Le 27 avril, la Commission européenne présentait sa proposition de stratégie pour renvoyer chez eux les immigrants illégaux qui n’ont pas droit à l’asile. Le Grec Margarítis Schinás, « vice-président de la Commission européenne chargé des Migrations et de la promotion du mode de vie européen », clamait fièrement sur Twitter : « L’Europe restera une destination d’asile pour ceux qui fuient les persécutions et la guerre. Toutefois, les personnes qui n’ont pas le droit de rester devront être renvoyées dans leur pays d’origine. Ne pas les renvoyer nuit à la crédibilité de notre système et nous empêche de protéger ceux qui en ont besoin. »
Faut-il y voir un revirement de Bruxelles sur les questions migratoires après des années d’immigrationnisme aveugle et de combat acharné contre les mesures efficaces prises par la Hongrie pour défendre sa portion de la frontière extérieure de l’espace Schengen ? Malheureusement, la réponse est non. Certes, la Commission prend acte du fait que les immigrants illégaux (pudiquement appelés « migrants », bien entendu) doivent être plus massivement renvoyés chez eux une fois déboutés du droit d’asile. Schinás a cité les chiffres de 2019 : pour un demi-million d’ordres de quitter leur pays d’accueil européen, seuls 142 000 seraient effectivement partis. Pour quelle destination ? Le Commissaire ne le précise pas, mais l’UE sans frontières permet toutes les suppositions.
Néanmoins, la Commission propose uniquement un système européen coordonné de « retour volontaire et de réintégration ». Les retours volontaires seraient, selon les pontes bruxellois, plus efficaces que les rapatriements forcés. Cette stratégie visant à inciter financièrement les « migrants » qui voudraient bien accepter de quitter le territoire sur lequel ils sont entrés illégalement et à les aider à se réintégrer dans leur pays d’origine s’inscrit dans le cadre du « pacte sur la migration et l’asile » en négociation depuis l’année dernière (voir « Nouveau pacte migratoire de l’UE avec solidarité obligatoire » dans Présent du 25 septembre 2020).
Pendant ce temps, la pression migratoire continue de croître à la faveur de ce laxisme européen qui ne semble pas près de vouloir se terminer et dont les Africains et Moyen-Orientaux sont très conscients. Le 27 avril, le navire Ocean Viking de l’ONG française SOS Méditerranée annonçait avoir récupéré 236 nouveaux « migrants » qui se trouvaient à bord de deux gros canots pneumatiques à 32 milles nautiques du rivage libyen. Le 29 avril aux Canaries, un bateau de la garde côtière espagnole arrivait au port de Los Cristianos, sur l’île de Tenerife, traînant derrière lui une embarcation contenant 24 corps sans vie et trois survivants qui ont dû être hospitalisés. Le week-end précédent, les autorités espagnoles avaient récupéré 123 « migrants » qui tentaient de contourner à la nage, par mauvais temps, la clôture entre le Maroc et l’enclave de Ceuta.
Il est clair que ce n’est pas la « stratégie de retour volontaire et de réintégration » de la Commission européenne qui va dissuader ces gens-là de mettre leurs jours en danger pour tenter de venir rejoindre ceux qui ont déjà réussi la traversée et que l’on ne renvoie que rarement chez eux.
Et même plus, cette stratégie ne peut que constituer une incitation supplémentaire, car le candidat à l’émigration aura l’assurance que, s’il ne réussit pas sa vie chez nous, on le paiera pour rentrer chez lui et s’y réinstaller. Dans tous les cas, à partir du moment où il met le pied sur le continent européen, il est gagnant.
Olivier Bault
Article paru dans Présent daté du 29 avril 2021