Emmanuel Macron semblait avoir perdu la main ? Il paraît vouloir la reprendre. Malin comme pas deux, il choisit Le Figaro Magazine, hebdomadaire de la droite conservatrice et libérale, pour livrer sa prochaine feuille de route. Logique : il sait où se nichent de possibles réserves de voix, même si empêché de se représenter à l’élection présidentielle de 2027. Bref, et ce, comme toujours, l’exercice sémantique tient de la haute voltige.
Il avance, puis recule, tout en donnant un aperçu de ses travaux d’Hercule à venir : « Il s’agit de faire nation. » Terme qu’il préfère manifestement à celui de « vivre ensemble », sachant qu’il assure avoir « été élu sur une promesse d’émancipation, de modernisation de la France, d’éclater certains tabous ». Vraiment ? En 2017 et 2022, nous avions surtout cru comprendre qu’il avait été confortablement élu et réélu pour faire barrage à une certaine Marine Le Pen ; ce qui n’est pas exactement la même chose.
Défendre la famille après l’avoir mise à bas ?
D’ici là, Emmanuel Macron entend « remettre de l’autorité démocratique, de l’autorité à l’école, de l’autorité parentale face au délitement de la famille ». Fort bien. Mais, issu de courants politiques, de droite comme de gauche, ayant consciencieusement sapé ces mêmes autorités, est-il forcément l’homme politique le plus qualifié pour les remettre en haut de l’affiche ?
Le pire, c’est que le bougre insiste et persiste dans l’entre-deux. À propos des récentes émeutes ayant mis la France à sac : « Près de 75 % des jeunes déférés à la Justice étaient, soit à l’aide sociale à l’enfance, soit des jeunes de familles monoparentales, sans compter les mineurs non accompagnés. » Et d’affirmer dans la foulée que « nous avons toujours été un pays d’immigration et que nous continuerons de l’être ». Il en va de même de sa vision irénique de l’Europe : « Toute réforme qui nous fait sortir de l’Europe est inefficace, parce que le problème est européen et parce que nous ne sommes pas une île… » Comme la Guyane, qu’il définissait comme telle lors de sa campagne présidentielle de 2017 ?
Mais revenons-en à nos sauvageons. D’un côté, Emmanuel Macron entend mettre en œuvre des « politiques de sanctions », en cas « d’irresponsabilité familiale ». De l’autre, il s’interdit de « supprimer les allocations familiales ». « Je ne veux pas choisir », affirme-t-il une fois de plus, une fois encore. Une fois de trop ?
L’union, oui. Mais sans les autres…
Quoi qu’il en soit, le président de la République affirme détenir la martingale pour remettre un brin d’ordre dans la maison France : « Je vais prendre à la fin du mois d’août une initiative d’ampleur », destinée aux « forces de l’arc républicain pour déterminer des projets sur lesquels cheminer ensemble ». Mais, tel que noté par Le Point de ce 4 août, « l’Élysée montre qu’il entend exclure de cette démarche le Rassemblement national de Marine Le Pen et La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon ». Tiens, donc.
Faire l’union nationale en refusant de parler avec les deux principaux mouvements d’opposition ? Il fallait le faire : Emmanuel Macron l’a fait. En effet, quoi qu’on puisse penser de ces deux partis, ils ont été démocratiquement élus et représentent au Parlement une partie non négligeable de nos compatriotes. Pour tout arranger, les autres formations ne paraissent pas non plus trouver grâce à ses yeux jupitériens : « Les Républicains ne sont pas clairs et les socialistes non plus. » Estime-t-il donc pouvoir faire cette « union nationale » à lui seul ? Entre Emmanuel et Macron ? Le gag, c’est qu’il affirme ensuite : « Je ne crois pas du tout être méprisant. Je ne l’ai jamais été. »
À un tel niveau de méthode Coué, nous ne sommes pas loin de naviguer aux rives de l’auto-hypnose, tel que relevé par Dominique Jamet, l’un des fondateurs de notre site : « Macron veut rencontrer tous les chefs des partis d’opposition, excepté Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Et s’adresser à tous les Français… sauf aux 70 % qui ne veulent plus de lui ? » Il est à croire que oui.