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[TRIBUNE] La cure d’austérité de Terra Nova : tremblez, retraités !

@Unsplash
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Sous la plume de Guillaume Hannezo, le think tank Terra Nova, porté par la gauche de gouvernement, vient de publier une note sur la nécessaire cure d'austérité que notre endettement imposera tôt ou tard à nos finances publiques : soit par augmentation des impôts, soit par contraction des dépenses.

Cette étude rejoint celles du Conseil d'analyse économique et de l'Institut Montaigne : notre dette publique nous met désormais en danger et nécessite une purge rapide qui redresserait nos comptes à concurrence de 120 milliards d'euros. Tous les analystes économiques conviennent grosso modo de cette évaluation centrale, de ses causes et de la myopie du débat politique à ce sujet. Par contre, le dosage entre les remèdes de cheval à administrer diffère.

Une dette publique risquée

Terra Nova n'y va pas par quatre chemins : la France est devenu un pays du « Sud du Club Med » dont la dette publique entre en concurrence avec celles de l'Espagne, du Portugal ou de l'Italie.

Fait beaucoup plus troublant : la République française doit désormais rémunérer ses préteurs à un taux supérieur à celui dont bénéficient certaines de nos propres multinationales ! Or, depuis les travaux de Sharpe et Samuelson, il était admis que c'étaient les emprunteurs publics souverains qui empruntaient au taux le plus bas, dit « sans risque », puisque les États ne peuvent pas être mis en liquidation.

C'est là que Guillaume Hannezo lève un lièvre : étant donné leur rationalité, les marchés financiers ne motivent pas le « spread » français par un simple mouvement d'humeur. En fait, ils exigent la rémunération correspondant à une probabilité de perte de 10 % de leur mise à l'issue de dix ans. Soit 10 % de chances que la France répudie 100 % de sa dette. Ou 20 % de chances qu'il en répudie la moitié. Ou encore 33 % de probabilité que notre État rembourse sa dette dans un Nouveau Franc dévalué de 33 %. Mais passons sur une telle hypothèse, puisque personne ne l'évoque...

Un diagnostic partagé

La note de Terra Nova est assez consensuelle quant à l'origine du dérapage budgétaire : la Macronie a fait montre d'une coupable légèreté. Nos Mozart aux petits pieds ont mal anticipé les conséquences budgétaires du vieillissement de la population française. Ils n'ont pas non plus profité des taux d’intérêt très bas qui régnaient il y a dix ans pour emprunter à très long terme : nous sommes donc en train de rembourser des prêts à 1 % en les refinançant par des obligations à 3,5 % : la charge de la dette s'envole donc de 10 milliards d'euros par an.

Il est exact que le déficit public devra donc, afin de sortir de la spirale de la dette, passer en dessous de 3 % par an : soit un redressement budgétaire de 120 milliards d'euros. Chiffre que le Cercle national des économistes avait d’ailleurs avancé l'année dernière. La facture est salée : 4.000 euros par an de prélèvements supplémentaires par an pour chaque ménage français, c’est-à-dire 5 % de notre pouvoir d’achat. Et cette purge se prolongera probablement jusqu’à la fin de la décennie.

Désaccords sur les remèdes

Chacune des études part du même constat : nous sommes tous conscients qu’il nous faudrait restreindre le train de vie des autres.

La note de Terra Nova est à cet égard bien timide concernant le train de vie de l’État, en limitant les économies annuelles à 6 milliards d’euros (on considérera ici les évaluations centrales de chaque fourchette). C’est évidemment très peu, ce qui n’est pas étonnant venant d’un think tank de gauche. La note nous explique, certes, que beaucoup de dépenses sont incompressibles, sauf à révoquer des fonctionnaires. C’est oublier un peu vite les deniers publics dilapidés dans les subventions wokistes, la politique de la ville, l’aide aux migrants ou la construction d’une école au Zanzibar. Il y a des économies à réaliser sur ces dépenses indécentes en période de disette budgétaire, bien que les montants en cause soient assez peu significatifs. Et la note reste très discrète sur les responsabilités de la gauche dans le domaine d’une décentralisation ratée, source de baronnies dispendieuses.

Plus avant, le think tank respecte la politique de l’offre en faveur des entreprises en la réduisant à la marge de 12 milliards d’euros.

Par ailleurs, il estime également à 6 milliards d’euros le gain financier que rapporterait le « travailler plus » et au maximum 16 milliards pour l’imposition des ultra-riches.

TVA ou CSG ?

Il manque encore 80 milliards d’euros de recettes par an pour... stabiliser notre dette publique ! C’est dire que les joutes parlementaires sont totalement hors-sol.

Et la note d’Hannezo ouvre le vrai débat : il faudra bel et bien recourir à des impôts à base large et fort rendement. Or, un point de TVA rapporte 11,4 milliards à l’État. Et un point de CSG lui procure 14,6 milliards de recettes supplémentaires.

Hold-up sur les seniors ?

La gauche ne se refait pas. En effet, la dernière préconisation de son think tank consiste tout simplement à prendre 40 milliards dans la poche des retraités. Car nos braves seniors soufrent, hélas, d’un vice bien français : ils épargnent à tous âges pour leurs enfants ! D’où l’idée d’une razzia sur leur épargne à coups de CSG, de suppression de l’abattement de 10 %, de gel des pensions, voire même, comme en Grèce, d’une baisse autoritaire des pensions. Enfin, dernière innovation en matière de dépenses maladies : augmenter le reste à charge pour les contribuables aisés. La note précise clairement que cette mesure ciblerait surtout les personnes âgées : les diabétiques et les hypertendus vont être fous de joie !

On peut quand même se demander en quoi un pareil hold-up modifierait le financement du déficit budgétaire français. En effet, les retraités placent leur épargne dans l’assurance-vie, laquelle est ensuite investie dans des obligations de l’État et financent donc son déficit. Pourquoi diable irait on piocher directement dans la poche des retraités ? La réponse figure noir sur blanc dans la note : « À travers le déficit budgétaire, tous les actifs s’endettent pour un profit que recevront les héritiers des classes bourgeoises. » Fin de citation... Tout est dit : fermez le ban ! Notre gauche partageuse est décidément indécrottable.

Pr Jean-Richard Sulzer

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