elkraut : « Il doit rester du monde pour la complexité du monde. C’est le temps de l’école. C’est le temps de la lecture patiente de la musique des alexandrins. C’est le temps de l’équation qui donne du fil à retordre. Le temps des premières brasses dans la piscine municipale. Le temps des répétitions hésitantes pour les concerts de fin d’année. Le temps des cartes de géographie et des frises chronologiques. » Ne manque plus que la demi-heure de morale en début de journée scolaire, le tableau noir et les craies blanches et on se croirait revenu au temps de l’école de Marcel Pagnol. D’ailleurs, ce « temps de l’école, c’est celui de la force de l’intelligence, du pouvoir de la nuance, face aux slogans et au propos à l’emporte-pièce. Au fond, l’école doit rester aux antipodes du temps politique que nous vivons et qui m’est sans doute un peu étranger. » Il est un fait que notre homme semble avoir toujours été un peu étranger à sa fonction. Pourtant, assure-t-il, « j’ai servi l’Éducation nationale avec ma sensibilité, mon histoire personnelle, mes engagements de toujours contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations contre les forces obscures et les marchands de haine ».
Bref, ce ministère, sorte de garant du savoir, se change peu à peu en McDonald’s, notre homme n’ayant pas hésité à y entrer en faisant sien le slogan de la maison : « Venez comme vous êtes... » Fortuitement, ce n’est peut-être pas ce que l’on demande à un ministre de l’Éducation nationale.
Parachuté au ministère de l’Éducation nationale par Emmanuel Macron pour donner un signal à la gauche, après le passage de Jean-Michel Blanquer, Pap Ndiaye n’aura que très modérément brillé, c'est le moins qu’on puisse dire, en à peine plus d’un an d’exercice.
La droite lui reprochait ses positions « wokistes » et « indigénistes » ; la gauche, son manque d’entrain à défendre l’école publique. Les directeurs d’école n’étaient guère plus ravis de voir leur ministre de tutelle les abandonner en rase campagne sur l’épineux dossier des abayas, leur enjoignant de déterminer au cas par cas s’il s’agissait ou non d’un vêtement religieux. La bonne blague… Cité par Le Figaro du 21 juillet, le SNUipp-FSU, premier syndicat du primaire, aurait été jusqu’à dire l’indicible : « Blanquer savait au moins de quoi il parlait. »
Pire : ceux qui auraient pu le soutenir le font aujourd’hui tels la corde le pendu. Najat Vallaud-Belkacem, par exemple, qui l’a naguère précédé à la tête du « mammouth ». A l’occasion d’une tribune publiée le même jour dans Le Monde, l’ancienne ministre de l’Éducation nationale affirme : « Je l’avais soutenu, sans illusion excessive sur ses chances de réussite, parce que j’estime l’homme, l’historien, l’intellectuel, le citoyen engagé contre le racisme, l’antisémitisme, les discriminations et donc contre l’extrême droite. Je ne le regrette pas. » Quelques lignes plus loin, après les mamours, le désamour : « N’était-il pas possible, à tout le moins, d’opposer une résistance plus ferme aux attaques absurdes à base de fantasmes sur le wokisme, le décolonialisme, la déconstruction ou l’intersectionnalité dont on sait qu’elles nourrissent, au fond, les combats de l’extrême droite contre le féminisme, la liberté de penser ou l’antiracisme ? » Attaques absurdes ? Pas sûr ! Méritées et efficaces, certainement. Gabriel Attal est prévenu.
Nicolas Gauthier