« Le Blanc, quitte ma ville ! On est chez nous ici ! » La démission de Boris Venon, adjoint au maire divers gauche des Mureaux (Yvelines), a déjà fait couler beaucoup d’encre, depuis le 28 septembre dernier. Responsable de l’habitat et de l’urbanisme, l’élu muriautin jette l’éponge après avoir reçu de nombreuses insultes racistes et homophobes agrémentées de menaces de mort. Derrière cette décision se cache le tragique changement de visage des Mureaux.
Le Grand Remplacement des Mureaux
Sur les bords de la vallée de la Seine, il fut un temps où les vignes fleurissaient autour du bourg médiéval des Mureaux. Grâce au travail des vignerons, le village, qui abritait alors jusqu’à 5.000 âmes, jouissait d’une certaine prospérité. Quelques siècles plus tard, c’est dans le calme du château de Becheville, toujours aux Mureaux, que Stendhal aimait se retirer avant d’écrire Le Rouge et le Noir. À l’aube du XXe siècle, la ville se transforme et accueille un fleuron de l’aviation française. Dans les rues, les enfants en culotte courte courent chercher de l’eau à la pompe du village, au pied d’une statue de la sainte Vierge. Pendant ce temps-là, au début des années 1950, les adultes se retrouvent pour le célèbre cross des Mureaux qui rassemble près de 1.000 compétiteurs à chaque édition. Mais dans les années 1960, cette carte postale si paisible s’assombrit rapidement. Le développement de l’usine Renault de Flins, à seulement six kilomètres du centre-ville, amène une importante main-d’œuvre étrangère.
En près de cinquante ans, la commune des Mureaux change radicalement de visage. Les vignerons laissent place aux étrangers et à leurs descendants. En 2019, l’INSEE recensait ainsi près de 33 % d’immigrés dans cette ville de 33.000 habitants. Dans certains quartiers, comme la Vigne blanche ou les Musiciens, deux cités HLM, le taux d’immigrés dépasse même les 50 %. Pour Laurent Morin, conseiller RN d’Île-de-France et délégué départemental des Yvelines, joint par téléphone, la ville des Mureaux, dirigée par la gauche depuis les années 1940, a subi « une submersion migratoire ». « La commune a atteint un seuil inacceptable d’immigration, constate-t-il. Il y a eu un changement de population, comme dans d’autres villes du département, et aujourd’hui, des professeurs et des élus se retrouvent victimes de racisme anti-blanc et d’agressions », déplore l’élu auprès de Boulevard Voltaire. « Cette vague migratoire entraîne des changements culturels inéluctables. » Aux côtés des deux églises que compte la paroisse des Mureaux se dressent déjà deux mosquées – la mosquée marocaine Tariq Ibn Ziyad, du nom d’un acteur de la conquête musulmane, peut accueillir 1.500 fidèles - et la mosquée algérienne Essalam. S'ajoutent de nombreuses autres salles de prière musulmanes. « Dans cette commune comme dans d’autres du département, on remarque une montée des revendications communautaires dans les écoles ou les piscines. ». Boris Venon abonde dans le même sens et dénonce, lors du conseil municipal, « un repli communautaire ».
Sociologie oblige, Jean-Luc Mélenchon arrive en tête du premier tour de l’élection de 2017 aux Mureaux avec 36,57 % des voix, soit près du double de son score national. Cinq ans plus tard, le leader de La France insoumise est de nouveau largement plébiscité, avec plus de 60 % des suffrages. La commune se distingue également en accordant 5,43 % des votes à la liste de l’Union des démocrates musulmans français lors des européennes de 2019, alors que celle-ci ne rassemble même pas 1 % des voix au niveau national.
L'immigration de masse s’accompagne, comme souvent, d'une hausse de l’insécurité. Au mois de mai 2021, une bande de jeunes du quartier des Musiciens s’en prend violemment aux forces de l’ordre, blessant l’un des policiers. Dans certains quartiers, les trafiquants règnent en maîtres. « Face à cette situation, il y a un phénomène de fuite, s’exaspère Laurent Morin. Des habitants, lassés, décident d’abandonner leur ville, comme Boris Venon. »
En 2020, Emmanuel Macron avait choisi Les Mureaux, qui illustrait selon lui la réussite du vivre ensemble, pour son discours sur le séparatisme. Deux ans plus tard, force est de constater que le chef de l’État a eu tout faux.
Clémence de Longraye