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Fin du front républicain ? L’annonce de Nicolas Sarkozy faite à Marine Le Pen

Fin du front républicain ? L’annonce de Nicolas Sarkozy faite à Marine Le Pen…

Nicolas Sarkozy vient de passer trois semaines en prison. Le temps d’écrire un livre. Il faut bien s’occuper. Il assure que pour lui, le front républicain, comme Capri, c’est fini. Simple fissure de plus ou fissure de trop ?

Très logiquement, l’incarcération de l’ancien premier des Français a fait couler autant d’encre que de salive. Même en cette rédaction, les avis étaient partagés. Pour le camarade Xavier Eman, sa sanctification subite prêtait à rire. Sarko subito ? Chez certains de nos confrères, on n’en était pas loin. Pour l’auteur de ces lignes, l’image de la France à l’international aurait dû lui éviter cette sanction ; tout comme elle naguère épargnée à Jacques Chirac, en vertu des mêmes considérations. Bref, tout se discute et chacun a ses raisons. Pour autant, les dossiers dans lesquels apparaît le nom de Nicolas Sarkozy n’ont rien d’anodin et ne sauraient être le seul fait du seul Syndicat de la magistrature. Puis, au-delà de l’indubitable humiliation, Sarko n’est pas non plus Nelson Mandela. Du calme et du sang froid, donc.

Quand Marine Le Pen appelle Nicolas Sarkozy en prison…

En revanche, la lecture de son Journal d’un prisonnier (Fayard) est des plus instructives. Hormis les considérations d’ordre spirituel, Sarkozy prie beaucoup et médite l’Évangile de la Toussaint : « Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous. Réjouissez-vous car votre récompense sera grande dans les Cieux. » Fort bien, mais à ce compte, la majorité de notre personnel politique devrait être promis à la sainteté. C’est en tout cas ce que retient principalement Le Figaro de ce livre, écartant pudiquement le reste, plus politique et susceptible de semer le trouble chez ses lecteurs qui sont également des électeurs du « cercle de la raison ». Sans surprise, un jour avant, le 7 décembre, Le Journal du dimanche n’hésite pas à aller à l’essentiel, relayant ce passage autrement plus dérangeant : « Finalement, les meilleures surprises sont venues de ceux que j’attendais le moins. Marine Le Pen fut de celles-ci. Elle avait appelé à voter contre moi en 2012 et donc pour François Hollande, ce qui ne m’avait pas plu. J’avais capté son électorat populaire. Elle me considérait, à juste titre, comme son principal adversaire. J’avais en outre toujours refusé le moindre accord avec son père, elle-même et son parti. C’est dire si les contentieux entre nous étaient nourris et complexes. »

Le geste de Marine Le Pen envers celui ayant en effet perpétré le hold-up électoral du siècle en 2012, laissant Jean-Marie Le Pen en slip et en tongs sur la banquise, peut-il alors s’expliquer par le fait que tous deux sont victime d’exécution provisoire par ces mêmes juges ? Nicolas Sarkozy envisage éventuellement cette hypothèse avant de d’affiner son analyse : « Certes, le contexte judiciaire pouvait nous rapprocher. L’application d’une peine d’inéligibilité provisoire avant son appel équivalait à lui interdire l’élection de 2027, ce qui était particulièrement choquant. » Et pourtant : « Me soutenir était pour elle plutôt un risque qu’un avantage à quelques mois de son propre procès en appel. J’ai apprécié ses déclarations publiques à la suite de ma condamnation, qui étaient courageuses et dépourvues de toute ambiguïté. Je lui ai donc téléphoné pour la remercier. C’était notre premier contact depuis longtemps. »

Pourquoi donc un tel geste de Marine Le Pen, où elle avait plus qu’à perdre qu’à gagner ? La réponse est plus d’ordre humain que politique et tient avant tout à la psychologie du père, dont sa fille cadette semble avoir hérité.

Retenir les leçons de Jean-Marie Le Pen…

À votre serviteur, Jean-Marie Le Pen confia un jour : « Nous sommes en 1994, quelques jours après les élections européennes. La liste de Michel Rocard a été torpillée par François Mitterrand qui lui a balancée celle de Bernard Tapie dans les pattes. Quelques jours plus tard, je suis dans la gare qui nous mène au parlement de Strasbourg et je vois Michel Rocard à la buvette. Il enchaîne les Gauloises tout en sifflant bière sur bière. J’ai connu Rocard à la Corpo de droit, à Paris. Nous étions alors adversaires politiques. Mais le voir là, ignoré de tous, abandonné par les siens, en train de se saouler scientifiquement, ça m’a fait quelque chose. J’ai donc tenté de le consoler. Et il m’a dit que j’étais le premier à le faire et que je serais probablement le dernier. Je crois que cela l’avait touché, surtout venant de moi. C’est ça aussi, la politique. On doit être impitoyable durant la bataille, mais miséricordieux avec les vaincus. »

Quelques années plus tard, Marine Le Pen, après avoir été épuratrice implacable du Front national, durant l’équipée mégrétiste au clair de Lune qu’on sait, fut la première à tendre la main à ceux qu’elle avait naguère piétinés : Steeve Briois, devenu depuis maire d’Hénin-Beaumont, et même Philippe Olivier, son beau-frère félon, aujourd’hui son conseiller particulier. Soit une forme d’éthique, supérieure à la morale, comme écrirait Alain de Benoist. Chez Marine, il y a donc beaucoup de Jean-Marie. Les chiens ne font pas toujours des chats. Pourtant, histoire de demeurer dans le registre animalier, le fauve politique n’est jamais loin chez celle qui a trois fois brigué la magistrature suprême.

Nicolas Sarkozy signerait-il l’acte de décès du front républicain ? 

Nicolas Sarkozy : « Au cours de la conversation, elle m’a interrogée sur la situation politique. Je lui ai répondu que ma conviction était arrêtée. Les élections législatives anticipées n’étaient qu’une question de semaines. Je ne voyais pas comment le président Macron pourrait y échapper. J’ajoutais que ne je croyais pas à la démission de ce dernier, ce qui renforçait encore la probabilité de cette perspective. Elle me répondit : “Votre voix porte sur l’électorat de la droite populaire, vous associerez-vous à un quelconque front républicain ?” Ma réponse fut sans ambiguïté : “Non, et de surcroît je l’assumerai en prenant le moment venu une position politique sur le sujet.” »

On objectera qu’il ne s’agit peut-être là que d’une simple promesse n’engageant que ceux qui veulent bien y croire, pour reprendre l’expression consacrée. Mais le destin politique de Nicolas Sarkozy est depuis longtemps derrière lui. Il n’a plus rien à gagner, étant déjà arrivé au sommet, et plus grand-chose à perdre. Ce d’autant plus que Marine Le Pen lui glisse au passage un mot sur Carla Bruni, épouse qu’il révère d’autant plus qu’elle ne l’a jamais lâché en ces temps pour lui de plus en plus difficiles : « Dites à votre femme que j’ai admiré l’élégance avec laquelle a jeté à terre la bonnette du micro de Mediapart… Elle l’a fait avec une classe et une douceur remarquables. » Maluche, la Marine. Sincère, sûrement ; mais maluche tout de même…

Les inquiétudes du Monde…

Une fissure de plus dans un front républicain de plus en plus fragile ? C’est évidemment l’avis de Solenn de Royer, journaliste au Monde qui, dans une tribune publiée ce 8 décembre, s’alarme : « Face au rouleau compresseur RN, à quoi sert le parti Les Républicains ? » À inverser ce fameux front, semble-t-il, des personnalités telles que Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez en venant à se mettre au moins d’accord sur le point voulant que pas une voix de droite n’aille à la gauche et encore moins à l’extrême gauche.

Faut-il pour autant y voir une possible et future union des droites ? Non. Car cette droite donnée pour être « républicaine et de gouvernement » n’y a plus rien à y gagner tandis que le Rassemblement national aurait beaucoup à perdre en abandonnant sa stratégie transpartisane. Malgré son exclusion du mouvement en partie fondé par ses soins, la maxime de Jean-Marie Le Pen, voulant que son combat soit destiné à faire gagner la France et non point la droite, demeure d’actualité. D’ailleurs, la seule « union » qu’il a toujours proposée depuis des décennies consistait à des accords de second tour, visant à éliminer le candidat de gauche, à condition que la droite se rallie au sien et inversement. Le moins qu’on puisse prétendre est qu’il n’a guère été entendu.

Et Philippe de Villiers qui entre dans la danse…

C’est ce simple bon sens que vient étonnamment de faire sien Philippe de Villiers, à l’occasion d’un entretien accordé à Valeurs actuelles, ce 19 novembre : « Ce type d’accord est le seul à être vraisemblable et souhaitable. » Comme quoi la sagesse peut arriver à tout âge. Mieux, il tord le cou à la légende urbaine voulant que le RN soit un parti « socialiste », voir « communiste » : « Ceux qui jugent Marine Le Pen seraient plus crédibles s’ils n’étaient les héritiers de quarante années de déficit budgétaire et d’endettement. La droite était réputée pour son esprit d’économie. Elle a rejoint la gauche. Juppé et Lecornu incarnent physiquement l’impôt. »

Quant à Bruno Retailleau, l’un des plus prompts à colporter ce genre d’accusations, le vicomte, manifestement en proie à une vigoureuse poussée testiculaire, lui règle son compte de la sorte : « Je le connais très bien. C’est un garçon de valeur. C’est moi qui l’ai lancé. C’est moi qui l’ai formé. Il a travaillé à mes côtés pendant trente ans. Il était derrière moi pour les combats que j’ai menés contre Schengen et le sociétalisme décadent. Puis, il m’a quitté sans prévenir, pour rejoindre le parti que nous avons combattu ensemble. (…) Il ne sera jamais qu’un efficace numéro deux. »

Et pour ce qui est de cette primaire censée rassembler la droite –– sans y convier le RN, il va sans dire –, son avis est plus tranché encore : « La primaire est à notre constitution ce que les petits chevaux sont au Prix d’Amérique. (…) Ce sont des taureaux avec des cornes de limaçon. »

Si l’on résume, le front républicain ne se porte pas au mieux et l’union des droite est au plus mal. Espérons que celle des patriotes, d’où qu’ils viennent, soit en meilleure santé.

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