Tout commence par une interpellation. Sur Twitter, ce 20 juin, James Esses, un thérapeute britannique hostile à la théorie du genre, pour avoir assumé « rejeter le mot cis » et ne « pas souhaiter être appelé ainsi », explique être devenu la cible des activistes trans et avoir reçu une multitude d’insultes. Dès le lendemain, Elon Musk lui apporte son soutien et annonce la possible suspension des utilisateurs qui emploient le vocabulaire trans pour harceler leurs opposants. Du côté des militants de la cause trans et de la bien-pensance, cette déclaration suscite une vague réprobation. Le mot-dièse #CisisNotaSlur (#CisnestPASuneInsulte) devient une tendance sur le réseau social à l’oiseau bleu. De nombreuses voix s’insurgent contre ce possible risque de « censure ». De l’autre, anonymes et personnalités saluent la prise de position courageuse du fondateur de Tesla en faveur de la « réalité ».
Un déni de réalité
Car au-delà de la question de la modération et de la liberté d’expression sur Twitter, cette sortie d’Elon Musk rappelle l’emprise du transactivisme sur le langage. La catégorie « cisgenre », apparue au milieu des années 2010 dans les dictionnaires anglo-saxons et seulement en 2021 Le Robert, remet en cause les fondements même de la biologie. Il n’y a désormais plus d’homme ni de femme, mais des « cisgenres » et des « transgenres ». Pire encore, ce nouveau concept qui ne repose que sur un ressenti et non plus sur la physiologie induit l’idée que l’identité de genre n’est pas éternelle et peut changer à tout moment. Comme le résume J. K. Rowling, régulièrement prise à partie par les militants de la cause LGBT, « "cis" est un langage idéologique signifiant la croyance dans le concept infalsifiable d’identité de genre ». « Vous avez parfaitement le droit de croire en des essences indémontrables qui peuvent correspondre ou non au corps sexué, mais nous autres avons le droit de ne pas être d’accord et de refuser d’adopter votre jargon », ajoute l’auteur de la saga Harry Potter. Genevieve Gluck, militante féministe canadienne, va plus loin. Selon elle, « le terme "cisgenre" valide une fiction qui nuit massivement aux femmes », en les invisibilisant.
Ce n’est pas la première fois que le nouveau lexique trans est pointé du doigt. Il y a un an, déjà, le Planning familial français s’illustrait avec la publication d’un visuel montrant « un homme enceint ». Cette même association avait, par le passé, assumé parler de « personnes ayant un utérus » dans une communication adressée aux jeunes filles. D’autres militants n’hésitent pas à remplacer le mot « femme » par « personne ayant ses règles ». Ces périphrases militantes ne sont pas sans risques. À terme, quand « cisgenre » et « transgenre » auront fini par s’imposer, le mot « femme » sera-t-il voué à être banni de la langue française ? Car comme le prophétisait George Orwell, c’est en forgeant les mots qu’on forge les esprits...