Ils vous avaient peut-être échappé. Cet été, nous vous proposons de lire ou relire les meilleurs articles publiés cette année par BV.
Cet article a été publié le 10/05/2023.
L'épisode de la réforme des retraites ne fut pas un chemin semé de roses pour Emmanuel Macron et son gouvernement. Finalement, grâce aux institutions et à l'usage du 49.3, ils réussirent à passer le cap sans (trop de) dommages. Histoire de reprendre la main, on envoya alors les chevau-légers de la Macronie. Aurore Bergé fut magnifique dans sa défense du drapeau européen au moment où les Français avaient d'autres soucis. Quant à Gabriel Attal, qui était encore ministre des Comptes publics, il s'attaqua à la fraude fiscale, ce qui ne peut que plaire aux Français. On allait voir ce qu'on allait voir...
Comment tenter de reprendre la main après la bataille calamiteuse de la réforme des retraites ? En sortant la grosse cavalerie ou la grosse artillerie. Au choix. Plus le moment de finasser, de faire dans la guerre en dentelles, à moins d'un an des élections européennes. Faut envoyer du lourd. En tentant des manœuvres de diversion.
Commençons par les manœuvres de diversion. D’abord, l’affaire du drapeau. Le drapeau européen : ça va sans dire. L’opération part de l’Assemblée nationale avec la proposition de loi portée par le groupe macroniste. Aurore Bergé y va sabre au clair. Mardi 9 mai, on a débattu quatre heures sur le sujet dans l’Hémicycle. Certes, c’est important, le drapeau. C’est même essentiel. Mais on a bien compris l’idée : si vous êtes contre cette idée lumineuse, c’est que vous êtes contre l’Europe. L’Europe, ou plutôt l’Union européenne, est à prendre dans « son entièreté ». Le package ou rien. On est pour ou on est contre. Si on est pour, on est un progressiste. Si on est contre, c’est qu’on veut le retour au Moyen Âge. Pas moyen de faire autrement. Le manichéisme au service de Machiavel.
Puis, donc, la grosse cavalerie. Le combat contre les groupuscules d’extrême droite. Darmanin veut leur interdire de manifester a priori. C’est un peu limite, au plan stricto sensu du droit, mais qu’importe, on a l’habitude maintenant ! Là aussi, la ficelle est grosse comme une corde de vieux gréement : si, au nom du droit fondamental à manifester, on ose tordre le nez à cette mesure envisagée par le ministre de l’Intérieur, c’est que, forcément, on est complaisant envers cette extrême droite, pour ne pas dire complice. Pas la peine d’avoir lu Machiavel pour comprendre que Darmanin cherche à piéger le Rassemblement national. L’idée, c’est de le pousser au hors-jeu, vu que pour l'instant, il fait apparemment un sans-faute.
Quant à la dernière trouvaille de Gabriel Attal, elle relève des plus belles contre-offensives qu’il nous ait été donné de voir depuis sans doute très longtemps. Après cette satanée réforme des retraites, véritable boulet à traîner dans la tranchée minée du front social, il fallait bien trouver un truc qui fasse « crac boum hue », qui sidère le bon peuple, lui fasse crier « Waouh ! », comme Kate au balcon de Buckingham Palace. Bref, reprendre l’initiative du combat social. Donc, la lutte contre la fraude fiscale des plus riches. La CGT, LFI et consorts voulaient nous faire croire que la Macronie, c’était « salauds de pauvres » ? Eh bien, pas du tout. Magnifique débordement par le flanc gauche : c’est « salauds de riches ! » Haro sur les « ultra-riches », plus exactement. « Une opération de communication », estime le magistrat Charles Prats, bien connu des lecteurs de BV. Non, pas possible ? Au fait, c’est quoi, un « ultra-riche » ?
Ajoutez à cela la très inventive Olivia Grégoire, ministre délégué au Commerce et à tout plein d’autres choses, qui menace de jeter à la vindicte publique les distributeurs qui ne baissent pas leur prix, et ils vont nous faire croire qu’ils vont rétablir le pilori sur la place du village. C’est vieux comme le gibet à Montfaucon, ça plaît toujours au bon peuple, ce genre de spectacle. Plus c’est gros, plus ça passe. Pour longtemps encore ?
Georges Michel
https://www.bvoltaire.fr/le-gouvernement-des-grosses-ficelles/