Ils y ont rencontré des eurodéputées françaises, le mercredi 17 décembre. L’insoumise Manon Aubry, dans l’est de la France, et Sarah Knafo (Reconquête), en Belgique. L'accueil réservé à ces deux personnalités politiques a été révélateur et très... différent.
Dans les choux
Tout sourire, Manon Aubry, en manteau gris et les mains dans les poches, s’approche d’un pas timide des tracteurs lorsqu’un agriculteur remarque sa présence alors qu’il est en communication téléphonique. La députée lui lance un « Bonjour ! » Il s’interrompt pour lui répondre : « Non, pas bonjour ! » Le ton est donné. Il poursuit : « Vous ne nous avez pas protégés. » L’insoumise tente, tant bien que mal, d'expliquer qu’elle « préside le seul groupe qui n’a jamais donné… » Quoi ? Nous ne le saurons pas. L’agriculteur la coupe pour lui rappeler qu’elle a « embrassé von der Leyen après sa réélection ». Tout en s’éloignant, il conclut la conversation d'un cinglant : « Vous êtes des hypocrites ! » Puis : « Vous êtes fourbes ! » Manon Aubry essaie encore : « Vous pouvez m’écouter ? » La réponse est sans appel : « Non, je ne veux pas vous écouter. » La députée européenne de La France insoumise ne s’attendait probablement pas à cette douche froide des acteurs du monde agricole, dans lequel le vote de gauche n’est pas marginal. Bien que son groupe ait voté contre la réélection de la présidente de la Commission européenne, les félicitations adressées à Ursula von der Leyen par Manon Aubry ne passent pas.
À quelque 430 kilomètres de là, devant la Commission, Sarah Knafo s’est elle aussi présentée devant les agriculteurs français en colère. Avec elle, ils ont été doux comme des agneaux. L’élue Reconquête, ouvertement et farouchement opposée à Ursula von der Leyen, n’a, elle, pas eu de mal à s’exprimer, bien au contraire. Une vidéo de plus d’une minute, postée par la principale intéressée, débute ainsi : « Pour moi, l'agriculture est aussi stratégique que le nucléaire. C’est une activité stratégique. Nourrir un pays, c’est stratégique. » Elle fait ensuite un retour en arrière historique pour expliquer le bien-fondé de la PAC (politique agricole commune) qui visait à répondre à la question : « Comment va-t-on permettre aux Européens de créer la nourriture des Européens ? » Une préoccupation qui a été abandonnée au profit d’une politique permettant « d’importer massivement ». Une tendance à inverser, selon l'eurodéputée, en « revenant à la PAC telle qu’elle était pensée à l’origine, avec un système qui vise à aider la production », en éliminant notamment tout un pan administratif imposé à la fois par l’Europe et par la France. Sarah Knafo le martèle : « Les agriculteurs ne sont ni des avocats, ni des fiscalistes : arrêtons de leur imposer les normes les plus contraignantes du monde. Favorisons la production et non l'importation. »
Droite dans ses bottes
Apparemment, Sarah Knafo ne vient pas uniquement pour faire des images pour les réseaux sociaux ; elle s'est intéressée aux problématiques dénoncées et ébauche une solution. Comme sur tous les sujets, elle se veut souverainiste et, évidemment, pour les agriculteurs qui hurlent à la concurrence déloyale induite par le Mercosur, cela suscite l'intérêt. Évidemment, Sarah Knafo a choisi de dévoiler une séquence où elle est à son avantage, contrairement à Manon Aubry qui n'a pas maîtrisé ce mauvais coup de com'. La différence de traitement est néanmoins marquante. Dans un second extrait, des agriculteurs se présentent à la députée Reconquête comme des « admirateurs » et lui offrent une bière. Sarah Knafo a des idées, mais elle a aussi une ligne dont elle ne dévie pas : la défense des intérêts des Français. Une élue droite dans ses bottes et, dans ce milieu où l’on a parfois de la boue jusqu’aux genoux, cela plaît.