Petits tutoriels du droit des étrangers
Spécialistes du droit des étrangers, ces avocats prodiguent des conseils à leur communauté pour profiter des failles et contourner la juridiction française. « Comment obtenir un visa ? », « Je suis salarié chez un particulier, comment me régulariser ? », « Le PACS ou le mariage pour se régulariser », « Je travaille avec les papiers de quelqu’un d’autre »… À ses 46.000 abonnés, Maître Kouassi, avocat au barreau de Paris, comme BV a pu le confirmer, offre ses services pour permettre à des étrangers de présenter un dossier complet en préfecture. Ces conseils sont divers et variés. Dans l’une de ses vidéos, l’avocat parisien appelle les clandestins à la vigilance à l’approche de l’été. « Il y a énormément de contrôles d’identité dans les rames de train. Faites attention à vous », commence-t-il, avant d’encourager les sans-papiers à déposer un dossier de demande de visa en préfecture pour se promener librement sur le territoire le temps de l’instruction et être « intouchables ». Dans un autre extrait, partagé par le lanceur d'alerte Damien Rieu, il développe plusieurs stratégies pour « éviter une obligation de quitter le territoire français ».
Maître Kouassi est loin d’être le seul avocat à se faire une clientèle sur TikTok. Son confrère, Alexis Tordo, également avocat au barreau de Paris, rassemble aujourd’hui plus de 82.000 abonnés. Le jeune et médiatique avocat multiplie les conseils pour faciliter l’obtention d’un visa. Dans l’une de ses vidéos, il dresse ainsi la liste non exhaustive des métiers en tension qui permettent à un recruteur d’embaucher un étranger sans chercher au préalable sur le marché national. Une aubaine pour obtenir un contrat de travail et être ensuite régularisé. Encore plus suivie sur TikTok (146.000 abonnés au compteur), Maître Amele Bentahar ne cesse, elle aussi, de publier de courtes vidéos pour faciliter l’obtention d’un visa. Ouverture d’un Livret A dès l’arrivée en France, PACS ou mariage, conservation des factures, signature d’un contrat de travail… sont autant de moyens qui permettent à un étranger de régulariser sa situation. L’avocat encourage également les étrangers à s’investir dans des associations d’aide aux migrants ou non afin de certifier leur insertion sociale en France.
Cette vulgarisation du droit des étrangers sur les réseaux sociaux est loin d’être une œuvre de bienfaisance. Dans leurs vidéos, largement relayées, ils n’hésitent ainsi pas à faire la promotion de leur travail et à encourager les sans-papiers à solliciter une consultation avec leur cabinet pour les aider au cas par cas. À raison de 150 euros en moyenne par heure de consultation, le business peut se révéler très prospère. Et ce, d’autant plus que ces avocats semblent tous favorables à une plus large immigration. Ils ne cachent ainsi pas leurs motivations politiques. Maître Tordo ainsi que Maître Kouassi profitent de certaines de leurs apparitions sur les réseaux sociaux pour critiquer la politique menée par Gérald Darmanin ou les positions du Rassemblement national sur l’immigration. Maître Bentahar appelle, quant à elle, à « favoriser une immigration réfléchie ».
Escroquerie à la régularisation
Si ces avocats, cités ci-dessus, sont tous bel et bien inscrits au barreau de Paris, le business des sans-papiers peut attirer par ailleurs de nombreux escrocs. Sur les réseaux sociaux, de nombreux comptes d’anonymes, suivis par plusieurs milliers voire parfois plusieurs dizaines de milliers de personnes, se lancent eux aussi dans le conseil aux clandestins, contre rémunération. D'autres développent de véritables réseaux. C’est ainsi que le rédacteur de Politis, titre de presse d’extrême gauche, s’est vu accusé par ses confrères de StreetPress d’avoir arnaqué avec son compagnon Azzedine Jamal, un faux avocat, des dizaines de sans-papiers. Il leur aurait proposé de préparer leur dossier de régularisation contre plusieurs dizaines de milliers d’euros. En septembre, un autre réseau d’escrocs comparaissait devant le tribunal de Bobigny. Il leur était reproché d’avoir monté une filière tentaculaire qui, moyennant plusieurs centaines, voire milliers d’euros, promettait l’obtention d’un titre de séjour. Ils ont été condamnés à 24 mois de prison ferme, dont 18 mois avec sursis.
Clémence de Longraye
https://www.bvoltaire.fr/tuto-pour-obtenir-un-visa-le-business-des-sans-papiers-sur-tiktok/