Dans sa grande bonté, le Père de la nation a accordé à son peuple, depuis ce lundi, le droit de ne plus porter le masque dans des lieux clos (sauf dans les transports). Le passe vaccinal a également été « suspendu ». Exit donc la muselière et la laisse. Cette « libération », qui avait été programmée de longue date par le pouvoir hygiéniste, intervient alors même que l’épidémie semble reprendre. Mais le premier tour de la présidentielle est dans moins d’un mois ; il est préférable d’éviter les contrariétés. Et la guerre en Ukraine a, en France, balayé la peur du Covid dès le premier jour de l’invasion du pays par Vladimir Poutine, le 24 février. Depuis, Emmanuel Macron cherche à s’imposer comme l’incontournable interlocuteur de l’agresseur.
L’ukrainisme a remplacé le covidisme dans la valorisation de la stature protectrice du chef de l’Etat. Toute la macronie répète à l’envi que le président n’a d’autre préoccupation que la paix dont il sera l’artisan. Dimanche, Jean-Yves Le Drian, ministre des affaires étrangère, a dénoncé des discussions sur le cessez-le-feu « qui n’avancent pas ». Ce lundi, pourtant, une session de négociations par visioconférence a été annoncée par les Russes et les Ukrainiens. La France est-elle tenue au courant de l’état réel des contacts entre les deux adversaires ? Il ne faudrait pas que la grande mascarade, qui caractérise ce quinquennat depuis ses premiers pas, utilise également la guerre à de médiocres fins électoralistes.
A dire vrai, la posture de Macron est de plus en plus artificielle. Le président se dit habité par les problèmes de l’Europe et du monde. Mais les Français traversent, eux aussi, une crise de civilisation qui ne peut être balayée. L’esquive est ce qui ressort du jeu présidentiel. Aucune idée neuve n’est émise par le candidat ou son entourage. La tactique élyséenne est celle, renouvelée, d’une dépolitisation des enjeux sur fond d’infantilisation des citoyens. La première mesure annoncée par le président-candidat a été, il y a une semaine, la suppression de la redevance télé. La baisse de 15 centimes par litre d’essence, qui interviendra 10 jours avant le premier tour (le 1 er avril) fait partie de ce « plan de résilience » destiné à acheter les mécontentements sans en creuser les causes. La réforme des retraites, qui enterre la réforme à points, s’épargne les questions sur le malaise existentiel qui traverse une partie de la population. Si le candidat Macron avait su, en mai 2016, dénoncer la « démocratie confisquée » et « l’entre soi de la vie politique », le président-monarque n’a fait qu’accentuer le divorce entre ceux d’en-haut et ceux d’en-bas, au risque d’alimenter « l’ère des soulèvements » annoncée par Michel Maffesoli. « L’importance de l’invisible est le vrai coeur battant des soulèvements actuels », écrit notamment le sociologue. La Corse qui s’enflamme ces jours-ci en est un symptôme. Mais Macron préfère regarder ailleurs.
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