En commençant notre briefing du matin, ne boudons pas notre plaisir: ce fut une belle demi-finale! Les Bleus ont mérité de défendre leur titre dimanche prochain face à l’Argentine. Le match a été de qualité; l’adversaire marocain valeureux; il s’est même créé des occasions réelles de marquer un but, en fin de première mi-temps. Lloris, le gardien français, a été impeccable – et opportunément aidé, à quelques minutes de la fin, par Konate, placé sur le chemin d’un ballon qui allait tout droit vers le but français. Pour gagner en finale, il faudra hausser le jeu d’un niveau. Parions que cette équipe de France qui gagne en est capable.
Macron: ça plane pour moi!
Il y avait juste un point noir dans ce match. La présence dans les tribunes du Président de la République. D’abord, on redoute que cet homme, qui gâche systématiquement les sujets auxquels il touche, porte la poisse à l’équipe de France. Monsieur le Président, pour une fois que la France gagne, ne pouvez-vous pas vous tenir en dehors?
Surtout, on soulignera le caractère intempestif du déplacement présidentiel. Au passage, on n’entend pas beaucoup les obsédés du dérèglement climatique poser la question d’un déplacement en avion, pour quelques heures, alors que le Président aurait pu marquer son soutien, tout autant, en regardant le matche à l’Elysée. Il faudrait en fait tenir un compte des déplacements à travers la planète du président français – non seulement pour qu’il rende compte aux électeurs français de l’efficacité de ces déplacements permanents; mais aussi que nous ayons un “bilan carbone” concernant un président qui n’arrête pas de faire la leçon aux Français sur leur comportement écologique. Au moment où le gouvernement ne cesse de demander aux Français de consommer moins, le président français n’a jamais autant voyagé….
L’insoutenable légèreté du président français
Et puis, est-ce bien sérieux, sous prétexte de vouloir récupérer un peu de la popularité de l’équipe de France, de, pendant ce temps, se faire représenter, à Bruxelles, au sommet entre l’Union Européenne et l’Asie du Sud-Est, par le chancelier allemand?
Nous soulignions dans notre briefing d’hier, la divergence croissante entre les intérêts français et la politique militaire et diplomatique allemande. Et nous disions que les gouvernants français – et notre classe politique française en général ne semblent pas prendre la mesure de la gravité de la situation. Eh bien, nous en avons une illustration: « Le fait de se remplacer mutuellement en cas d’absence est une pratique du partenariat franco-allemand et témoigne de la proximité et confiance entre les deux pays » expliquait-on à l’Elysée hier. Quelle démonstration, malheureusement, dun décalage du Président avec les grands enjeux du monde!
Nous expliquions hier le contraste entre un président français qui se laisse enivrer par les apparences d’une visite d’Etat aux Etats-Unis alors qu’il suffit au chancelier allemand de publier dans Foreign Affairs pour faire passer ses messages aux Etats-Unis. De même, Emmanuel Macron sera encore dans l’euphorie de la victoire des Bleus et des flatteries afférentes de ses partenaires quand il les retrouve, ce jeudi matin, à Bruxelles, tandis que la partie allemande sera, elle, en “départ lancé”.
Un Conseil européen qui embrasse toutes les causes sauf celle de l’Europe
On apprend, dans le Playbook de Politico ce matin, que le Conseil européen va parler des moyens de contrer le plan américain de lutte contre l’inflation et ses subventions aus entreprises américaines. Ah bon? Parce qu’Emmanuel Macron n’a rien obtenu, lors d’une visite américaine qui devait exprimer une “réponse européenne” au plan américain? Il paraît que le Conseil Européen va aussi servir à “réaffirmer plus que jamais le soutien à l’Ukraine”! Autant dire que l’on ne fera rien pour les peuples européens – puisque le soutien inconsidéré à l’Ukraine est précisément un facteur très aggravant de toutes les politiques mises en place par l’Union Européenne.
En réalité, il ne se décidera rien de bond à Bruxelles Avez-vous vu passer le communiqué du G7 daté du 12 décembre? Un G7 actuellement sous présidence allemande! Onze paragraphes sur dix-huit consacrés à l’Ukraine! Le nom de ce pays y revient comme une incantation, à peu près toutes les deux lignes. On est dans une sorte d’hallucination collective. Les intérêts des sociétés des pays membres du G7? Il n’en esst jamais question! Quand le texte s’arrête de parler d’Ukraine, il se met à parler de lutte contre le changement climatique.
En réalité, notre Macron qui passe son temps dans les avions n’est qu’une caricature des gouvernants occidentaux qui ont, depuis longtemps, “décollé” de leurs réalités nationales respectives. On comprend qu’il est plus agréable de se retrouver plusieurs fois par mois dans l’entre-soi des dirigeants que de devoir affronter la réalité domestique. Pendant qu’Emmanuel Macron voyage, la justice française enquête sur la connivence de ses campagnes présidentielles avec McKinsey. Et puis il y a la réforme des retraites, l’incapacité de l’Education Nationale à chauffer les écoles, l’augmentation de la fréquentation des soupes populaires à travers toute la France, la multiplication des faillites chez les artisans et commerçants, étouffés par la montée des prix de l’énergie….
Au fait, personne ne lui a posé la question: il y retourne, Macron, au Qatar, dimanche, pour la finale?