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Déficit de l’État : heureusement que nous sommes gouvernés par des Mozart de la finance !

Vertigineux, abyssal, sans précédent : on va manquer de mots pour qualifier le déficit de l’État pour l’année 2023. Thomas Cazenave, adjoint au grand argentier de France Bruno Le Maire, a avoué, ce jeudi 21 octobre, que ce déficit devrait être supérieur à 5 % et, donc, « plus élevé » que les 4,9 % initialement prévus dans la construction du budget 2023 et voté fin 2022 à grands coups de 49.3. On en saura plus, du moins on l’espère, la semaine prochaine lorsque l’INSEE aura rendu les chiffres relatifs au PIB (produit intérieur brut). Avouons que ces pourcentages, pour le vulgum pecus que nous sommes, ne nous disent pas grand-chose. On comprend bien que 5,6 % de déficit par rapport au PIB (c’est le chiffre qu’on commence à lire, ici et là), c’est beaucoup moins bien que 4,9 %, mais encore ? Faites le tour de la presse et vous aurez du mal à avoir des chiffres bruts : x % du PIB, ça veut dire quoi, en milliards ? Pour mémoire, en 2022, le PIB de la France s'élevait à 2.639 milliards.

D'emblée, un déficit prévu à plus de 161 milliards

Pour tenter d’y comprendre quelque chose et de réaliser qu’il y a de quoi être saisi d’effroi par l’infini de ces chiffres (pour paraphraser Pascal), allons à la source, c’est-à-dire au budget de l’État pour 2023, « voté » fin 2022. Une remarque, tout d’abord : bien comprendre qu’un budget a un caractère prévisionnel. Les recettes fiscales, notamment la TVA, ne sont jamais certaines et tributaires de la conjoncture économique. On pourrait se dire que les dépenses sont un peu plus prévisibles, mais ça, c’est la théorie. Ce budget, donc, prévoyait 455,2 milliards de dépenses et 293,7 milliards de recettes. Faites le calcul : d’emblée, la loi (mais rassurez-vous, c’est comme ça depuis plus de quarante ans) prévoyait un déficit de 161,4 milliards. En clair, la loi actait que plus de 35 % du budget de l’État devrait être financé par la levée d’emprunts. Colossal.

Imaginons un ménage qui ferait pareil...

Ramenons les choses à notre misérable échelle de contribuables et imaginons un ménage de Français moyens qui, avec deux salaires, gagne 48.000 euros par an, après prélèvements fiscaux, et que ces 48.000 euros ne couvrent en fait que 65 % de ses dépenses s’élevant à 74.000 euros : Madame a ses désirs, Monsieur ses envies, ou inversement. Imaginez... Dans la vraie vie, c’est quasiment impossible. Mais imaginons, quand même, que ce ménage trouve le moyen d’emprunter 26.000 euros, non pas auprès des banques, mais de copains qui ont gagné au loto ou de la famille (la vieille tante qui ne sait quoi faire de ses ronds), pour poursuivre sur le même train de vie. Disons qu’ils empruntent sur 15 ans à 4 % (le copain et la vieille tante ne perdent pas complètement la boule), ce qui coûtera à ce ménage environ 2.300 euros par an (intérêts et principal), montant qu’il devra intégrer dans la construction de son budget. Puis disons que, l’année suivante, ils continuent sur la même lancée, qu’ils trouvent encore des bonnes poires pour leur prêter 28.000 euros (les 26.000 manquants pour tenir leur rang plus 2.000 pour couvrir le prêt contracté l’année passée), et ce, pendant cinq ans. Le capital de la dette du ménage passera alors à 130.000 euros et le remboursement des différents prêts passera, au bout de ces cinq ans, à près de 12.000 euros par an pour 48.000 euros de rentrées, soit 25 % des revenus consacrés à la dette. Et imaginons que la fête continue comme ça, à l’infini. À l'infini, pas tout à fait, car la vie des ménages, Dieu merci, a une fin.

Situation impossible, évidemment, pour un ménage. Impossible aussi, d’ailleurs, pour les collectivités territoriales (régions, départements, communautés de communes, communes) à qui l’État donne des leçons de bonne gestion, alors même que la loi interdit (et c’est très bien ainsi) à ces collectivités de s’endetter pour couvrir les dépenses de fonctionnement. En revanche, c’est possible pour l’État. Et l’État, paraît-il, c’est nous. Et heureusement, encore, que nous sommes gouvernés par des Mozart de la finance…

Georges Michel

https://www.bvoltaire.fr/deficit-de-letat-heureusement-que-nous-sommes-gouvernes-par-des-mozart-de-la-finance/

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