Depuis des mois notre chronique s'efforce de mieux cerner la nature, les objectifs et les moyens de la menace communiste chinoise. C'est donc avec une sorte de demi-satisfaction, mêlée de regret, qu'elle constate progressivement mais trop lentement cette préoccupation partagée. Elle l'est en effet sinon par tous les acteurs et les décideurs, du moins par ceux dont la mission est de protéger nos concitoyens et de prémunir le pays des nouveaux dangers.
Partagée oui, de plus en plus souvent, mais sans doute pas encore suffisamment documentée ni probablement rattachée à la dimension idéologique du péril.
D'où l'utilité d'une réflexion et d'un suivi.
Disons-le d'emblée : le moteur principal du régime de Pékin n'a pas grand chose à voir avec la culture confucéenne, que le communisme local détruit méthodiquement : il tient au fait de l'héritage marxiste léniniste.
Une chronique publiée par Le Point ce 17 décembre, sous la signature de Jérémy André, relate ainsi l'éveil au danger d'un certain nombre d'administrations dans notre pays. Processus malheureusement quelque peu ralenti : les belles endormies, s'étirent, prolongeant, comme à plaisir, leur endormissement.
Il s'avère, par exemple, d'une manière de plus en plus claire qu'une partie des étudiants chinois continuent de procéder, avec l'encadrement logistique du Parti, et un chantage sur leurs familles, à une observation méthodique de tout ce qui peut servir à un pillage technologique en règle.
Or, trop souvent, les universités, les laboratoires et nos chères têtes d'œufs qui les dirigent refusent de façon assez systématique d'ouvrir les yeux. Comment ? Telle charmante Melle Li, tel amical camarade Wang, serait soupçonné par vous d'espionnage ?
Comment osez-vous ? N'hésitons pas à répondre ici et maintenant à la fameuse apostrophe de l'insupportable pantin nommé Greta Thunberg, alors âgée de 16 ans, invectivant en 2019 l'absurde sommet de l'ONU sur le climat.
Eh bien oui osons. Indiquons ainsi le rôle du China Scholarship Council (CSC). Créé en 1996, cet organisme du ministère communiste de l'Éducation contrôle les échanges universitaires internationaux; Et c'est par lui que l'État supervise l'attribution des bourses aux étudiants se rendant à l’étranger.
En Allemagne, prenant conscience du mécanisme l’université bavaroise Friedrich-Alexander d’Erlangen-Nuremberg, a donc résolu cette année qu'elle suspendait toute collaboration avec les étudiants boursier CSC « afin réduire le risque d’espionnage industriel ».
Au Royaume Uni, une étude récente a identifié plus de 600 doctorants et boursiers du Russell Group, ressortissants de la Chine communiste, étudiant ainsi dans des universités britanniques. Leurs programmes de bourses stipulent que des fonctionnaires chinois seront amenés à « réexaminer l’idéologie politique du candidat » et à lui fournir une éducation appropriée avant son arrivée. Ces étudiants ont ainsi reçu une « formation idéologique » assurée par Parti communiste chinois avant d’entrer au Royaume-Uni.
Dans l'autre sens, si, régulièrement, les départs forcés de fonctionnaires français en poste à Pékin se succèdent c'est bien que nous nous trouvons en présence d'une multiplication des tentatives d'ingérences, de piratages, d'infiltrations et ces chantages que le jargon hérité de l'URSS nomme « kompromats ».
Aux yeux du parti communiste chinois, la plus forte organisation du monde, comptant plus de 90 millions d'encartés, sa force inégalable tient au fait que tous ses membres s'inscrivent dans une fourmilière unique.
Tout visiteur voyageant dans un pays occidental dès lors qu'il se rattache, directement lui-même ou par ses liens de famille à l'organisation, plus encore s'il y postule, est tout simplement sollicité d'observer une pièce, fût-elle pour nous anodine, du puzzle français, britannique ou allemand. Il en rendra compte à son retour.
La difficulté d'une nécessaire protection de nos pays tient en partie à l'évolution de la matière. La tradition occidentale du renseignement porte sur un objet militaire et stratégique. Or, la réalité a évidemment évolué et depuis longtemps. Nous n'en sommes plus au temps du seul Deuxième Bureau de l'armée française protégeant en 1897 les plans du Canon de 75. Nous n'en sommes plus à l'époque de la [première] guerre froide où la DST, fondée en novembre 1944, devait faire la chasse aux seules infiltrations soviétiques. A cet égard, l'évolution des services français, même remaniés en 2008, n'en est probablement qu'à son début.
Il importe de la soutenir par un véritable et lucide courant d'opinion.
JG Malliarakis
https://www.insolent.fr/2023/12/espionnage-tous-azimuts.html