On fait grand bruit autour de la subtile proposition de David Cameron développée le 23 janvier. En fin diplomate le premier ministre de Sa Gracieuse Majesté n'a pas manqué d'assortir son propos de conditions suspensives et autres clauses qui rendent totalement hypothétique la sortie négociée du Royaume-Uni hors de l'Union européenne. Personne ne peut ignorer que cette démarche, toute virtuelle, tend à récupérer au profit des conservateurs les voix du parti "Ukip", de Nigel Farage pour les élections de 2015. Ceci n'empêchera pas de constater en 2016 ou 2017 que, décidément la majorité des Anglais et les Écossais préfèrent demeurer dans l'Europe. En attendant, en 2014, les Continentaux, pour éviter le pire, auront bien sûr consenti de nouvelles concessions aux revendications londoniennes. Bien joué David.
Le coq gaulois a réagi selon son habitude. On lui attribue pour cri national "cocorico" ; en vérité l'animal fait surtout "vroum-vroum", ce que confirment le petit sondage du Figaro et les 367 réactions de lecteurs. Nous le plaçons donc en médaillon de la présente chronique.
Plutôt que de persister à mesurer, pour la millième fois depuis mille ans, la portée du bras de mer séparant le comté d'Artois du duché de Kent, on gagnerait à observer le contexte, dans lequel se place cette déclaration.
Les institutions communautaires viennent en effet d'adopter le projet de TTF, taxe sur les transactions financières.
Cinq pays s'y opposaient, parmi lesquels la Suède et, bien sûr, l'Angleterre. Cependant, ce 22 janvier le conseil des ministres des Finances, dernière instance consultée, a entériné le principe de cette mise en place. À ce projet adhèrent les gouvernements de 11 États-Membres sur 27.
Les traités européens permettent de telles décisions fractionnelles. Il s'agira cependant de la première des "coopérations renforcées" dans le domaine névralgique de la fiscalité.
Soulignons d'abord que cet impôt, au départ tout petit, est appelé à grandir selon une règle bien connue. D'origine gauchiste, il était proposé par Paris depuis plusieurs années. Aujourd'hui il est applaudi par 70 associations. Le grand cerveau du parti socialiste Benoît Hamon, ministre de l'Économie solidaire, a le salue pompeusement comme "une taxe qui commence à dessiner ce qu'est le monde post-Lehman Brothers".
Remarquons à peine que les détails techniques de sa mise en œuvre restent problématiques. Un journal économique parisien habituellement sérieux, indiquait au gré du même petit article consacré à cette nouvelle, à deux endroits différents :
- "la taxe Tobin rapporterait 20 milliards par an"
- et plus loin : "la TTF, selon la façon dont elle est définie, pourrait rapporter plus de 10 milliards d'euros".(1)⇓
Deux appellations, deux chiffrages en un seul texte. Ça promet.
Faut-il rappeler, une fois encore, que la novlangue fiscaliste envisage toujours ce qu'un impôt "rapporte" au Trésor Public, et non ce qu'il coûte aux contribuables et à l'économie ?
Au sein des institutions mesurons surtout que la synarchie européenne vient de franchir, assez discrètement, un pas considérable. Elle a obtenu, sur un point de détail, sur un projet soutenu par tous les utopistes de la Planète, sur un dossier encore très vague, une avancée majeure acceptée par les représentants des États.
On a liquidé sans trop de bruit, en effet, en ce début de semaine le principe d'unanimité en matière fiscale.
Les commentateurs agréés ne semblent s'intéresser en ce moment qu'aux relations personnelles entre M. Hollande et Mme Merkel. On nous les dit en voie d'amélioration, à en croire "Gala" et "Point de vue images du Monde". Pendant ce temps, comme dans le célèbre "Gilles" de Watteau, le fond de la scène se transforme. Les deux gros États désignés pour les pivots du système continuent leurs ébats d'hippopotames légers pour la joie des spectateurs, tandis que la réalité met en place tranquillement sa grosse machinerie.
Ainsi l'année 2012 a vu la prise d'une partie du pouvoir par Mario Draghi, forçant les statuts de la Banque centrale européenne.
L'année 2013 commence avec l'avènement du social démocrate néerlandais Dijsselbloem, peu connu dans son propre pays, à la tête d'une Eurozone en rupture désormais affirmée avec les principes constitutifs de l'Union monétaire.
Et tout le monde semble applaudir à l'avènement pratique de ces pouvoirs désormais arbitraires, sans que personne ne puisse nous dire où nous mènent tous ces habiles joueurs de flûte.
JG Malliarakis http://www.insolent.fr/Apostilles