Le vendredi 12 mars 2021, les étudiants de Sciences Po Strasbourg étaient appelés à venir voter pour choisir le nom de leur parrain de promotion, un usage courant pour nombre d’écoles d’enseignement supérieur. Ce choix, dans le cas de cet IEP, concerne les quatre années à venir. Les étudiants de 1re année ont placé Samuel Paty parmi les qualifiés pour le tour suivant. Un choix qui ne surprend pas mais qui doit être salué. Sciences Po n’étant guère encline à développer un vivier d’opposants à l’idéologie au pouvoir, il n’est pas anormal que les étudiants, pour beaucoup futurs cadres des différents pouvoirs du système, médiatique, politique, éducatif ou culturel, suivent ce que ces pouvoirs ont fait mine de vouloir faire : rendre hommage à Samuel Paty.
Le choisir est néanmoins un geste fort : Samuel Paty est ce professeur d’histoire-géographie qui a été assassiné et décapité par un musulman islamiste terroriste tchétchène le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines. Le terroriste, Abdoullakh Anzorov, l’a tué à proximité du collège où il enseignait, à la veille des vacances de la Toussaint. Un meurtre qui a provoqué une vive indignation. A la rentrée, l’exécutif avait mimé un vague hommage, vite transformé en une pantalonnade.
Reste que le professeur sauvagement assassiné par un musulman âgé de 18 ans, ayant bénéficié du statut de réfugié accordé à ses parents avant sa majorité, est devenu un symbole fort de la liberté d’expression, en particulier au sein de la jeunesse étudiante, du moins de ses pans non encore pollués par les théories indigénistes et racistes de gauche radicale. Des étudiants qui, du fait de leur jeune âge, ont encore en mémoire leurs professeurs de collège et de lycée, le relationnel, la proximité humaine parfois.
Or, le nom de Samuel Paty, bien qu’élu par les étudiants de 1re année, a été retiré de la liste des candidats du 2e tour sur décision de la direction de l’école.
L’affaire a été révélée par la section strasbourgeoise de l’Union nationale inter-universitaire (UNI), syndicat étudiant de droite, les autres étant demeurés bien silencieux. Dans son communiqué, l’UNI parle de « la colère au sein de la promotion » et indique que ce retrait montre « la manière dont l’idéologie et les militants d’extrême gauche font la loi et n’hésitent plus à fouler du pied la mémoire d’un martyr de la liberté ». De manière symbolique et pacifiste, les militants locaux de l’UNI ont rebaptisé le principal amphithéâtre de Sciences Po Strasbourg du nom de Samuel Paty.
Ce retrait, s’agit-il d’une bourde, de censure ou de peur ? Un peu de tout cela sans doute. La direction préfère peut-être éviter ce qu’elle estimerait être une provocation vis-à-vis des musulmans ? Officiellement, la direction a retenu cinq noms « dans un but de parité ». Ce sont cinq noms de femmes. Exit les hommes. Dont Samuel Paty. Ce qu’elle ne dit pas, c’est qu’elle a changé les règles du scrutin entre les deux tours. Que craint Sciences Po Strasbourg, sinon l’islam ? La promotion s’appelle finalement « Gisèle Halimi ».
Paul Vermeulen
Article paru dans Présent daté du 22 mars 2021