Mais voilà, en coulisses, le parti présidentiel s’emploie à bloquer les mesures les plus évidentes. Illustration emblématique, ce 1er décembre après-midi. Les députés LR bénéficiaient d’une journée d’initiative parlementaire. L’occasion de soumettre deux propositions de lois, comme le rapporte LCP, visant, pour la première, à « assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public » et, pour la seconde, à créer « une juridiction spécialisée dans l’expulsion des étrangers délinquants ». Deux mesures de bon sens, urgentes, minimales, indispensables à qui respecte a minima son pays. Deux mesures venues non pas des méchants et horribles députés RN mais de… LR, héritier de partis de gouvernement qu’on peut accuser de tout, depuis quelques décennies, sauf d’avoir franchi les bornes dans le contrôle de l’immigration. La Macronie ménage LR, vote avec LR dès qu’elle le peut. La géographie politique était idéale, la cause était grave.
Les LR avaient trouvé les mots, ce 1er décembre : « Retrouver une capacité d’expulser, c’est défendre notre cohésion nationale mise à mal. » Ils avaient aussi trouvé le rapporteur du texte : le député LR de Mayotte Mansour Kamardine a expliqué en séance la situation actuelle, aberrante. « Seule une décision de justice spécialement motivée au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger ou une condamnation à une peine d’emprisonnement ferme d’au moins cinq ans, explique-t-il, permettent respectivement au juge et à l’autorité administrative d’éloigner un étranger protégé. »
Autant dire que c’est compliqué, voire impossible. Nos LR resserraient le lit de ce fleuve, avec cependant six raisons d’échapper à l’éloignement, pour les parents d’enfants mineurs, les étrangers vivant en France depuis l’âge de 13 ans, les malades, les mariés avec un Français, les accidentés, etc. Féroce, quoi..
En plaidant pour « une Cour de sûreté de la République » spécialisée dans l’expulsion des étrangers délinquants, le député des Alpes-Maritimes Éric Ciotti, candidat à la présidence de LR, voulait de son côté « lever les obstacles innombrables, procéduraux, qui aujourd’hui brisent l’élan et la volonté de la nation française pour faire respecter ses droits ». De quoi faire l’unanimité ?
Non, car voilà, la Macronie fait du Macron. Du en même temps. « S'il serait faux de réduire la délinquance aux seuls étrangers, il convient de rappeler que la part des étrangers dans la délinquance enregistrée a progressé au cours des dernières années », explique le ministre délégué chargé des Collectivités territoriales Dominique Faure. Vous saisissez la nuance ? Chez Macron, on préfère attendre. Ironiser. « Au fond, c'est un petit peu la primaire des Républicains », lance le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti, toujours désopilant quand il s'agit de protéger le pays. La gauche, elle, attaque, sort les grands mots, accuse LR de fouler aux pieds « les principes fondamentaux du droit », dit le socialiste Hervé Saulignac. Quant à l’écologiste Aurélien Taché, il stigmatise, un bandeau bien serré sur les yeux, « l'antichambre du Rassemblement national ». L’horreur, quoi. Un élu écologiste évoque même « l'odeur âcre d'une droite réactionnaire, xénophobe, populiste ». La gauche reste en panne d’idées mais elle recycle sans vergogne ses vieilles outrances.
Les propositions sont défendues par le RN qui propose, en outre, un référendum « permettant de graver dans la Constitution l'obligation pour un étranger de respecter nos lois sous peine d'expulsion. »
Bilan des courses : la Macronie, main dans la main avec la conjuration NUPES, vote la suppression des deux propositions de loi (120 voix pour la suppression, 61 contre pour la première, 82 voix pour et 41 contre pour la seconde). Oui, leur suppression !
Une manœuvre destructrice, une de plus, signée de l'alliance Macron-Mélenchon, qui n’empêchera pas Darmanin de mimer la sévérité et de gronder à la façon de notre gendarme au théâtre de Guignol. Un théâtre dont Emmanuel Macron tire tranquillement les ficelles.
Marc Baudriller