
Vous avez fait la rencontre de Clara, une adolescente qui a été forcée à se prostituer dès 13 ans et demi… par ses copines du foyer.
Nadège HUBERT. Clara a vécu dans l’un des pires foyers de Marseille, le Peps 13. C’est le seul qui accepte toutes les filles, même celles qui ont été renvoyées d’autres structures ou qui se sont prostituées. Cette adolescente d’origine bulgare a eu une vie cabossée. Elle a été abandonnée par ses parents, a été trimballée dans plusieurs familles d’accueil. Ce sont ses amies du foyer qui la poussent à se prostituer et elle se laisse embarquer. Puis elle se rend compte que l’une d’elles la force, la frappe, la menace. Alors elle se révolte et porte plainte contre un de ses clients… un homme de 50 ans, qui dirigeait une organisation humanitaire pour les demandeurs d’asile. Auprès d’elle, il se faisait passer pour un médecin et la payait en cocaïne.
C.A. Lors du procès, le client niait en bloc les rapports sexuels et la minorité de Clara. Alors le procureur a montré une photo d’elle en petite robe à fleurs ; il était impossible de penser qu’elle était majeure, on aurait dit qu’elle sortait de l’école primaire. Au final, le client n’a écopé que de dix-huit mois de prison avec sursis, dont six mois de sursis probatoire. Les peines sont toujours particulièrement faibles, alors que l’on devrait parler de viol, les victimes n’ayant pas 15 ans. Or, les clients, qui viennent de tous milieux, ont la même défense : ils disent ne pas savoir que la prostituée était mineure.
N.H. Clara a eu le courage de témoigner à son procès ; c’est très rare, car les mots dits au tribunal sont terribles à entendre pour les victimes. On est face à un tsunami, et rien ne change, alors que ce phénomène est en train de profondément marquer une génération. Il y a des #MeToo pour plein de choses. Sur ce sujet aussi, il y a matière à s’exprimer, dénoncer et parler.