Quèsaco ?
Comme l’explique au Progrès Boris Tavernier, député écolo du Rhône, « concrètement, ça pourrait prendre la forme d’une carte Vitale de l’alimentation, sur laquelle on créditerait chaque mois 150 euros qui seraient à dépenser pour acheter des produits conventionnés démocratiquement ». L’idée part de constats exposés dans cette PPL et que tout le monde peut malheureusement faire aujourd’hui, dans notre pays : précarité alimentaire croissante (plus de huit millions de personnes dépendent de l’aide alimentaire), malbouffe, consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique ainsi que celle de fruits et légumes plus importante chez les classes sociales les plus aisées que chez les ménages modestes, poste alimentation variable d’ajustement d’un budget grevé par les dépenses contraintes (logement, énergie). Et, brochant sur le tout, système agricole à bout de souffle. La France de Macron, quoi.
Du collectif au collectivisme
Mais passée l’étape du constat, les choses se gâtent lorsque les écolos estiment qu’« augmenter les revenus individuels circonscrit la question alimentaire à l’échelle individuelle au lieu d’en faire un débat collectif vers l’évolution de notre système alimentaire ». C’est-à-dire ? « L’enjeu est de sortir d’un modèle de consommation et de production reposant sur les seuls engagements individuels pour aller vers des choix collectifs autour de notre modèle alimentaire : la manière dont nous produisons notre alimentation et dont nous la consommons doit être définie collectivement. » Quelque part, on doit appeler ça le communisme, car du collectif au collectivisme, il ne faut pas grand-chose, surtout lorsqu'on s'en mêle à gauche.
Ainsi, la PPL pose le principe de l’universalité pour « construire ce régime de démocratie alimentaire ». On connaissait les démocraties représentative, participative, populaire aussi... Voici venu le temps de la « démocratie alimentaire ». Avec les écolos, « c'est le pays joyeux des enfants heureux et des monstres gentils ». Pourquoi pas. Il est vrai que, ces derniers temps, les Français restent sur leur faim, en matière de démocratie directe.
122 milliards par an...
Avant d’aller plus loin, prenons notre calculette : 150 euros par mois multipliés par le nombre d’assurés sociaux, ça fait… Ça dépend. Est-ce qu’on prend en compte, aussi, les assurés sociaux fantômes (pourquoi pas, sachant que l’adjectif valise « inclusif » apparaît évidemment dans le texte. Je ne sais plus où ; vous vérifierez…) ou bien nous limitons-nous au nombre plus ou moins officiel de Français ? Bon, on ne va pas chipoter, on va partir sur les 67,8 millions de Français. Donc, 67,8 x 150 x 12, ça fait 122.040.000.000 euros : 122 milliards d’euros par an. Histoire de poser le cadre de l’action et l’ampleur des dégâts, il faut savoir que, toutes branches confondues, la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025 prévoit 666 milliards d’euros de dépenses avec un déficit qui ne serait « que » de 22,1 milliards d’euros… Avec de tels chiffres, dans un monde rationnel, le débat serait clos subito.
Un « Parlement alimentaire »
Mais, mettons, et tentons l’expérience (car cette PPL propose d’expérimenter ce dispositif pour cinq ans dans « vingt territoires au plus »). Cette carte alimentaire ne permettrait pas d’acheter n’importe quoi, n’importe où. Non. Il s’agit d’instaurer un « système de conventionnement décidé démocratiquement au sein d’un Parlement alimentaire ». On vous épargne les détails mais... usine à gaz à l’horizon. Ce « parlement alimentaire » (idée, comme ça : en proposer la présidence à Gérard Larcher) déciderait « les conditions d’éligibilité des produits et des magasins visant à soutenir le développement d’une agriculture locale, respectueuse de l’environnement ». Que du vertueux. En principe...
Le financement ? Pas de problème, ils ont pensé à tout. Un financement tripartite : État, collectivités locales et citoyens via la caisse de cotisation. C’est-à-dire, au bout du circuit pas tout à fait court, le contribuable-assuré social. On prend l’argent d’une main pour le redonner de l’autre avec, au passage, la perception des faux frais pour faire fonctionner l’usine à gaz administrative et, bien sûr, cerise sur le gâteau écologiste, la rééducation des masses populaires.