Au lendemain de l’élection présidentielle américaine qui a tenu le monde en haleine, CNews a reçu sans tristesse - on s’en doute - les résultats d’audience de la veille. En ce jour de retour triomphal et inattendu de l’ancien président américain, CNews s’est imposée comme la première chaîne d’information de France, la première chaîne de l’univers de la télévision numérique terrestre et la cinquième chaîne nationale, avec 4,5 % de part d’audience sur les Français âgés de 4 ans et plus, selon les chiffres de Médiamétrie communiqués par la chaîne. CNews signe, au passage, son record de la saison, enchaînant les exploits du matin au soir. Alors que tombaient les premiers résultats du scrutin, la matinale de Romain Desarbres battait son record historique, avec 370.000 téléspectateurs. Dans la foulée, Pascal Praud enregistrait son record de la saison, avec 650.000 téléspectateurs, Sonia Mabrouk son record historique, avec 475.000 téléspectateurs, Laurence Ferrari et Christine Kelly (qui recevait Éric Zemmour) leur record de la saison, avec respectivement 529.000 et 782.000 paires d’yeux et d’oreilles devant leur poste.
Un revers lourd de conséquences
Le quotidien Le Parisien a obtenu des échos en interne, chez BFM TV, où le dépit est palpable : « Que BFM TV soit devancée un jour d’élection aux États-Unis, c’est fou », glisse-t-on, au sein de l’ex-première chaîne d’information détrônée, voilà peu, par… CNews. « C’est hallucinant… et triste ! », ajoute cette voix anonyme. La punition est d’autant plus sévère que l’audience de BFM TV bondit traditionnellement, lors des grands événements. On a parlé, longtemps, de « réflexe BFM », pour qualifier l’attractivité traditionnelle de la chaîne, dès lors qu’un grand événement mobilisait l’actualité. Cette fois, plus que d’habitude, BFM avait mis les petits plats dans les grands et mobilisé de gros moyens pour envoyer près de 50 salariés outre-Atlantique, journalistes, cameramen, etc. CNews n'avait délocalisé que huit salariés.
Les résultats du 6 novembre ont des allures de tremblement de terre lourd de conséquences. Première conséquence : BFM TV est désormais fragilisée, face à CNews, même sur son point fort des grands événements, ce qui a de quoi interroger ses managers. Que reste-t-il, à l'ex-première chaîne d'information ? Deuxième conséquence : le déploiement de moyens de direct exceptionnels ne fait plus systématiquement la différence avec sa concurrente mois bien lotie, financièrement. Du reste, France 2, qui avait délocalisé le plateau de son 20 Heures à New York à grands frais, ne s’est pas rapprochée de TF1, toujours dominante, bien que le présentateur Gilles Bouleau soit resté à Paris. Là encore, quels atouts reste-t-il à BFM TV ? Troisième enseignement : le format d’information brûlante, appelé « breaking news » dans le jargon du métier, semble donc marquer le pas pour laisser la place à des décryptages et des analyses plus engagés. Le public aura préféré le commentaire, la marque de fabrique de CNews, à l’information brute, correspondant au savoir-faire de BFM TV.
Enfin, cette journée exceptionnelle confirme à la fois la dynamique, qui semble irrésistible, de CNews et la crise d’identité de BFM TV, désormais à la peine, face à sa concurrente, dans de nombreux compartiments du jeu. La preuve ? En octobre, CNews a encore atteint un nouveau record historique, avec 3,1 % d’audience de moyenne, en hausse de 0,4 point, ce qui représente un bond considérable sur le marché des chaînes d'information. Un défi considérable pour le nouveau propriétaire de BFM TV, le très macroniste Rodolphe Saadé, et pour ses équipes. Et une mauvaise nouvelle de plus pour la gauche française, dressée depuis des années jusqu’à l’obsession contre Vincent Bolloré et sa chaîne CNews. On se souvient de l’audition homérique du patron du groupe Bolloré à l'Assemblée nationale. L’audience de CNews, le 6 novembre, fait figure de caillou blanc sur le chemin de la révolution en cours dans les médias, comme dans l’opinion.