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En finir avec le consensus moutonnier

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Il ne semble pas inutile, aux yeux de votre chroniqueur, de revenir sur l'audition parlementaire du 12 janvier. Celle-ci, soulignons-le a permis en effet de reconduire, pour 3 ans, enjambant par conséquent le calendrier électoral, à un poste clef, celui de directeur général de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration. Il s'agit de l'un des personnages les plus clairement immigrationnistes du dispositif étatique hexagonal, en la personne M. Didier Leschi. Venu de l'extrême gauche, admirateur avoué de Henri Krasucki, ce haut fonctionnaire avait été nommé initialement par François Hollande et confirmé sous Macron.

On doit bien s'en persuader. Jamais la coupure entre, d'une part, ce que nous appelons, par habitude, les élites, c’est-à-dire les couches actuellement dirigeantes non-élues, et, d'autre part, le sentiment profond de chacun des peuples européens, certes différents mais à peu près unanimes sur ce point n'a été aussi fort que, ces dernières années et en particulier à propos de l'invasion migratoire qu'ils subissent.

En acceptant le piège d'un consensus prétendument raisonnable dans cette affaire, la classe politique commettrait une faute tragique, la rendant prisonnière de l'immigrationnisme.

Si nous lisons par exemple, l'entretien fort clair, et même [presque] radical, qu'une Valérie Pécresse a donné le 19 janvier à Valeurs actuelles nous recevons le roboratif message selon lequel non seulement "le pacte migratoire européen est complètement à écrire", mais même que l'on doit, à l'avenir, "ne jamais être dans la repentance."(1)⇓

Éric Ciotti a notamment précisé plus concrètement encore le projet en parlant de rétablir le délit de séjour illégal.(2)⇓

Tout cela nous changerait de la Macronie. D'une part les discours présidentiels alternatifs, repentants un jour sur deux, annulent toute notion de fermeté française. D'autre part, et plus encore, ses actes concrets se révèlent constamment favorables à une politique d'accueil des immigrés, constamment présentés comme d'excellents réfugiés, persécutés pour la justice et injustement déboutés du droit d'asile par les [très méchants] européens, polonais, hongrois, grecs, italiens ou lituaniens.

Si Mme Pécresse veut nous convaincre, dès lors, qu'une politique nouvelle, enfin raisonnable et conforme au vœu des électeurs et à l'intérêt du pays, serait suivie… dans le cas où, présente au second tour, elle l'emporterait sur Emmanuel Macron... il semble nécessaire, et même indispensable, qu'elle précise sa position et dénonce clairement les actuelles pratiques consensuelles.

En effet, pour comprendre le fonctionnement consensuel du marécage dans lequel la France patauge, de saisir la manière dont s'est passé le subterfuge de la reconduction dans ses fonctions du Directeur général de l'Office d'immigration.

L'actuel titulaire de la charge a rang de préfet, depuis 2015. Son rôle se révèle en vérité infiniment supérieur à celui d'un ministre. On peut s'en rendre compte tous les jours : sous la cinquième république un membre du gouvernement est essentiellement chargé de communiquer sur les décisions de son administration. À peine pourra-t-il, parfois, et on le qualifiera alors de "grand ministre," faire avancer les dossiers qui dorment dans les placards.

Le devoir d'une opposition vigilante sur la question de l'immigration que gère ainsi cet office typiquement technocratique, ne peut être que de marquer les réserves qu'appelle sa politique. Quiconque a écouté parmi les 76 minutes de l'audition, les 30 premières minutes consacrées à la présentation de l'action menée, a pu comprendre par exemple que l'attention des services ne consiste pas, bien au contraire, à combattre l'immigration illégale mais a lui fournir les moyens de sa régularisation, à l'encourager par la gratuité des soins, à prévoir quatre jours d'éducation républicaine et l'enseignement de quelques rudiments de français. On appelle cela désormais l'intégration, deuxième et véritable mission de l'office.

Il incombait à la commission des lois de passer cette politique au crible des questions.

Or, dès la 36e minute, on a assisté à l'attitude absolument inverse de Guillaume Larrivé. Député LR de l'Yonne et principal représentant de ce qui tient lieu de droite. Non seulement, se dispensant de questionner l'intéressé, il a court-circuité le débat en affirmant "je voterai pour Didier Leschi", mais il a tenu à féliciter ce "fonctionnaire républicain", certainement pas royaliste par conséquent "fonctionnaire qui pense, qui a des idées et qui n'hésite pas à les exprimer". Et quel que soit en fait le résultat des élections, on lui garantissait son maintien…(3)⇓

Seule Mme Emmanuelle Ménard, député de l'Hérault put, à la fin de la séance, exprimer quelques questions divergentes, mais la messe était dite. On allait passer au vote et la reconduction de Leschi fut votée par 24 voix sur 25.

Précisons donc le mécanisme institutionnel :

L'article 13 de la constitution de 1958 prévoit essentiellement en effet que : [alinéa 1] "Le Président de la République signe les ordonnances et les décrets délibérés en Conseil des ministres. [alinéa 2] Il nomme aux emplois civils et militaires de l'État."

L'alinéa suivant établit une première liste d'emplois qui, nonobstant la "signature" du chef de l'État doivent être, en droit, "nommés en Conseil des ministres". Cela va des ambassadeurs aux officiers généraux, aux recteurs d'académies, et aux directeurs des administrations centrales, mais aussi aux autres emplois que détermine une loi organique. La liste peut être ainsi complétée "en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation" [alinéa 5].

Modifié en 2008, sans que d'ailleurs l'opinion ait vraiment perçu l'importance de la réforme, un dernier alinéa dispose désormais que"le pouvoir de nomination du président de la république s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le président de la république ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés." [alinéa 6].

Or la direction de l'Office d'immigration et de d'intégration relève de la liste prévue à l'alinéa 5, et par conséquent de la procédure de l'article 6. En toute objectivité cette réforme qui remonte à Sarkozy tendait à aligner la pratique institutionnelle française sur celle des États-Unis où les nominations, théoriquement présidentielles, de "secrétaires", c'est-à-dire de ministres, mais aussi d'ambassadeurs, etc., sont avalisées par le Congrès, par un vote habituellement bipartisan outre-Atlantique où l'on applique strictement la séparation des pouvoirs et le système des dépouilles lorsque les républicains succèdent aux démocrates.

Sur ce point aussi il faudra clarifier nos institutions.

Si la droite entend vraiment rétablir l'ordre des choses, si elle veut vraiment que "la France reste la France" et reprendre le contrôle, il faudra dans la pratique décharger M. Leschi, désavouer les attitudes telles que celle de M. Larrivé, et entreprendre enfin l'inversion des flux migratoires.

JG Malliarakis  

Apostilles

  1. cf. entretien donné par Valérie Pécresse : "Le pacte migratoire européen est complètement à écrire"
  2. cf. sur CNews le 19 janvier
  3. L'intervention de Guillaume Larrivé est disponible sur le site de l'Assemblée nationale

https://www.insolent.fr/

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