Mais un élément a tout changé, dans cette affaire : les images. Obtenues par le média Frontières, elles ont - et on le comprend - fait le tour du Net. Ces images ont permis de mettre ce crime en lumière, lui qui n’aurait probablement pas fait l’objet de trois lignes dans la presse, autrement…
Partager des images ou commettre un crime : quel est le plus grave ?
Une fois de plus dans ce genre d’affaire, des personnalités de gauche ont dénoncé non pas le crime mais la diffusion des images... Ainsi, le député NFP Gabriel Amard tweetait son indignation d’apprendre que « que le média d’extrême droite Frontières a accès aux caméras du métro lyonnais ».
Le toupet qu’il faut, pour minimiser une tentative de meurtre par rapport à un partage de vidéo, n’est d’ailleurs pas l’apanage exclusif de ce député, puisqu’à plusieurs reprises, ces derniers mois, des politiques et même des médias en ont fait usage. À croire que la diffusion des images est plus répréhensible que les crimes dénoncés. Ainsi, après l’effroyable attaque d’une grand-mère et de sa petite-fille devant chez elles à Bordeaux, BFM TV publiait un article au ton menaçant : « Agression à Bordeaux : relayer la vidéo sur les réseaux sociaux peut vous coûter très cher. » Et la Justice semble suivre. Très récemment, le vigile qui a diffusé la vidéo du viol d’un jeune handicapé à Nantes a été condamné à six mois de prison avec sursis… Un système qui marche sur la tête.
Cette décision ne s’applique pourtant pas au simple fait de partager des vidéos sur Internet, surtout en vue de les dénoncer. En ce sens, l’article précité de BFM TV n’était pas loin de relayer de fausses informations, puisqu’il prétendait que la simple « diffusion des images brutes est totalement interdite ». Cette interdiction qui serait « totale » n’existe pourtant, évidemment, pas. En droit, l’article 222-33-3 du Code pénal n’a jamais été voté pour interdire la simple diffusion d’images. Au contraire, cet article a été voté afin de punir les complices des agresseurs qui utilisent la vidéo pour encourager l’agression. Il s’agit de complicité. Ce qui n’est évidemment pas le cas, lorsque l’on dénonce les violences.
C’est ce que confirme, d’ailleurs, une question écrite posée par une députée socialiste de l’Hérault en 2009. Celle-ci s’inquiétait, précisément, des dérives auxquelles on assiste. Dans la réponse à cette question écrite, le gouvernement qui avait fait voter cette loi avait confirmé qu’il s’agissait de punir les complicités.
La diffusion des images sert la démocratie
Mais au-delà du droit, la diffusion et le partage de vidéos de faits divers devraient même être encouragés (tant qu’il s’agit, bien sûr, de les dénoncer). D’abord, car cela constitue une aide souvent précieuse pour l’enquête. Ainsi, à Lyon, c’est parce qu’un proche du suspect de Lyon l’a reconnu sur la vidéo que celui-ci a été identifié. Ensuite, parce qu'il s’agit d’une question de démocratie. En effet, dans la société de l’image, les réseaux sociaux et les téléphones portables permettent ne pas laisser dans l’ombre des délits et des crimes.
Les infractions du Code pénal deviennent, alors, plus qu'une froide nomenclature juridique : elles deviennent des visages et des émotions, celles des victimes. Pour qu'un maximum d’informations possible passe dans le débat public, la presse doit jouer son rôle : celui de diffuser ces images. C’est un devoir citoyen d’en parler, d’en discuter et de ne surtout pas chercher à enterrer le sujet.