Dans le cadre du débat français sur l’ouverture du mariage civil aux unions de personnes de même sexe, la question a été posée de savoir si les mariages dits "homosexuels" bénéficiaient automatiquement du droit à l’adoption, de la PMA et de la GPA, ou s’il était possible de distinguer l’obtention du droit au mariage homosexuel de celui de l’adoption (voire ensuite de celui à la GPA) pour les mariages homosexuels.
Cette crainte est fondée : Le droit à l’adoption pour les mariages homosexuels est lié au statut du "mariage" en droit civil, et constitue donc un corollaire juridique inhérent et indissociable au statut de "mariage" civil.
Dès lors que le statut juridique du mariage aura été amendé (ouverture du mariage aux personnes de même sexe), l’adoption par les couples mariés homosexuels leur sera automatiquement ouverte par voie juridique. Rien ni personne ne pourra s’y opposer. En effet, si l’adoption est reconnue aux couples mariés hétérosexuels, elle ne saurait être refusée aux couples mariés homosexuels (en raison de l’impossible discrimination fondée sur le sexe et/ou sur l’orientation sexuelle) ; le critère juridique reposant sur l’identité des statuts juridiques.
Puisque l’objectif politique est d’ouvrir le statut juridique du "mariage" aux unions homosexuelles, mariage homosexuel et mariage hétérosexuel sont reconnus identiques, comparables, substituables. Ces statuts sont juridiquement indifférenciés et bénéficient donc de tous les droits attachés au mariage et en particulier de celui de l’adoption.
Il suffit pour s’en persuader d’étudier l’acquis communautaire de l’Union européenne (c.f. reconnaissance mutuelle des documents de statut civil, problématique de la reconnaissance mutuelle des mariages et adoptions conclus dans un Etat Membre) ainsi que les arrêts de la Cour européenne des droits de l’Homme du Conseil de l’Europe sous l’angle de l’identité juridique des situations dès lors que les parties en cause se trouvent dans une situation juridique comparable à celle des couples mariés, indépendamment du sexe ou de l’orientation sexuelle (cf. l’arrêt "Gas Dubois" (requête no 25951/07) de la CEDH).
Par conséquent, même si le gouvernement ou l’Assemblée parlementaire retirait de la proposition législative le droit à l’adoption pour les mariages homosexuels, ce droit serait, de toutes les manières, automatiquement reconnu par la jurisprudence européenne sur base de l’identité juridique des mariages homosexuels et hétérosexuels.
Démonstration :
1. L’arrêt "Gas Dubois" de la CEDH dit en résumé : les deux femmes plaignantes ne pouvaient faire valoir leur droit à l’adoption et donc à la discrimination car, en 2012, le mariage n’était ouvert qu’au couple homme-femme. L’argumentation est fondée sur l’identité différente des deux statuts juridiques.
2. La loi Taubira passe, avec ou sans adoption mais hors PMA. Le gouvernement déclare que la PMA n’est pas à l’ordre du jour.
3. Les Etats généraux sur la Famille et l’Ethique sont lancés sur la PMA
4. Dès l’entrée en vigueur de la loi Taubira, la CEDH sera saisie et condamnera immanquablement la France puisque les deux mariages homosexuel et hétérosexuel seront reconnus identiques.
5. La CEDH prime le droit français, elle retiendra la discrimination (pour les couples mariés homosexuels de ne pas pouvoir adopter) car en droit européen les mêmes droits sont applicables quels que soient les types de couple (non discrimination fondée sur le sexe et/ou l’orientation sexuelle) face aux situations juridiques identiques.
6. L’adoption et la PMA seront donc imposées par la CEDH à la France.
7. Le gouvernement peut se cacher derrière la jurisprudence européenne, et l’adoption pour les mariages homosexuels est assurée.
Conclusion : On ne peut s’opposer à l’adoption par les couples homosexuels qu’en s’opposant au mariage pour tous, dès l’origine, car tout est lié.
Tobias Teuscher. Parlement Européen.
Martha Thès Institut de Politique Familiale France www.ipfe.org