« Ils avaient des matraques »
Ce père de six enfants, investi dans le scoutisme, pense pouvoir discuter avec ces jeunes, et peut-être même les raisonner. Jamais il n’imagine qu’il peut se faire agresser. « C’est totalement hors de mon référentiel ! » Pourtant, alors qu’il suit la bande dans une rue voisine, Yann est attaqué par derrière. « Quatre d’entre eux se sont cachés et m’ont pris par surprise. J’ai tenté de m’échapper mais ils m’ont mis à terre et ont commencé à me frapper », rapporte-t-il. « Ils étaient armés de matraques télescopiques, ils m’insultaient. Ils tentaient même de frapper ma tête » poursuit le père de famille, qui « se voit alors mourir ». Un voisin courageux finit par sortir de chez lui, suivi de près par les forces de l’ordre, et met en fuite les jeunes délinquants. Quatre sont interpellés. Mineurs, ils seront relâchés dès le lendemain. « Quand j’ai déposé plainte, les policiers m’ont expliqué qu’ils allaient les relâcher, qu’ils les rattraperaient dans dix jours et qu’ils seraient à nouveau relâchés », se désole Yann. Pire : ces mineurs « ont tenu 24 heures sans lâcher leurs copains. Résultat : ils prennent du galon et gagnent l’estime de leur groupe. »
Le lendemain, le père de famille garde les séquelles de sa violente agression. « J’avais beaucoup d’hématomes sur tout le corps. Le médecin légiste a mis près d’une heure à tous les examiner ! » Il se voit prescrire 10 jours d’interruption totale de travail (ITT). Les jours qui suivent, la douleur l’empêche de se déplacer, de conduire et même de dormir. À cela s’ajoute le choc psychologique. « J’ai peur le soir, j’ai peur pour mes enfants », nous confie Yann.
Il interpelle Darmanin et Retailleau
Vingt jours après les faits, ce père de famille reste sidéré et ressent un profond sentiment d’injustice. « D’abord, ils viennent casser ma voiture alors que je n’ai rien fait. Ensuite, je n’ai même pas pu leur parler, explique-t-il. Ils ont visé ma tête, c’était pour me tuer. J’aurais donc voulu leur expliquer qu'ils étaient sur le point de tuer. »
Quelques jours après son agression, Yann décide de raconter, sur ses réseaux sociaux, ce qui lui est arrivé. « C’était thérapeutique, j’avais besoin que ça se sache. » À la fin de son mot, il décide d’interpeller Gérald Darmanin et Bruno Retailleau. « Quelle est la suite ? Une nouvelle sauvagerie ? Un mort de plus ? Quelle est la solution pour vivre en paix ? », s’interroge-t-il. « Au fond, ce n’est pas aux jeunes qui m’ont agressé que j’en veux. Je les plains. Je me demande quel sera leur avenir. J’en veux surtout à notre système. Comment notre système a pu fabriquer ça ? [….] Ce n’est pas normal que dans mon quartier, je ne puisse pas vivre en paix ! »
*Le prénom a été modifié