Vincent Trémolet de Villers
Muni d’un microscope, la loi immigration offrira à l’entomologiste de quoi satisfaire sa curiosité. Il y verra un ministre de l’Intérieur venu de la droite trébucher en voulant convertir son camp, une première ministre venue de la gauche cajoler Éric Ciotti et Bruno Retailleau, une majorité déboussolée tiraillée entre des objectifs contradictoires et, comme toujours, Marine Le Pen qui se frotte les mains en attendant une nouvelle récolte. Mais si l’on quitte ce divertissement pour retrouver la réalité de notre pays, le tableau est beaucoup moins réjouissant.
Et l’on se désole du temps perdu. Les effets de la pression migratoire se ressentent désormais à tous les niveaux de la société et dans les moindres détails de la vie quotidienne. Les millions d’étrangers qui vivent paisiblement en France sont eux aussi (et parfois en première ligne) les victimes de cette anarchie insensée que les belles âmes appellent politique de l’accueil. La vérité est que les pouvoirs publics sont complètement désarmés face à un phénomène qui embolise nos services publics, menace la sécurité ordinaire, fragmente la communauté nationale. Nul besoin de savoir le destin de la loi immigration pour tirer un enseignement essentiel : la France est à droite, l’opinion est très largement favorable à une politique migratoire de très grande fermeté et le Parlement ne peut être indéfiniment en décalage avec ces deux évidences. Par le jeu conjugué du Rassemblement national lors de la motion de rejet et des Républicains dans les tractations qui ont suivi, ce texte s’est rapproché un peu des aspirations des Français. Mais tout cela reste de l’ordre du symbole. Il n’y a pas d’alchimiste au Parlement pour transformer le plomb en or.
Avec sous sans cette loi, la France reste dépassée dans sa politique migratoire par le redoutable tandem où roulent à un rythme effrayant les jurisprudences des différentes cours de justice et la logique d’accueil inconditionnel de l’Union européenne. L’épisode politique interminable de ce projet de loi n’est qu’un événement d’apparence. Sur l’immigration, pour reprendre le contrôle, c’est aux Français qu’Emmanuel Macron doit demander leur avis.
Source : Le Figaro 19/12/2023
http://synthesenationale.hautetfort.com/archive/2023/12/19/le-temps-perdu-6476414.html