Que faire ? se demandait Lénine. Comment s’en sortir ? semble s’interroger Emmanuel Macron. Car en même temps, le Président sortant, promis en tête de gondole au premier tour de la prochaine élection présidentielle, connaît une forte baisse de popularité. Certes, un seul sondage peut induire en erreur ; mais dix sondages répétant inlassablement la même chose, ça n’est pas rien non plus.
Ainsi, à en croire le site BFM TV de ce lundi 24 janvier, « 37 % des Français se disent satisfaits de son action, contre 41 % il y a un mois. Il s’agit ainsi de la plus grosse baisse depuis mars 2021. “C’est un tournant”, déclare au JDD Frédéric Dabi, directeur général de l’IFOP. » Et le même de poursuivre : « Emmanuel Macron, qui n’a toujours pas officialisé sa candidature, pourra cependant se rassurer en regardant les autres enquêtes d’opinion. Selon notre baromètre des sondages présidentiels Élyséemètre, il est ainsi crédité de 25,3 % des intentions de vote. Un chiffre relativement stable depuis le début de la campagne. Ses deux principales rivales, Valérie Pécresse et Marine Le Pen, sont, elles, toutes les deux aux alentours de 17 %. »
Seulement voilà, la campagne n’a pas véritablement commencé, Emmanuel Macron n’ayant pas encore officiellement annoncé sa candidature. Il serait « dans la dernière ligne droite », à en croire des gazettes assurant qu’il ne s’agirait qu’une question de jours. Et c’est là que se pose la question agitant le microcosme politico-médiatique : Emmanuel Macron doit-il participer aux débats télévisés du premier tour de l’échéance à venir ? Sans surprise, les médias sont à la manœuvre, excipant du fait qu’en 2017, une telle émission avait eu lieu. Mais, il y a cinq ans, François Hollande, Président sortant, ne faisait pas partie du casting ; logique, ayant renoncé à se représenter. C’est toute la différence…
Cette jurisprudence ne tient donc plus vraiment la route. Pis : pour Gaspard Gantzer, ancien conseiller chargé de la communication de François Hollande, interrogé par France Info, ce samedi 22 janvier, ces débats « témoignaient déjà d’une forme d’américanisation de la vie politique française, avec une plus grande place donnée au clash et à la confrontation. Il y a avait eu deux vainqueurs dans ces débats. Tout d’abord, Emmanuel Macron qui avait montré qu’il avait la stature pour faire le job de président de la République. […] Et puis aussi Jean-Luc Mélenchon, qui était assez bas dans les sondages au début des débats et avait progressé jusqu’à près de 20 %. » Tel que chacun sait, la suite des événements en a décidé autrement, pour cause de chute de François Fillon et d’émergence de Marine Le Pen.
On ajoutera qu’à l’époque, le favori est l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy ; ce qui ne lui a pas particulièrement réussi, étant devenu l’homme à abattre en cette foire d’empoigne télévisée. Et c’est précisément cela qu’Emmanuel Macron voudrait manifestement éviter.
Non sans raison, le même Gaspard Gantzer poursuit : « Il n’y a pas d’obligation constitutionnelle ou légale de participer à ces débats, mais on peut imaginer qu’Emmanuel Macron pourra avancer l’argument suivant : je suis Président, le Covid-19 menace, j’ai la présidence française de l’Union européenne et aucun Président sortant ne s’est trouvé dans la même situation. Ce qui est vrai. Mais je pense que ces arguments pèseront peu de poids face à la pression politique et médiatique. » Oui, que faire ?, donc…
Du côté de l’Élysée, de proches conseillers cités par Le Parisien de ce lundi tentent de modérer : « Il ne faut jamais dire jamais, mais les canaux sont multiples, les possibilités médiatiques infinies. » Voilà qui est déjà plus plausible, sachant qu’Emmanuel Macron, Président novateur s’il en est, sait aussi jusqu’à quel point il ne faut pas non plus trop innover. Bref, il est très « emmerdé ». Juste réponse du berger à la bergère ? La vie politique a parfois de ces ironies…