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Bientôt une guerre de l’OTAN contre la Russie ?

Cela fait presque deux ans que la Russie a attaqué l’Ukraine sans obtenir de décision, mais arrivant à une situation de guerre de position du type de celle qu’ont connue nos grands anciens à partir de 1916. Le ministre de la Défense allemand, Boris Pistorius, avait prévu à la fin de l’année dernière une guerre en Europe dans la décennie. Partant du postulat que l’Ukraine seule ne pourrait vaincre définitivement la Russie, il imaginait que le président Poutine serait prêt à étendre les hostilités dans les pays de l’OTAN. Il est certes plus facile de commencer une guerre que de la finir, mais les Allemands semblent très inquiets de savoir qui pourrait vaincre l’ogre Poutine, et quand et comment.

Ce « prédateur qui ne se contente pas de surgelés mais aime la chair fraîche », d’après le président Zelensky à Davos, a en effet mis son pays en « économie de guerre », un peu comme Hitler à partir de 1934. Les Européens et leurs alliés américains ont, de fait, beaucoup de peine à fournir l’Ukraine en munitions de toutes sortes. « Granat ist Granat und Bombe ist Bombe », dit un vieil adage d’outre-Rhin, et Boris Pistorius, tout comme ses généraux, s’en est souvenu. Combien de temps nos armées seraient-elles en effet capables de durer sans réserves d’hommes, de munitions conventionnelles ? La grande Bundeswehr, première armée d’Europe, serait, comme les autres, vite à court de pièces de rechange et de munitions de toutes sortes. Poutine connaît nos faiblesses et les réticences de l’Occident à « mourir pour Dantzig » ou, plus exactement, Kaliningrad, ancienne Königsberg, ville du philosophe Emmanuel Kant dont tous les petits Allemands se souviennent encore. Planifier une guerre contre la Russie n’est pas une chose nouvelle pour des généraux allemands, même de l’OTAN. Souvenons-nous des Kielmannsegg (1) ou Speide (2) qui quittèrent l’uniforme feldgrau de la Wehrmacht pour endosser celui « gris souris » de la Bundeswehr sous drapeau otanien, et ce, sous les ordres de leurs anciens adversaires américains, souvent admiratifs. En effet, qui d’autre que les Allemands savait mieux se battre contre des Soviétiques ?

Aujourd’hui, la donne a certes changé, mais les préjugés de nos alliés américains ont la « peau dure ». Le scénario envisagé par l’OTAN et par la Bundeswehr d’une guerre contre la Russie pour la maîtrise du corridor de Suwalki entre Kaliningrad, la Pologne et la Lituanie n’aurait que peu de chance de se produire, si la Russie avait été d’emblée vaincue en Ukraine. Elle serait obligée de restituer à cette dernière les 20 % de territoires qu’elle lui a annexés. Les Russes pourraient sentir qu’ils ont le « champ libre » à l’Ouest si l’Occident était incapable d’aider suffisamment les Ukrainiens à les raccompagner chez eux. La planification n’est pas une activité légère, chez les Allemands et dans l’OTAN, mais le fait qu’on l’évoque dans la presse pourrait nous faire croire qu’il y aurait une sorte de manipulation de la part de nos voisins d’outre-Rhin, soucieux de mobiliser tous les Européens face à l’adversaire russe (3). Aujourd’hui, alors qu’il est habituel que les militaires planifient pour envisager tous les scenarii, chez les Allemands, la planification est une culture et rien ne pourrait être laissé au hasard d’une mauvaise décision au niveau international.

Les élections américaines sont à ce sujet une contrainte car, quel qu’en soit le résultat, aucune aide ne pourrait survenir en Europe avant janvier 2025. Ainsi Roosevelt avait-il limité son aide à Churchill avant sa réélection en novembre 1940 alors que ce dernier, en pleine bataille d’Angleterre, cherchait à survivre et à repousser les Italiens en Libye. Les Allemands, qui se souviennent de l’histoire, cherchent à prévenir cette impuissance américaine prévisible en mobilisant sur ce sujet d’une menace russe en Europe leurs alliés européens de l’OTAN. Ils mettent en garde de fait ces mêmes alliés de l’ouest de l’Europe de toute velléité de traiter avec « l’ogre russe » en leur signifiant qu’ils doivent être solidaires face au même ennemi. Alors, que faudrait-il faire en attendant cette triste possibilité ? Sans doute nous mettre nous-mêmes en économie de guerre, faire des réserves de munitions pour l’hiver 2025 quand d’autres font des réserves de pétrole, marquer la solidarité européenne indéfectible face aux Russes ? Mais en attendant, chers concitoyens, dormez en paix, « le soldat allemand veillera sur votre sécurité ».

(1) Johann Adolf Friedrich William Graf (comte) de Kielmannsegg (1906–2006), colonel breveté ancien planificateur au sein du commandement de la Wehrmacht et commandant des forces alliées en Centre-Europe de 1965 à 1967.
(2) Ancien chef d’état-major de Rommel en France occupée et commandant des forces terrestres de l’OTAN en Europe de 1957 à 1959.
(3) Alors que le Bundestag vient de ne ne pas accorder au gouvernement fédéral l’autorisation de livrer aux Ukrainiens les missiles Taurus (l’équivalent des missiles français SCALP) capables depuis l’Ukraine de frapper des objectifs jusqu’aux environs de Moscou.

Hamilcar

https://www.bvoltaire.fr/bientot-une-guerre-de-lotan-contre-la-russie/

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