Jacques Attali vient de publier un article sur la démocratie menacée dans Les Echos et sur son blog.
On ne s’arrêtera pas trop longtemps, sauf pour en rire, sur le mépris de caste que déverse ce texte sur les peuples du monde. En revanche, le texte a un intérêt : laisser percer, au milieu de la logorrhée, l’angoisse du monde dirigeant : la réélection de Donald Trump en 2024, d’une part, et l’arrivée de Marine Le Pen à l’Elysée, en 2027, d’autre part. Ce que nous dit le texte, c’est que, partout en Occident, l’establishment n’a plus de candidat à sortir du chapeau pour empêcher que les peuples se prennent en main !
“La vieillesse est un naufrage” a dit un jour de Gaulle à propos de Pétain. Il faut bien reconnaître que Jacques Attali, en prenant de l’âge, a tendance à se caricaturer lui-même :
Dans de nombreux pays africains, le mot « démocratie » est devenu synonyme de « colonialisme » et bien des pays qui se prétendent en être, comme la République démocratique du Congo, ne sont que des dictatures corrompues. En Asie, très peu de pays en revendiquent même les règles formelles, et quand ils le font, comme en Inde, cela ne les empêche pas de maintenir un impitoyable système de castes, et d’entretenir une guerre civile de plus en plus explicite entre les principales communautés religieuses. (…)
En Europe, une démocratie dévoyée a conduit les électeurs britanniques, victimes de menteurs et de démagogues, à prendre la décision suicidaire de sortir de l’Union européenne, les électeurs italiens à désigner comme Premier ministre une héritière des idées de Mussolini, les électeurs allemands à échanger l’énergie nucléaire contre le charbon…
Blog de Jacques Attali
Les Britanniques seront heureux d’apprendre qu’ils sont des demeurés ; les Italiens qu’ils sont des fascistes ; et les Allemands qu’ils sont tous des bobos écolos. Sans parler des peuples des autres continents : traités avec un mépris assez daté !
Le double cauchemar de Monsieur Attali
En réalité, dans un texte comme celui-ci, on repère assez rapidement les éléments les plus importants pour l’auteur : il y a d’abord la hantise de voir Donald Trump revenir à la Maison Blanche :
Aux États-Unis, pour la deuxième fois depuis sa création, ce pays est au bord de la guerre civile, et s’apprête, si l’on en croît les sondages, à réélire un ancien président qui a ouvertement soutenu une tentative de coup d’État pour empêcher la prise de fonction de son successeur
Blog de Jacques Attali
Cela c’est pour 2024 aux États-Unis. Et puis il y a 2027 en France, où l’on pourrait voir…
….un parti d’extrême-droite, aujourd’hui favori pour gagner les prochaines élections présidentielles et législatives.
Blog de Jacques Attali
Il le dit en passant, mais Jacques Attali se fait peur aussi avec l’AfD faisant un excellent score en Allemagne. De fait, “l’Alternative pour l’Allemagne” est à plus de 20% dans les sondages.
Au bout du compte, Attali est réfugié dans la nostalgie de ses années mitterrandiennes – avec, en particulier, ce moment funeste, 1983, où les dirigeants français ont choisi le “modèle allemand” plutôt que l’inspiration libertarienne anglo-américaine, (avec une politique de changes flottants, qui aurait permis d’être compétitif industriellement face à l’Allemagne et de pouvoir intégrer beaucoup mieux les étrangers au marché du travail).
Jacques Attali ne voit pas que tous les échecs politiques qu’il dénonce et qu’il attribue à des forces “fascisantes” sont en fait le produit des choix faits par une minorité de gens riches et influents, choix validés par les classes moyennes supérieures anxieuses de marquer leur supériorité éducative sur la majorité des électeurs. Ce que j’ai appelé ailleurs, le “fascisme gris” – le fascisme du “pouvoir gris”, dont Attali se veut le penseur.
Personne à sortir du chapeau
La caste a fait les mauvais choix fans les années Mitterrand. Elle les a confirmés dans les années Chirac. Puis elle a commencé à expérimenter l’effet boomerang : crise de 2008, vote du Brexit, élection de Trump….
Là où cela devient intéressant, c’est de constater qu’Attali affirme : “L’empêcher est encore possible”… Comme dirait Arnaud Upinsky dans La tête coupée : si Attali l’affirme, c’est que “c’est exactement le contraire !”
Jusqu’à présent, la caste pouvait toujours imaginer sortir un candidat du chapeau. Songeons à Justin Trudeau ou Emmanuel Macron. Le problème c’est que ces dirigeants encore relativement jeunes seront difficilement remplacés. Ce que nous trahit Jacques Attali, c’est que la classe dirigeante est à présent à court de recrutements, d’idées, de visages sculptés par les communicants pour résister à la poussée populaire.
La caste a pratiqué le matraquage des Gilets Jaunes, l’enfermisme covidien., la fraude anti-Trump, la guerre d’Ukraine. Elle essaie de faire partager la peur du dérèglement climatique et l’écologie punitive qui en découle ; mais tout cela devient difficile à soutenir.
Alors en attendant d’avoir trouvé la parade, pour empêcher que les peuples se prennent en mains, on sort le moulin à prières pour les intérêts de la caste….et à malédictions proférées envers les peuples du monde. Figurez-vous : les peuples réclament la liberté, la prospérité et la paix ! Qu’attend-on pour les enfermer à nouveau ?
Via https://by-jipp.blogspot.com/2023/10/le-cauchemar-de-jacques-attali-et-de-la_3.html#more