malades à l’autre bout du pays alors que des cliniques vides étaient disponibles à quelques centaines de mètres. Nous vivons donc dans une situation ubuesque où l’État a imposé des mesures coûteuses et à l’efficacité douteuse mais n’a pas été en mesure de fournir rapidement ce qui marche (lits supplémentaires, tests, vaccins…). »